Israël en guerre - Jour 434

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Avec l’usage abusif de l’étoile jaune, le devoir de mémoire devient plus urgent

La haine et la prolifération des comparaisons entre consignes sanitaires et persécution des Juifs par les nazis montrent qu'il est nécessaire de mieux faire connaître la Shoah

Illustration : Un manifestant tient une étoile jaune sur laquelle on peut lire "Pas de vaccin = Juif" alors que des manifestants prennent part à une manifestation à Milan, le 24 juillet 2021, contre l'introduction d'un "laissez-passer vert" obligatoire pour les restaurants intérieurs et les lieux de divertissement, dans le but de limiter la propagation du coronavirus. (Crédit : MIGUEL MEDINA / AFP)
Illustration : Un manifestant tient une étoile jaune sur laquelle on peut lire "Pas de vaccin = Juif" alors que des manifestants prennent part à une manifestation à Milan, le 24 juillet 2021, contre l'introduction d'un "laissez-passer vert" obligatoire pour les restaurants intérieurs et les lieux de divertissement, dans le but de limiter la propagation du coronavirus. (Crédit : MIGUEL MEDINA / AFP)

JTA – Cela fait 77 ans que les collabos ont transféré György Bánhidi et sa famille de leur grande maison de Budapest vers le ghetto juif de la ville.

Mais György Bánhidi, aujourd’hui âgé de 84 ans, se souvient des moindres détails de ce court voyage vers un endroit où il a enduré des mois de faim, et du traumatisme de voir sa mère abandonner l’espoir de survivre un jour.

Il se souvient surtout du sentiment d’être raillé et moqué par les soldats hongrois qui campaient juste à l’extérieur du ghetto et qui applaudissaient leurs camarades collaborateurs occupés à rassembler les familles juives dans l’enceinte urbaine.

Aujourd’hui encore, Bánhidi revoit « l’horrible sentiment de voir nos propres compatriotes se moquer de nous, nous cracher dessus, nous jeter des objets », chaque fois qu’il passe près de ce quartier de la capitale hongroise, où il vit encore aujourd’hui.

Son témoignage et celui de 76 autres personnes sont présentés sur un nouveau site web. Créé par l’association EMIH des communautés juives hongroises, le site commémore l’anniversaire de la rafle des Juifs de Budapest par la milice pro-Hitler des Croix fléchées et la police locale.

Le site web fait partie des multiples initiatives lancées par des groupes juifs, des gouvernements nationaux et des organisations internationales pour commémorer le 27 janvier, date anniversaire de la libération du camp de la mort nazi d’Auschwitz.

György Bánhidi, survivant de la Shoah, apparaît dans une vidéo sur un nouveau site Web qui raconte son calvaire dans le ghetto de Budapest en Hongrie en 1944. (Crédit : EMIH via JTA)

Suite à une proposition de résolution, les Nations unies ont désigné le 27 janvier comme Journée internationale de commémoration de la Shoah en 2005 et, ces dernières années, cette journée a pris une plus grande importance publique.

Contrairement à Yom HaShoah, la commémoration qui a lieu habituellement en avril en Israël, la Journée internationale de commémoration de la Shoah attire l’attention des non-juifs, ce qui en fait un moment opportun pour les survivants et les groupes juifs pour délivrer des messages à un large public.

MTV et CBS lancent de nouvelles émissions spéciales en mémoire de la Shoah, avec l’actrice juive Julianna Margulies comme présentatrice. L’American Jewish Committee (AJC) a formé des personnes qui travaillent dans d’anciens camps de concentration à l’utilisation de TikTok, le réseau social gangréné par la négation de la Shoah et l’antisémitisme, afin de soutenir la mémoire et la sensibilisation à la Shoah.

The Conference on Jewish Material Claims Against Germany a annoncé une nouvelle campagne en partenariat avec le mémorial de Yad Vashem, avec des vidéos de deux minutes sur les Justes parmi les nations non-Juifs qui ont risqué leur vie pour sauver des Juifs pendant la Shoah.

Des événements commémoratifs de la Shoah sont organisés pour la première fois en Égypte et en Azerbaïdjan. Aux États-Unis et ailleurs, des survivants de la Shoah et leurs enfants s’adressent à des groupes d’étudiants. Et des commémorations spéciales sont prévues dans toute l’Europe, où six millions de Juifs ont été assassinés.

Le Mémorial et Musée d’Auschwitz-Birkenau, une institution publique polonaise, prévoit une petite cérémonie de commémoration sur le site de l’ancien camp de la mort nazi, près de Cracovie. En raison des restrictions imposées par la COVID-19, seule une poignée de survivants assistera à la cérémonie qui sera diffusée en direct sur un site Internet dédié, a déclaré le porte-parole du musée.

Selon les observateurs, la pandémie de COVID-19 et la prolifération des comparaisons entre les restrictions en matière de santé publique et la persécution des Juifs par les nazis soulignent la nécessité de mieux faire connaître la Shoah.

