Avec l’arrêt de l’entrée des étrangers, le tourisme en Israël prend un autre coup
Le ministre du Tourisme réclame une indemnisation pour les employés de l'industrie alors que l'interdiction de l'entrée des étrangers en Israël est entrée en vigueur
Ricky Ben-David est journaliste au Times of Israël
Le secteur du tourisme d’ores et déjà en difficulté a pris un autre coup dimanche à minuit, lorsque les nouvelles restrictions interdisant l’entrée sur le sol israélien des étrangers sont entrées en vigueur pour une période de deux semaines, avec pour objectif d’empêcher la propagation dans le pays du variant Omicron.
Yoel Razvozov, le ministre du Tourisme, a expliqué dimanche que le gouvernement allait mettre au point un « schéma d’indemnisation » pour les Israéliens qui travaillent dans le secteur de l’industrie du tourisme d’ici une semaine, vingt-quatre heures après l’approbation par les ministres des nouvelles limitations.
Razvozov a annoncé avoir demandé au gouvernement d’approuver une décision portant sur un « schéma d’indemnisation, d’ici une semaine, pour les professionnels de l’industrie, y compris pour les guides touristiques, pour les tour-opérateurs et pour les hôtels qui travaillent avec les touristes ». Le ministre a déclaré que sa proposition avait été approuvée par la majorité des membres du gouvernement et que lui-même établirait le plan en partenariat avec le ministère des Finances.
Razvozov a aussi noté que ce schéma d’indemnisation pourrait englober des fonds en direction des Israéliens qui se sont trouvés dans l’obligation d’annuler leur vol ou de renoncer à leur voyage organisé.
Dimanche, le responsable de la branche israélienne de l’entreprise de services de voyage Amadeus, Avishay Cohen, a indiqué au site d’information Ynet que moins de 10 % des déplacements touristiques à l’étranger des Israéliens avaient été annulés depuis que les responsables sud-africains ont tiré la sonnette d’alarme suite à l’apparition de cette nouvelle souche de coronavirus, à la fin de la semaine dernière. Il a néanmoins noté que les nouvelles réservations de voyage avaient baissé d’environ 50 %.
Les nouvelles restrictions sur les voyages interdisent l’entrée des ressortissants étrangers pendant une durée de 14 jours, sauf dérogation accordée par un panel gouvernemental.
Les ministres ont aussi prolongé la période de quatorzaine obligatoire pour les citoyens israéliens vaccinés revenant de l’étranger et l’agence de sécurité intérieure du Shin Bet a obtenu le feu vert concernant la reprise de son programme de suivi des contacts des personnes contaminées par le nouveau variant.
Cette initiative a porté un nouveau coup aux industries du tourisme et de l’aviation israéliennes, qui avaient été largement dévastées par la pandémie et par les restrictions imposées dans ce contexte – et qui n’ont guère eu le temps de se remettre. La vaste majorité des touristes a été interdite d’entrée sur le sol israélien depuis la période qui avait tout juste précédé la mise en vigueur du premier confinement dans le pays, au mois de mars 2020.
Israël n’a rouvert son espace aérien au tourisme qu’au début du mois de novembre, autorisant l’entrée aux personnes vaccinées ou en rémission de la maladie.
Cette décision est « très grave, parce que nous n’avons que récemment rouvert l’espace aérien et que l’industrie a besoin de stabilité », a commenté Razvozov dans la journée de dimanche.
Mais Razvozov a aussi déclaré que la décision était justifiée dans la mesure où même les Israéliens vaccinés revenant de l’étranger devaient se placer à l’isolement dans le cadre des nouvelles dispositions.
Les autorités médicales ont indiqué avoir besoin d’environ deux semaines pour mieux appréhender la menace posée par le variant Omicron.
Selon les nouvelles limitations, les Israéliens vaccinés – qui, selon les règles précédemment mises en place, devaient se soumettre à un test de dépistage à la COVID-19 à l’atterrissage et qui devaient se placer en quarantaine jusqu’à réception d’un test négatif – doivent dorénavant se mettre à l’isolement pendant 72 heures et effectuer un test de dépistage au troisième jour de leur arrivée. Les voyageurs non-vaccinés doivent, pour leur part, rester au moins une semaine en quarantaine et ils ne sont autorisés à quitter l’isolement qu’après avoir fait un test de dépistage le septième jour – si le résultat du test est négatif. Les Israéliens en provenance des pays « rouges » à haut-risque doivent se mettre en quarantaine dans un hôtel mis en place par l’État à cet effet jusqu’à réception d’un résultat négatif de test.
« Si nous imposons la quarantaine aux Israéliens alors nous devons imposer aussi cette dernière aux touristes – et aucun touriste ne veut venir ici pour se placer à l’isolement », a expliqué le ministre.
Razvozov a également indiqué que le prochain concours de Miss Univers, qui doit avoir lieu le mois prochain à Eilat, se déroulerait comme prévu. Il a fait savoir que les participantes obtiendraient une dérogation et qu’il faudrait peut-être qu’elles se soumettent à un test PCR tous les deux jours.
« C’est un événement qui sera diffusé dans 174 pays – un événement très important », a noté Razvozoz.
