Israël en guerre - Jour 471

Rechercher
Le Carnet du journaliste

Amsterdam: Malgré les menaces et les interdictions, des milliers de chrétiens et de Juifs célèbrent Israël

Environ 2 000 personnes ont participé au rassemblement de jeudi soir devant l'hôtel de ville après l'annulation, par la maire, de la manifestation qui devait avoir lieu place du Dam pour des raisons de sécurité

Des personnes participent à un rassemblement de protestation contre l'antisémitisme à Amsterdam, Pays-Bas, jeudi 28 novembre 2024. (Crédit : AP Photo/Peter Dejong)
Des personnes participent à un rassemblement de protestation contre l'antisémitisme à Amsterdam, Pays-Bas, jeudi 28 novembre 2024. (Crédit : AP Photo/Peter Dejong)

AMSTERDAM — Ce sont environ 2 000 manifestants pro-israéliens qui se sont rassemblés, en cette soirée de jeudi, devant la mairie d’Amsterdam. La maire de la ville, Femke Halsema, avait pourtant annulé l’événement qui était prévu initialement sur la place du Dam, au sein de la capitale : elle s’inquiétait, semble-t-il, de la sécurité, préoccupée à l’idée que cette dernière puisse être insuffisante.

C’est sur la place du Dam, dans le centre-ville, qu’avaient eu lieu les manifestations pro-palestiniennes et anti-israéliennes qui s’étaient tenues à une plus grande fréquence au cours des dernières semaines, dans le sillage des agressions violentes dont avaient été victimes les supporters du club du Maccabi Tel Aviv, le 7 novembre – même si elles avaient finalement attiré beaucoup moins de monde que le rassemblement pro-Israélien de ce soir.

« C’est ainsi que le ‘plus jamais ça’ devient ‘encore une fois’ – en ôtant graduellement des droits aux Juifs », déclare Rob Oudkerk, un ancien homme politique juif. « La maire Halsema, qui nous interdit l’accès à la place du Dam, incarne l’un de ces ‘encore une fois’. »

Plusieurs intervenants, au cours de la soirée, déplorent avec amertume ce qu’ils considèrent comme un manque de volonté de la part de la maire d’Amsterdam de protéger les Juifs au cœur de la ville.

Le « triangle de sécurité » au sein de la ville – il se compose de la première magistrate, du chef de la police locale et du procureur-général d’Amsterdam – avait interdit le rassemblement, estimant que la sécurité des manifestants pro-israéliens ne pouvait pas être garantie après les émeutes antisémites du début du mois de novembre.

Les autorités israéliennes avaient annoncé que dix personnes avaient été blessées lors des violences qui s’étaient produites en date du 7 novembre, des violences qui avaient été commises par des groupes arabes et musulmans à l’encontre de supporters locaux et étrangers du club de football du Maccabi Tel Aviv, qui venait de terminer un match l’opposant à l’Ajax d’Amsterdam. Des centaines d’Israéliens avaient dû se terrer dans leurs hôtels pendant des heures, craignant d’être à leur tour attaqués. Un grand nombre d’entre eux ont depuis fait savoir que les forces de sécurité néerlandaises étaient restées invisibles lorsque les touristes israéliens avaient été pris en embuscade par des bandes d’agresseurs masqués qui hurlaient des slogans pro-palestiniens et anti-israéliens en les chassant, en les frappant et en les harcelant.

Sous la direction du groupe Christians For Israel, une vingtaine d’organisations protestantes et juives avaient d’abord rejeté la décision prise par le « triangle de sécurité » d’interdire le rassemblement des pro-Israéliens sur la place du Dam.

Elles se sont ensuite accordées sur un lieu alternatif.

Une banderole indiquant « Stop aux chasseurs de Juifs » brandie lors d’une manifestation organisée conjointement par des organisations juives et chrétiennes à Amsterdam, le 28 novembre 2024. (Crédit : Bart Schut)

Ce soir, les manifestants affichent de manière festive leur solidarité avec Israël et avec les Juifs néerlandais aux abords de la « Stopera » (l’hôtel de ville d’Amsterdam fait également office d’opéra), à deux pas d’une grande statue de Baruch Spinoza, le philosophe juif néerlandais le plus influent.

De petits groupes de contre-manifestants – ils ne sont pas plus de quelques dizaines – sont tenus à l’écart de la foule, majoritairement chrétienne, qui a fait le déplacement dans la capitale, principalement à partir de petites localités et de villes moyennes situées dans la dite « ceinture biblique » des Pays-Bas. Des citoyens juifs d’Amsterdam et autres sympathisants sont aussi là.

