A Gaza, utiliser l’agriculture pour faire croître l’économie
Se concentrer sur l’agriculture pourrait aider à faire pousser des fraises plutôt que les chiffres du chômage, selon des groupes d'aides internationaux
Des associations d’aides internationales espèrent que l’agriculture pourrait être la clé du renforcement de l’économie brisée de Gaza, et que le besoin important en main-d’œuvre de l’agriculture pourrait faire diminuer le taux de chômage.
Ce mois-ci, le consulat des Etats-Unis à Jérusalem a annoncé une nouvelle initiative dotée d’un budget de 50 millions de dollars, Envision Gaza (Envisager Gaza), un projet sur cinq ans centré sur l’amélioration du taux d’emploi, avec une attention particulière aux domaines de la technologie, du textile et de l’agriculture.
Le secteur agricole de Gaza compte pour une partie relativement faible de l’économie (entre 7 et 8 %), selon une conseillère économique du Consul général des Etats-Unis à Jérusalem. Cependant, les produits agricoles représentent 85 % des exports de Gaza, a-t-elle déclaré. Au moins 30 000 Gazaouis travaillent officiellement dans l’agriculture, en plus des nombreux travailleurs non déclarés, dont des travailleurs à la journée.
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Bien qu’elle ne représente qu’une petite partie de l’économie, comme elle nécessite un grand nombre de travailleurs, elle peut avoir un impact important. Selon la Banque mondiale, presque 80 % de la population de Gaza perçoivent une aide sociale sous une forme ou une autre, et presque 40 % vivent sous le seuil de pauvreté.
Le même rapport de la Banque mondiale note que le taux de chômage de Gaza était de 43 % à la fin de l’année 2014, l’un des plus hauts du monde.
En comparaison, Forbes annonçait que l’Afrique du Sud avait le taux de chômage le plus élevé au monde au niveau national, à 25,5 %, suivie par la Grèce à 24 ,5 %.
Nombre d’associations d’aides internationales travaillent à améliorer l’agriculture gazaouie. Les Pays-Bas ont un programme intitulé Programme d’export de récoltes à haute valeur, qui se concentre sur les produits qui ont des prix de vente élevés sur le marché, comme les fraises et les fleurs, pour les exporter en Europe.
L’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture promeut des jardins personnels sur les toits de Gaza Ville, avec des formations à l’aquaponie et à l’hydroponie, ce qui permet aux familles de faire pousser leurs propres légumes en utilisant un mélange spécial d’eau et de fertilisants qui n’ont pas besoin de terre. L’aquaponie permet aussi aux familles d’élever leurs propres poissons pour les manger, puisque les excréments des poissons fournissent les fertilisants pour les plantes, avec un circuit d’eau fermé.
Le problème majeur pour rendre l’agriculture gazaouie plus profitable est de la sortir de la bande de Gaza vers les marchés israélien, cisjordanien et internationaux. En raison des préoccupations sécuritaires israéliennes, les produits gazaouis doivent être attentivement fouillés et examinés avant d’entrer dans le pays. Selon la conseillère économique, les produits quittant le checkpoint de Keren Shalom doivent passer trois zones de sécurité différentes, et à chaque fois être déchargés et rechargés dans trois camions différents.
Ce processus peut prendre deux à quatre heures, pendant lesquelles les légumes sont au soleil puisqu’il n’y a pas d’installations adéquates pour les garder au frais. Il nécessite aussi de payer des travailleurs pour chaque déchargement et rechargement, ce qui ajoute des coûts importants. Le manque d’installations froides explique pourquoi Gaza n’exporte pas de produits laitiers, malgré un marché prospère, selon le consul général des Etats-Unis.
Ahmed Shafai, 79 ans, producteur de fraises, dit que les frais de traversée de Keren Shalom s’élèvent à 4 000 shekels (950 euros) par camion. Les produits destinés à la Cisjordanie doivent subir le même processus sécuritaire sur leur chemin.