Une étoile jaune portée par un militant anti-vaccins lors d’un rassemblement à Paris, le 17 juillet 2021. (Crédit : AP Photo/Michel Euler, File)

Depuis 2020, au moins 60 millions d’actions en ligne incluant des posts banalisant la Shoah, souvent dans le contexte de la pandémie, ont été enregistrés selon un rapport publié la semaine dernière par le Combat Antisemitism Movement – une ONG internationale dont le conseil consultatif comprend l’ancien président de l’Agence juive Natan Sharansky et l’ancien sénateur américain Joseph Lieberman.

Lors de multiples rassemblements en Europe et ailleurs contre les mesures COVID-19, les manifestants ont porté des uniformes ressemblant à ceux portés par les détenus d’Auschwitz et d’autres symboles de ce camp.

En Israël, où Yom HaShoah est un jour de deuil national, la délégation de l’Union européenne (UE) en Israël et Yad Vashem ont observé la commémoration internationale lors de la projection, la semaine dernière, d’un documentaire sur l’exploitation sexuelle des détenus d’Auschwitz.

Intitulé « Love It Was Not », le film se concentre sur Helena Citron, une survivante de la Shoah originaire de Slovaquie, décédée en 2007, et sur la façon dont elle a survécu à Auschwitz en partie grâce à sa relation intime avec un officier SS allemand.

« Alors que les derniers survivants de la Shoah nous quittent, nous devons trouver de nouveaux moyens de nous souvenir », a déclaré l’ambassadeur de l’UE en Israël, Dimiter Tzantchev, lors de la projection à Jérusalem, à laquelle assistait également une nièce d’Helena Citron, Miki Marin. Ces films « peuvent jouer un rôle important dans cette entreprise », a ajouté M. Tzantchev.

Des visiteurs traversent les barrières de barbelés du camp de la mort nazi allemand d’Auschwitz, le 5 décembre 2019. (Crédit : JANEK SKARZYNSKI / AFP)

L’Olga Lengyel Institute, connu sous le nom de TOLI, basé à Manhattan, doit organiser un séminaire en ligne le 26 janvier, avec la coopération du Ghetto Fighters’ House Museum près d’Akko, en Israël. Le panel discutera du projet Lonka, une initiative dans laquelle 300 photographes de renom ont braqué leur objectif sur le nombre décroissant de survivants de la Shoah encore en vie aujourd’hui.

Le Congrès juif européen a organisé une cérémonie de commémoration en ligne, avec un discours du président français Emmanuel Macron. La Journée internationale de commémoration de la Shoah a pour but de lutter contre la répétition des erreurs du passé, a-t-il déclaré.

Ce combat, a déclaré M. Macron, « est malheureusement redevenu une réalité, car les vents mauvais se sont levés, les discours politiques se sont installés, les falsifications de l’Histoire sont de retour, et certains actes nous rappellent quotidiennement que nous n’avons pas terminé ce combat. Nous ne céderons aucun terrain ».

L’Association juive européenne (AJE), basée à Bruxelles, a organisé un événement commémoratif avec des dizaines de législateurs de toute l’Union européenne à Kiev, la capitale de l’Ukraine, qui est actuellement confrontée à la menace d’une invasion russe.

La vice-Première ministre ukrainienne, Olha Stefanishyna, a fait allusion aux tensions avec la Russie lors de l’événement, rappelant lundi à ses auditeurs que la Shoah faisait finalement partie des tragédies « inspirées par un tyran ».

« Il n’est pas seulement important de se souvenir, mais de s’assurer qu’aucune autre tragédie à laquelle est confronté le monde démocratique et libre ne devrait » se produire, a-t-elle déclaré. Elle a ajouté : « Faites en sorte que vos gouvernements évitent ces tragédies où des personnes qui meurent et souffrent. »

Dans son témoignage pour le projet Hongrie, György Bánhidi a également rappelé comment son père s’accrochait à la foi religieuse, que la famille survivrait alors que sa mère sombrait dans le désespoir, disant à plusieurs reprises à son fils et à ses frère et sœur que « nous allons tous mourir. »

Un homme visite le nouveau musée de la Shoah « House of Fates », installé dans ce qui était l’ancienne gare ferroviaire « Jozsefvarosi » à Budapest, le 21 janvier 2019. (Crédit : Ferenc Isza/AFP)

Son père, quant à lui, « du matin au soir (…) ne cessait de dire ‘Dieu va nous aider, Dieu va nous aider' », se souvient Bánhidi, dont la famille nucléaire fait partie des rares familles juives à être sorties vivantes de la Shoah.

Sur les quelque 800 000 Juifs qui vivaient en Hongrie avant la Shoah, quelque 565 000 ont été assassinés en peu de temps, dont 424 000 Juifs hongrois qui ont été tués en huit semaines en 1944 dans le complexe d’Auschwitz-Birkenau.

« Il s’est avéré qu’il avait raison, car Dieu nous a aidés ». Croire en la survie, a-t-il ajouté, « c’est la seule chose. Il faut rester positif, ne jamais abandonner la conviction que tout cela aura une fin et qu’un autre temps viendra où nous pourrons vivre plus paisiblement. »

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