« Mon sauveur [Jésus christ] était Juif, les apôtres étaient juifs, la bible est un livre juif. L’antisémitisme et l’antisionisme sont profondément anti-chrétiens », commente une pasteure protestante, Klaas-Jelle Kaptein, qui est originaire d’Urk, une petite localité insulaire de pêcheurs.

Des personnes participent à un rassemblement de protestation contre l’antisémitisme à Amsterdam, Pays-Bas, le 28 novembre 2024. (AP Photo/Peter Dejong)

Dans un discours, Yanki Jacobs, un rabbin issu du mouvement Habad, se demande si les Juifs néerlandais ont encore un avenir dans le pays au vu des événements récents. « Ma réponse est la suivante : s’il y a un avenir pour les Pays-Bas, il y a un avenir pour les Juifs aux Pays-Bas », s’exclame-t-il. « Si la société néerlandaise a suffisamment de force pour lutter contre la haine, ma réponse est un ‘oui’ retentissant. Mais nous avons besoin de gens qui parlent à voix haute », continue-t-il.

S’adressant directement à la foule, Jacobs note que « c’est ce que vous faites et je vous en suis reconnaissant ».

Dans la foule, de très nombreux drapeaux israéliens et des pancartes où il est écrit : « Plus jamais ça ». Il y a aussi une banderole qui dit : « Stop aux chasseurs de Juifs ! » – une référence faite à l’expression « chasse aux Juifs » qui avait été utilisée, sur les réseaux sociaux, par certains des auteurs des violences du 7 novembre.

Des activistes de la ville d’Urk, un village de pêcheurs, affichent leur soutien au Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu lors d’une manifestation organisée conjointement par des organisations juives et chrétiennes à Amsterdam, le 28 novembre 2024. (Crédit : Bart Schut)

Un groupe de manifestants venus d’Urk pour prendre part au rassemblement porte une banderole sur laquelle il est écrit : « Benjamin Netanyahu, bienvenue à Urk » – un pied de nez au ministre néerlandais des Affaires étrangères, Casper Veldkamp, qui avait récemment déclaré que les Pays-Bas se conformeraient au mandat qui a été récemment émis par la CPI à l’encontre du Premier ministre Benjamin Netanyahu, qui doit répondre de crimes de guerre. Il avait fait remarquer que le chef du gouvernement israélien serait dûment arrêté s’il devait s’aventurer sur le territoire néerlandais. Une position qui a apparemment changé depuis.

Veldkamp, ancien ambassadeur à Tel Aviv, avait ensuite été âprement critiqué pour avoir accueilli, vingt-quatre heures après sa déclaration, le ministre iranien des Affaires étrangères Abbas Araghchi, lui serrant la main.

Et la semaine dernière, un voyage prévu en Israël par Veldkamp a été annulé « d’un commun accord » avec le gouvernement israélien, selon le ministère néerlandais des Affaires étrangères à La Haye. Mais Jérusalem, de son côté, affirme que c’est le chef de la diplomatie israélienne, Gideon Saar, qui a unilatéralement annulé le déplacement qui était prévu, outré par les propos tenus par son homologue au sujet du mandat d’arrêt de la Cour.

Geert Wilders, qui est à la tête du plus grand parti de la coalition, le Parti pour la liberté d’extrême-droite, a depuis estimé que la rencontre entre Veldkamp et Araghchi était « hypocrite », alors que « Netanyahu est tabou ».

En ce jeudi soir, de nombreux drapeaux persans sont brandis par des opposants au régime islamiste de Téhéran qui expriment leur solidarité avec Israël.

Des manifestants persans contre le régime iranien affichent leur soutien à Israël lors d’une manifestation organisée conjointement par des organisations juives et chrétiennes à Amsterdam, le 28 novembre 2024. (Crédit : Bart Schut)

C’est Deborah Maarsen-Laufer, survivante de la Shoah, qui prononce le discours le plus émouvant de la soirée. Née au mois de février 1942, elle est la plus jeune survivante du camp de concentration nazi de Ravensbrück.

« Borrie » – c’est l’affectueux surnom qui lui a été donné par les membres de la communauté juive néerlandaise – fait référence aux trois minutes que les organisateurs lui ont accordées pour s’exprimer.

Deborah Maarsen-Laufer, survivante de la Shoah, après son discours lors d’une manifestation organisée conjointement par des organisations juives et chrétiennes à Amsterdam, le 28 novembre 2024. (Crédit : Bart Schut)

« Beaucoup de choses peuvent se produire en trois minutes. Trois minutes ont suffi aux nazis pour nous arracher à notre maison, mes parents, mes sœurs et moi, il y a 80 ans. Le 7 octobre, trois minutes ont suffi pour transformer en enfer un lieu où de jeunes gens dansaient. Et trois minutes ont également suffi à des jeunes en scooter pour chasser les Juifs dans notre Mokum« , dit-elle, utilisant le surnom yiddish traditionnel d’Amsterdam qui trouve ses racines dans le mot hébraïque « makom », qui signifie « lieu ».

