Une droite intransigeante pourrait entraîner Netanyahu sur une voie plus dure encore
À bien des égards, la manifestation pro-réforme de jeudi était également dirigée contre le Premier ministre, et toute proposition plus modérée sera difficile pour le Likud

Au lendemain du grand rassemblement de droite de jeudi à Jérusalem, le Premier ministre Benjamin Netanyahu continue de manquer d’une vision cohérente du projet de réforme judiciaire de son propre gouvernement.
À certains moments, il semble mener la charge, à d’autres, il est mené par des membres de sa coalition, et à d’autres occasions encore, il semble d’accord avec ses opposants.
Il y a quelques semaines, le Premier ministre a cédé à la pression de l’opposition à la réforme, est revenu sur le limogeage du ministre de la Défense Yoav Gallant et a accepté de suspendre les travaux législatifs destinés à affaiblir le pouvoir judiciaire, afin de négocier avec l’opposition et trouver un compromis.
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Depuis lors, et malgré l’opposition de certains au sein du Likud, il donne le sentiment de prendre du recul, rechercher un nouvel ordre du jour et attendre que la réforme soit oubliée, disparaisse ou meure, afin que le pays puisse revenir à un semblant de normalité, et qu’il puisse enfin obtenir une invitation à la Maison Blanche.
L’impressionnant rassemblement de jeudi à Jérusalem, qui a attiré quelque 200 000 partisans de droite, pourrait ramener Netanyahu sur une voie qu’il ne souhaite pas.
À bien des égards, c’était une manifestation contre Netanyahu, et non pour lui.
Bien que son parti, le Likud, ait participé au financement et à la promotion du rassemblement, le Premier ministre lui-même n’a rien fait pour le promouvoir.
En outre, il n’a publié aucune des vidéos de ralliement dont il a pourtant le secret lorsqu’il veut que ses partisans descendent dans la rue ou se rendent au bureau de vote.
Il ne s’est pas davantage exprimé devant les centaines de milliers de personnes venues à Jérusalem, envahissant les rues autour de la Knesset, devant les services du Premier ministre et de la Cour suprême.
Dans une courte déclaration publiée sur les réseaux sociaux, le Premier ministre s’est contenté de remercier les militants d’être venus en signe de « considérable soutien » et de dire qu’ils lui avaient fait plaisir, sans toutefois évoquer le projet de réforme.
Les messages au cœur de la manifestation de jeudi ne sont pas du tout conformes aux tentatives de Netanyahu pour échapper – ou à tout le moins pour modérer – au projet de réforme qui l’a mis en grande difficulté.

Un examen plus attentif du taux de participation lors de ce rassemblement montre que les Likudniks étaient minoritaires.
L’événement était en fait un rassemblement massif du camp national-religieux, avec des participants fermés au dialogue comme à toute forme de compromis avec l’opposition.
L’essentiel venait des implantations et des yeshivot. Les seuls membres du Likud présents sont ceux que toute perspective d’amodiation du projet de réforme hérisse profondément.
L’animateur, le député du Likud Avicahy Buaron, qui a mené la lutte contre l’évacuation en 2017 de l’avant-poste illégal d’Amona, a repris le refrain « Pas de compromis » ad nauseam, et la foule l’a suivi avec enthousiasme.

Les politiciens les plus populaires du rassemblement étaient clairement les plus durs et ceux qui avaient un franc-parler. À en juger par le niveau sonore des applaudissements, les mieux accueillis ont été Itamar Ben Gvir d’Otzma Yehudit, David Amsalem et Tally Gotliv du Likud, et enfin Orit Strock du parti HaTzionout HaDatit.
Le ministre de la Justice Yariv Levin, architecte en chef du plan, a également été accueilli avec beaucoup d’enthousiasme, jusqu’au moment où il a déclaré qu’il était possible de « parvenir à une forme de compromis » – ce à quoi la foule a répondu « Non au compromis » et « Bibi, ne cède pas ».
Pourtant, le message de Levin était important.
Il admettait en effet devant 200 000 personnes de droite que la profonde réforme qu’il avait présentée au pays le 4 janvier n’existait plus en l’état.
À supposer que les parties qui négocient à l’heure actuelle à la résidence du président ne parviennent pas à un accord, le Likud devrait tenter de faire adopter une réforme unilatérale différente, mais qui ne déchaîne pas la colère des foules passionnées réunies hier.
La tâche sera difficile.

Ben Gvir a réitéré jeudi sa demande d’une réforme « totale ».
Netanyahu lui a promis de faire adopter le projet de loi lors de la session d’été de la Knesset, qui s’ouvre ce dimanche.
Nous sommes actuellement au plus fort d’une lutte titanesque entre partisans et opposants de la réforme, mais aussi entre la droite nationale-religieuse de Smotrich, Strock et Ben Gvir d’un côté, et la droite plus modérée de Netanyahu de l’autre.
Personne ne sait comment la situation va évoluer, encore moins après le rassemblement radical de ce jeudi.
À cet égard, il convient de noter la décision haredi de se tenir à l’écart de la manifestation.
Les ultra-orthodoxes ne souhaitent pas s’impliquer en profondeur. Ils y sont plutôt favorables, mais à bien des égards, la réforme ne les intéresse pas beaucoup. Elle n’a fait que leur causer des ennuis en faisant d’eux des boucs émissaires lors des manifestations libérales et anti-réforme de ces derniers mois.
Ce qui compte vraiment pour les Haredim, c’est le projet de loi militaire : ils soutiendront toute proposition modérée tant qu’ils auront la garantie que les étudiants des yeshivot seront exemptés de service militaire.
Netanyahu pourrait les utiliser comme contrepoids au camp religieux national si et quand un plan de réforme plus modéré était mis sur la table, avec l’espoir qu’un tel compromis ne précipite pas la chute de son gouvernement.
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