Un village finlandais aux allures bibliques
A Yad Hashmona, niché dans les collines de Jérusalem, des Finlandais et des Juifs messianiques montrent aux visiteurs la vie à l'époque biblique
Dans les années 1960, 15 chrétiens finlandais décident se porter bénévoles en Israël. Si la plupart d’entre eux ne se connaissaient pas, ils partageaient tous un objectif commun : faire preuve de solidarité avec Israël.
En 1971, les Finlandais se réunissent et établissent une implantation communale pour commémorer les Juifs envoyés à la mort par leur gouvernement pendant l’Holocauste. Ils demandent à Israël une parcelle de terrain sur laquelle établir leur petite communauté.
La réponse du gouvernement est lente à venir. Dans l’intervalle, le groupe – composé de célibataires, de couples et de familles – occupe un site temporaire su les flancs du moshav Neve Ilan, aux alentours de Jérusalem, perché sur les collines de Judée.
Enfin, après des mois d’attente, les Finlandais sont informés qu’ils peuvent choisir parmi plusieurs hauteurs inhabitées de la région. Ils jettent leur dévolu sur une colline située juste au-dessus de Neve Ilan, où ils allaient souvent prier. Dévots croyants dans l’Ancien et le Nouveau Testament, les pentes et vallées de la colline leur offraient un cadre rappelant étrangement le paysage biblique.
La construction commence en 1973 à Yad Hashmona (Monument des Huit). Le nom commémore les huit juifs ayant fui l’Autriche en 1938 pour trouver refuge en Finlande. Malheureusement, la Finlande devait elle aussi collaborer avec l’Allemagne pendant la Seconde Guerre mondiale. Et en 1942, les juifs – huit hommes, femmes et enfants – ont été remis aux Allemands et envoyés dans les camps de la mort. Un seul d’entre eux a survécu.
Les bois et autres matériaux de construction de Yad Hashmona ont été importés de Finlande – y compris le sauna. Yad Hashmona fut géré comme un kibboutz, toutefois sans foyers d’enfants. La propriété était collective, tout comme les repas, et l’implantation payait les factures de tout le monde. La première entreprise fut naturellement un atelier de menuiserie où naissaient de beaux meubles en bois.
La petite communauté florissante de Yad Hashmona gère aujourd’hui une maison d’hôtes rustique, qui propose des brunchs le vendredi et abrite un Village biblique.
Comme les kibboutzim, Yad Hashmona a dû effectuer des changements de structure. Ces membres touchent un salaire, assument leurs frais et prennent leurs propres décisions. La maison d’hôtes vit de ses bénéfices et, en dépit de l’absence d’un certificat de casherout, attire de nombreux Israéliens et touristes.
La population de Yad Hashmona est unique. Non seulement de nouveaux chrétiens finlandais ont remplacé les membres décédés ou partis, mais de nouveaux s’y sont greffés, tous des juifs messianiques israéliens, qui célèbrent bar et bat mitzva ainsi que toutes les fêtes juives.
Ils ont foi aux prophètes, et aux miracles. Ils croient que Moïse a conduit les Hébreux hors d’Egypte et en a fait une nation craignant Dieu et respectant un cadre de lois. Et ils adoptent Jésus de Nazareth comme leur Messie.
Selon Tsuriel Bar David, qui a grandi à Yad Hashmona, peu de juifs messianiques peuplaient le pays jusqu’au 20ème siècle, lorsque son grand-père paternel est arrivé. Son nom était Haim Haimov, et il est né dans une famille riche laïque en Bulgarie. Pendant ses études dans une université suisse, il a découvert le Nouveau Testament, et y a cru.
Haimov a immigré en Palestine mandataire dans les années 1920. De retour en Bulgarie pour soutenir l’entreprise familiale, il a rencontré et épousé une juive messianique bulgare. Les deux ont émigré vers la Terre promise et se sont installés à Ramat Gan, où Haimov, son épouse et leurs sept enfants ont constitué le noyau de l’une des premières communautés juives messianiques du pays.
L’un des descendants de Haimov, Eli Bar David, s’est porté volontaire à Yad Hashmona après avoir terminé son service militaire comme parachutiste. Tombé amoureux de l’endroit, il est devenu un membre de la communauté. Un autre descendant de Haimov – le père de Tsuriel – a conduit sa famille à Yad Hashmona, imité par d’autres Juifs messianiques.
Il y a une décennie, Eli créa un village biblique à Yad Hashmona afin que les visiteurs puissent voir de leurs propres yeux comment on vivait à l’époque de la Bible. « Une personne qui vient pour la première fois et qui n’a jamais vu les terrasses agricoles ou les tours de guet mentionnées dans la Bible comprend soudain à quoi cela ressemble », souligne Tsuriel, lors d’une visite du site. Il ajoute que les chrétiens y trouvent une nouvelle signification spirituelle aux passages de l’Ancien et du Nouveau Testament.
Lorsque Tsuriel parle de Yad Hashmona et de sa population, les touristes l’assaillent de questions. Chrétiens et juifs trouvent le sujet du judaïsme messianique assez étrange.
Tsuriel commence notre visite du village avec un panorama biblique des hauteurs. Nous faisons ensuite une halte à la synagogue qui, même si elle semble exister depuis près de deux millénaires, a été conçue et bâtie par l’expert en restauration d’antiquités Yeshua Dray. Si les colonnes et les pavés sont authentiques, tout ce qui semble ancien est le fruit d’un travail artistique.
Nous passons devant une petite piscine – faite de la main de l’homme, bien sûr – qui donne lieu à des histoires de sources bibliques. Puis nous entrons dans une grotte à l’aura antique, probablement parce que ses sarcophages sont authentiques, datant de l’époque romaine. Ici, nous apprenons les coutumes funéraires des périodes du Premier et Second Temples.
De là, nous entrons dans une citerne, puis dans un mikvé, ou bain rituel. Selon la croyance messianique, les premiers disciples de Jésus ont donné au bain rituel juif un tout nouveau sens : non seulement vous étiez purifiés, mais vous sortiez de l’eau prêts à vivre une nouvelle existence.
A la tour de guet (la Shomera biblique), Tsuriel fait remarquer que nos ancêtres dépendaient presque entièrement de la nature. Ils ont construit des terrasses agricoles, comme ceux de Yad Hashmona, et sculpté des citernes pour retenir l’eau. Ils ont également séparé l’ivraie du grain sur les aires de battage, vues lors de notre tour, où nous avons assisté à une démonstration des outils utilisés.
À la presse à huile reconstruite, nous avons appris que nos ancêtres mangeaient rarement des olives, leur production nécessitant l’utilisation de sel – un produit très onéreux. Pourtant, ils utilisaient de l’huile en abondance, pour s’éclairer.
La dernière partie du village renferme un tout nouveau pressoir antique. Notre guide parle de la fabrication du vin comme une d’activité de groupe, les enfants piétinant les raisins, dans les rires.
Il ajoute un aspect inconnu du comportement du Samson biblique, personnage assez étrange et violent.
Dès sa naissance de Samson était un Nazaréen, il lui était donc interdit de s’approcher du vin. Peut-être, dit Tsuriel, qu’enfant, dans un coin, il regardait ses camarades presser du vin. Déjà solitaire, cela l’aurait incité à devenir le personnage triste et vengeur de la Bible.
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Aviva Bar-Am est l’auteure de sept guides en anglais sur Israël.
Shmuel Bar-Am est un guide agréé qui propose des visites privées personnalisées en Israël pour les individus, les familles et les petits groupes.
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