« En cette période d’antisémitisme historique, avec une partie de la population qui adopte une attitude passive-agressive [à l’égard des Juifs] ou qui détourne le regard, c’est inestimable de voir un groupe qui refuse d’agir de la sorte et qui nous montre son affection sans réserve », commente pour sa part Lenny Kuhr, la chanteuse d’origine juive qui avait ramené aux Pays-Bas le prix du concours de l’Eurovision de 1969, auprès du Times of Israel.

Lenny Kuhr défend de plus en plus ouvertement Israël depuis qu’un théâtre de la ville de Leiden lui a interdit de se produire au mois de mars – il avait affirmé que « les gens comme elle soutiennent ouvertement le génocide ». L’artiste, dont les deux filles vivent en Israël avec leurs familles, chante pour la foule une partie de la chanson « Light », un titre qu’elle a récemment écrit.

Un groupe d’une quinzaine de contre-manifestants portant des keffiehs, la majorité le visage dissimulé sous un masque, scande le slogan « le sionisme à terre ! » alors qu’il se tient de l’autre côté du fleuve Amstel qui a donné son nom à la capitale néerlandaise. Les jeunes gens ont tenté de rejoindre le rassemblement en affirmant aux policiers qu’ils voulaient y prendre part « en tant qu’opposants véhéments à l’antisémitisme ».

Des contre-manifestants d’extrême gauche et musulmans tenus à l’écart de la manifestation pro-israélienne organisée conjointement par des organisations juives et chrétiennes à Amsterdam, le 28 novembre 2024. (Crédit : Bart Schut)

Les policiers – certains à cheval – encerclent et dispersent rapidement le groupe, comme ils l’ont fait avec d’autres protestataires anti-israéliens au début de la manifestation. Halsema avait interdit une contre-manifestation plus importante après que des jeunes d’extrême-gauche et des jeunes musulmans ont agressé des chrétiens pro-israéliens qui prenaient part à une commémoration du pogrom commis en Israël, le 7 octobre 2023.

Aucun groupe de jeunes musulmans n’est toutefois visible sur le site du rassemblement – et les éventuelles altercations entre les contre-manifestants d’extrême-gauche et les forces de l’ordre restent, pour la plupart, non-violentes. De son côté, la foule venue au rassemblement pro-israélien se comporte bien – et au moment du départ, ce sont des centaines de personnes qui viennent remercier les policiers avant de rejoindre les bus qui les attendent, en banlieue, pour les ramener chez eux.

Alors que deux hommes portant des drapeaux israéliens quittent la place devant le Stopera, l’un d’eux raconte au Times of Israel qu’il est un réfugié d’Alep, en Syrie. David, né Dawud, dit qu’il s’est converti au christianisme après son arrivée aux Pays-Bas, en 2014.

« Je suis ici pour soutenir le peuple juif, ils sont la nation de Dieu », explique David qui veut ajouter un message en direction des citoyens des États voisins d’Israël : « L’amour, pas la haine ! »

Deux activistes se tiennent devant l’hôtel de ville d’Amsterdam, lors d’une manifestation pro-israélienne organisée conjointement par des organisations juives et chrétiennes à Amsterdam, le 28 novembre 2024. À gauche, David, un réfugié syrien. (Crédit : Bart Schut)

En savoir plus sur :
S'inscrire ou se connecter
Veuillez utiliser le format suivant : example@domain.com
Se connecter avec
En vous inscrivant, vous acceptez les conditions d'utilisation
S'inscrire pour continuer
Se connecter avec
Se connecter pour continuer
S'inscrire ou se connecter
Se connecter avec
check your email
Consultez vos mails
Nous vous avons envoyé un email à gal@rgbmedia.org.
Il contient un lien qui vous permettra de vous connecter.
image
Inscrivez-vous gratuitement
et continuez votre lecture
L'inscription vous permet également de commenter les articles et nous aide à améliorer votre expérience. Cela ne prend que quelques secondes.
Déjà inscrit ? Entrez votre email pour vous connecter.
Veuillez utiliser le format suivant : example@domain.com
SE CONNECTER AVEC
En vous inscrivant, vous acceptez les conditions d'utilisation. Une fois inscrit, vous recevrez gratuitement notre Une du Jour.
Register to continue
SE CONNECTER AVEC
Log in to continue
Connectez-vous ou inscrivez-vous
SE CONNECTER AVEC
check your email
Consultez vos mails
Nous vous avons envoyé un e-mail à .
Il contient un lien qui vous permettra de vous connecter.