« C’est en fait mois cher d’exporter des fraises vers l’Europe que vers Ramallah », a-t-il dit. Shafai a estimé ses coûts de transports causés par les demandes sécuritaires à environ 2,9 shekels (0,70 euros) par kilogramme, un montant important comparé à ses bénéfices sur les fraises, entre 11 et 13 shekels (2,60 à 3 euros) par kilogramme.
« Il faut trouver un équilibre entre les besoins légitimes de sécurité du gouvernement d’Israël avec la nécessité de construction de l’économie de Gaza », a déclaré Donald Blome, consul général des Etats-Unis à Jérusalem, pendant un évènement célébrant le 9 mai les produits cultivés à Gaza.
En 2014, les produits de Gaza ont été autorisés sur le marché israélien pour la première fois depuis 2007.
Cette action avait été négociée dans le cadre de la fin de la guerre entre le Hamas et Israël cet été-là. Elle a aussi pu être influencée par le fait qu’Israël observait en 2014 – 2015 une année de shemita, une tradition religieuse d’un shabbat agricole annuel, quand les fermiers israéliens permettent à leur terre de se reposer pendant un an tous les sept ans, et que les gens cherchent donc des produits cultivés en dehors d’Israël.
Blome a cependant prévenu que beaucoup d’autres étapes restaient à accomplir pour aider les fermes de Gaza à devenir plus profitables.
« Le secteur agricole est un exemple puissant de la manière dont la coopération entre l’Autorité palestinienne et le gouvernement d’Israël peut bénéficier aux Palestiniens de Gaza et fournir de vraies possibilités économiques en pleine épreuve », a-t-il déclaré.
Pour combattre certaines des pertes qui proviennent des réalités sécuritaires, USAID, en coopération avec les services de Catholic Relief Services, aide à former les agriculteurs de Gaza aux nouvelles technologies pour qu’ils puissent obtenir de meilleurs rendements avec la même surface de terrain. Cela comprend des serres, une amélioration de l’irrigation, et des plates-bandes surélevées pour que les produits comme les fraises soient suspendues au lieu d’être au sol.
« Nous voulons travailler avec des compagnies pour qu’ils deviennent plus compétitifs sur le marché local et celui de l’export », a déclaré Imad Kamhawi, directeur du secteur agricole du projet COMPETE. USAID a travaillé avec 300 agriculteurs ou compagnies agricoles différents à Gaza depuis que le projet a commencé l’année dernière. Plus de 30 entreprises palestiniennes ont signé des contrats avec des acheteurs internationaux, apportant ainsi 34 millions de dollars à l’économie locale.
« Le principal défi est l’eau : le coût d’extraction de l’eau des puits est élevé, et le problème est qu’il n’y a que huit heures d’électricité par jour, mais vous ne savez jamais quand ces huit heures vont avoir lieu », a dit Kamhawi.
Un autre problème, dit Kamhawi, est qu’une permission spéciale est requise pour importer des fertilisants commerciaux à Gaza, parce qu’ils sont considérés comme des produits à « double usage » : comme ils peuvent servir à la préparation d’explosifs, il est difficile pour les agriculteurs de les obtenir pour un usage légal.
Pour l’évènement du 9 mai, le consul général des Etats-Unis a obtenu la permission spéciale d’importer des produits de Gaza pour un dîner de célébration avec des mezzés palestiniens et des spécialités comme un jus rafraichissant de feuilles de roquette. Il y avait aussi des crevettes et des sardines pêchées sur les côtes de Gaza ainsi que des desserts traditionnels et des canapés au concombre et au labané, un fromage de chèvre local.
Ils ont aussi obtenu des permis pour un certain nombre d’agriculteurs gazaouis et pour Jamal Sobeh, le chef du restaurant de Gaza bien considéré Level Up, pour qu’ils assistent à l’évènement.
« Tous les produits et les fruits de mer que vous voyez devant vous, que vous mangez maintenant, le fruit dans les spécialités de jus, tout cela a été produit à Gaza, a dit Blome. Je ne pense pas que quiconque à Jérusalem a pu dire cela depuis 10 ans. »
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