« C’est une urgence »
Dans un courrier adressé dimanche aux ministères du Tourisme et des Finances, le président de l’Association des hôtels israéliens, Avi Nissenkorn, a écrit que « tant que les barrières, à l’entrée du pays, ne seront pas enlevées, les hôtels qui accueillent les touristes étrangers ne pourront jamais se rétablir ».
Nissenkorn, qui avait occupé le poste de ministre de la Justice dans le précédent gouvernement, a expliqué que le secteur « a besoin d’aide pour survivre à cette période critique, et ce, jusqu’au retour des touristes. Pour nous, c’est une urgence… Pour que tous ces hôtels qui travaillent avec les touristes ne soient pas mortellement touchés, un plan réactualisé doit être établi et des aides doivent être fournies sans délai supplémentaire au secteur. »
Avant la pandémie, l’industrie du tourisme employait environ 140 000 personnes (les chiffres diffusés par le ministère du Tourisme à la fin de l’année 2019) et elle contribuait à plus de 2 % au PIB national.
Le nombre de touristes avait baissé de 80 % en 2020, un plongeon par rapport au nombre record qui avait été enregistré en 2019, où 4,55 millions de visiteurs étaient venus dans le pays, rapportant 7,2 milliards de dollars à l’économie.
Au beau milieu de la pandémie, le gouvernement avait annoncé le déblocage d’une enveloppe d’aide d’environ 300 millions de shekels au mois de juin 2020 pour soutenir le secteur du tourisme en crise – même si la somme ayant été réellement débloquée dans les faits reste indéterminée.
De plus, le ministère des Finances a annoncé, la semaine dernière, un plan de sauvetage supplémentaire pour les transporteurs aériens touchés par la pandémie, approuvant un plan qui n’excèdera pas les 44 millions de dollars et qui se présentera sous la forme d’un cautionnement sur trois ans.
Cette initiative survient à la suite d’une autre enveloppe approuvée au mois de mars pour aider la compagnie aérienne nationale El Al, qui prévoit d’acheter de manière anticipée des billets pour les forces de sécurité à hauteur de 210 millions de dollars.
El Al avait enregistré des pertes avoisinant le demi-milliard de dollars en 2020, quand ses vols commerciaux étaient restés à terre pendant la plus grande partie de l’année en raison de la pandémie. La plus grande partie du personnel avait été mise en congé dès le début de l’épidémie et 2 000 postes ont depuis été supprimés. El Al a été rachetée par Kanfei Nesharim, une firme contrôlée par Eli Rozenberg, au mois de septembre dernier.
Les marchés terrifiés
Les marchés du monde entier ont réagi avec force, vendredi, à la découverte du nouveau variant Omicron et à sa propagation sur tout le globe alors même que l’Union européenne et le Royaume-Uni annonçaient des restrictions sur les voyages depuis l’Afrique australe.
Après la fermeture des marchés, les États-Unis ont également mis en place des limitations sur les déplacements en provenance d’Afrique du sud et de sept autres nations africaines. Israël, pour sa part, a fait savoir dès le lendemain que tous les ressortissants non-Israéliens seraient interdits d’entrée sur le territoire dès dimanche minuit.
Les marchés se sont effondrés vendredi, avec l’indice Dow Jones qui a plongé brièvement de plus de mille points. De son côté, l’indice S&P 500 a perdu 106,84 points ou 2,3 %, à 4,594.62. Cela a été la pire journée pour l’indice de référence de Wall Street depuis le mois de février.
L’indice a été baissé, entre autres, par les banques, les agences de voyage et les compagnies énergétiques alors que les investisseurs tentaient de se repositionner pour se protéger financièrement du nouveau variant.
En Israël, dimanche à la bourse de Tel Aviv, l’indice Tel Aviv 35 – qui rassemble les 35 premières sociétés cotées en bourse – avait baissé, en fin de journée, de 1,5 %. L’indice Tel Aviv 90 – qui regroupe les 90 actions présentant la plus forte valeur de marché à la bourse de Tel Aviv – a baissé d’1,9 %, selon le quotidien financier Globes.
Des chiffres qui restent néanmoins modérés en comparaison avec le mois de mars 2020, quand – juste avant que le gouvernement n’impose un confinement national – l’indice Tel Aviv 35 avait plongé de 8 % et l’indice Tel Aviv 125 avait essuyé une baisse de plus de 7 %.
Parmi les firmes israéliennes les plus touchées dimanche, la chaîne hôtelière Fattal dont les actions ont perdu plus de 8 % de leur valeur.
Dans le monde entier, les investisseurs ont transféré leurs fonds dans des compagnies qui avaient largement profité des vagues précédentes, comme Zoom Communications pour les réunions ou Peloton, pour les équipements d’exercice à domicile. Les actions dans ces deux entreprises ont augmenté de presque 6 %.
Les actions des transporteurs aériens ont été rapidement bradées. United Airlines a baissé de 9,6 % et American Airlines de 8,8 %
Les fabricants de vaccin contre le coronavirus figurent parmi les principaux bénéficiaires de l’émergence de ce nouveau variant et des réactions conséquentes des investisseurs. Les actions de Pfizer ont augmenté de plus de 6 % et celles de Moderna de plus de 20 %.
Shoshanna Solomon a contribué à cet article.