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Avec la fermeture de Jérusalem, les pèlerinages deviennent une réalité virtuelle

Pessah, Pâques et le Ramadan ce mois-ci auraient dû être une aubaine pour la ville ; une visite en réalité virtuelle de la Vieille Ville et des lieux saints est offerte aux fidèles

"La Ville Sainte" amène les visiteurs à l'intérieur de lieux de culte multiples et notamment dans la cathédrale Saint Jean, dans le quartier arménien de Jérusalem (Crédit : Nimrod Shanit/Blimey)
"La Ville Sainte" amène les visiteurs à l'intérieur de lieux de culte multiples et notamment dans la cathédrale Saint Jean, dans le quartier arménien de Jérusalem (Crédit : Nimrod Shanit/Blimey)

JTA — C’était la première fois depuis 1992, cette année, que Pessah, Pâques et le Ramadan tombaient pendant le même mois. Ce qui signifie que le tourisme, en ce mois d’avril, aurait dû connaître une effervescence jamais observée à Jérusalem depuis des décennies – voire depuis toujours.

Mais aller faire du tourisme à Jérusalem, à l’heure actuelle, est impossible. Et même si vous trouvez un vol, seuls les Israéliens et les résidents ont le droit d’entrer dans le pays – et ils doivent passer deux semaines en quarantaine dans un hôtel dès leur arrivée.

Dans ce contexte, un musée de Jérusalem a trouvé un remède possible : Une visite en réalité virtuelle des lieux saints de la célèbre Vieille Ville de la capitale.

C’est le musée de la Tour de David qui a mis en place une expérience d’immersion en réalité virtuelle intitulée « La Ville Sainte » qui sera gratuite jusqu’au 24 avril, la première journée du Ramadan (le lancement du projet gratuit a eu lieu le 9 avril, première journée pleine de Pessah).

En collaboration avec deux firmes de réalité virtuelle — Blimey en Israël et OccupiedVR au Canada — le musée, à travers une simulation à 360 degrés mise au point par son laboratoire d’innovation, permet aux usagers d’arpenter l’église du Saint-Sépulcre pendant la cérémonie du feu sacré qui marque Pâques, de prendre place parmi les fidèles au sein de la mosquée Al-Aqsa pendant les prières du Ramadan, et de se presser avec la foule au mur Occidental pendant la cérémonie traditionnelle de bénédiction de Pessah.

Une scène de « la ville sainte », expérience de réalité virtuelle en immersion qui emmène les visiteurs dans la Vieille Ville de Jérusalem (Crédit : Nimrod Shanit/Blimey)

Indépendamment du coronavirus, le projet offre la possibilité de vivre une expérience des lieux saints en simulation qui ne serait peut-être pas imaginable dans la vie réelle en raison de la religion, du sexe ou des capacités physiques de l’usager.

Une utilisatrice se souvient être venue en Israël en 2013.

« Nous avons vécu les plus belles fêtes religieuses de notre vie là-bas », se souvient Fatima Lemus Lipton. « Ce documentaire nous a permis de revivre ça. Quel bonheur de l’avoir vu ! »

Jenny Nathan, une autre usagère bloquée aux Etats-Unis pour cause de COVID-19, indique que cette visite en immersion a été une « bénédiction bienvenue pour mon dimanche de Pâques ».

Les premières visites en réalité virtuelle ont entraîné de fortes réactions, selon Caroline Shapiro, directrice des relations publiques internationales du musée de la Tour de David.

« Il y a des gens qui pleurent, il y a des gens qui ont des frissons », explique-t-elle.

« Tout simplement parce qu’ils se rendent dans ces endroits incroyables à une période qui est excessivement significative et qu’ils peuvent faire l’expérience de tous ces lieux offerts – ce qui est manifestement très, très particulier », continue-t-elle.

Un prêtre orthodoxe transfère le feu sacré depuis l’église du Saint-Sépulcre de Jérusalem vers des pays majoritairement orthodoxes, la cérémonie publique traditionnelle, dans ce haut-lieu du catholicisme, ayant été annulée dans un contexte de crise du coronavirus, le 18 avril 2020 (Crédit : Olivier Fitoussi/Flash90)

La Vieille Ville est un secteur fortifié d’un kilomètre-carré au sein de la ville moderne de Jérusalem. Touristes, vendeurs, pèlerins et étudiants en religion envahissent habituellement ses rues étroites et dallées.

Le quartier accueille de nombreux sites d’une importance religieuse déterminante, et notamment l’église du Saint-Sépulcre pour les Chrétiens, la mosquée Al-Aqsa et le dôme du Rocher pour les musulmans, ainsi que le mont du Temple et le mur Occidental pour les Juifs.

Avant la crise du COVID-19, le musée avait programmé de réserver son projet de réalité virtuelle exclusivement à ses visiteurs. Shapiro explique qu’aujourd’hui, ce sont des dizaines de milliers de personnes qui l’ont utilisé en ligne.

Pour vivre cette expérience, il faut être deux – une personne porte les lunettes de réalité virtuelle et l’autre a une tablette. Tout commence par un voyage de deux minutes dans l’histoire de Jérusalem, à partir d’une salle dans laquelle l’usager peut déambuler autour d’un modèle miniature de la Vieille Ville et l’explorer de près.

Des gens prient devant les portes fermées du complexe de la mosquée Al-Aqsa dans un contexte de suspension des prières pour prévenir la propagation du coronavirus à Jérusalem, le 23 mars 2020 (Crédit : AP Photo/Mahmoud Illean)

Au musée, la simulation comprend également un jeu d’enquête et d’aventure. Des équipes travaillent ensemble pour résoudre des énigmes et trouver des indices qui les mènent d’un site à l’autre.

La version en ligne est compatible avec des casques de réalité virtuelle ou des écrans d’ordinateurs. Elle préserve l’expérience d’immersion à 360 degrés mais elle n’inclut pas les composantes de jeu interactif.

« Cela aurait dû être une énorme année de pèlerinage », indique Shapiro. « Nous espérons que nous serons capables d’apporter un petit peu de Jérusalem à des gens différents, dans le monde entier, et qui n’ont pas pu venir ici ».

Une femme utilise des lunettes pour une visite en réalité virtuelle permettant aux touristes de découvrir ce à quoi Jérusalem ressemblait il y a 2000 ans à partir des recherches des archéologues, le 3 septembre 2018 (Crédit : musée de la Tour de David/Tomer Zmora via AP)

Les espaces 3-D ont été créés en rassemblant des centaines de milliers de photos réalisées à l’aide d’appareils haute-résolution.

« Marcher dans Jérusalem avec un appareil qui ressemble à une bombe et qui ressemble assez peu à un appareil-photo ordinaire n’a pas été chose facile », commente Nimrod Shanit, directeur et producteur de « La Ville Sainte ».

« Une fois que nous avons franchi ce premier obstacle, il a fallu relever le défi de filmer les portes de la ville et les lieux saints sans qu’il y ait personne. L’équipe se levait à trois heures du matin et attendait la première lueur du jour, elle attendait que ceux qui travaillent la nuit rentrent chez eux de manière à pouvoir prendre des photos aussi vite que possible », précise-t-il.

La Tour de David n’est que l’un des nombreux musées qui se sont donnés pour objectif de s’adapter à la crise du COVID-19 en offrant des contenus en ligne. Moultes institutions – des musées du Vatican au Metropolitan Museum of Art à New-York, en passant par le Louvre et d’autres encore – ont tous temporairement fermé leurs portes.

Utilisant le hashtag #MuseumFromHome, les institutions culturelles du monde entier ont partagé des posts sur Instagram sur les différents moyens de vivre les collections offertes et à découvrir depuis un canapé confortable. Par exemple, Google a établi un partenariat avec plus de 500 musées et galeries pour permettre aux utilisateurs de parcourir les collections et expositions, en utilisant le logiciel de la firme Street View – en intérieur – pour déambuler dans les salles.

Des hommes juifs prient au mur Occidental presque désert dans la Vieille Ville de Jérusalem, le 7 avril 2020. (Nati Shohat/Flash90)

Israël est maintenu actuellement dans un confinement partiel en raison du coronavirus. Le gouvernement a interdit les prières en groupe – à l’exception du mur Occidental où un rassemblement de 10 hommes – ou minyan – a l’autorisation de prier trois fois par jour. Cette année, la bénédiction traditionnelle de Pessah n’a réuni que seulement dix fidèles, en présence notamment de l’ambassadeur américain en Israël David Friedman.

« L’année dernière, j’étais là au milieu de 100 000 personnes ; et cette année, malheureusement, de bien moins. Je vais prier pour que le monde soit épargné par la maladie ou les chagrins dus au COVID-19 et autres », avait écrit l’envoyé Friedman sur Twitter.

Un prêtre orthodoxe transfère le feu sacré depuis l’église du Saint-Sépulcre de Jérusalem vers des pays majoritairement orthodoxes, la cérémonie publique traditionnelle, dans ce haut-lieu du catholicisme, ayant été annulée dans un contexte de crise du coronavirus, le 18 avril 2020 (Crédit : Olivier Fitoussi/Flash90)

Samedi, à la veille de la fête de Pâques des chrétiens orthodoxes, la cérémonie du feu sacré n’a réuni que dix religieux orthodoxes orientaux éminents. A l’ordinaire, la flamme sacrée est partagée, bougie après bougie, par des milliers de fidèles avant d’être envoyée aux communautés chrétiennes orthodoxes du monde entier grâce à des vols affrétés pour l’occasion.

Pour Shapiro, le rôle tenu par les expériences de réalité virtuelle comme « la Ville Sainte » pourrait bien être plus important aujourd’hui que jamais.

« On n’est pas spectateur. On est acteur », dit-elle. « Et je pense que particulièrement en ce moment, alors qu’on nous dit de rester séparés les uns les autres, de rester éloignés les uns des autres, la réalité virtuelle aura un impact très positif ».

« Cela permet d’avoir le sentiment qu’on est parmi les autres », s’exclame-t-elle.

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