Cour suprême : l’État ne peut pas évacuer le village bédouin avant le 16 juillet
Les juges ont accepté la deuxième plainte en moins d'une semaine des avocats représentant Khan al-Ahmar ; mais une grève des travailleurs menace de retarder davantage l'expulsion
Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.
La Cour suprême de justice a émis une injonction temporaire lundi soir, empêchant l’État de mettre en œuvre son projet d’évacuation d’un village bédouin de Cisjordanie, quelques jours après avoir bloqué le projet controversé.
Cette décision fait suite à une plainte en référé d’un groupe d’avocats palestiniens représentant la communauté de Khan al-Ahmar près de la grande implantation de Maale Adumim en Cisjordanie.
La plainte fait valoir qu’aucun ordre d’expulsion n’a jamais été notifié aux habitants, comme cela est exigé avant qu’un village soit évacué. Au lieu de cela, les avocats palestiniens affirment que seuls des ordres de démolition ont été présentés.
La Cour suprême a accepté de donner suite à la plainte et a ordonné à l’État de fournir des explications avant le 16 juillet, ce qui signifie que l’évacuation n’aura pas lieu avant cette date.
Offrant également un répit au village, l’organisme du ministère de la Défense chargé de superviser la démolition a annoncé qu’il se mettait en grève à partir de mardi prochain, en raison de ce qu’ils disent être l’échec du ministère des Finances à mettre en œuvre les améliorations concernant leurs régimes de retraite promises il y a près de trois ans.
Dans sa lettre annonçant la grève à durée indéterminée, le comité de l’administration civile a déclaré que parmi les projets qui ne seront pas réalisés avant leur reprise du travail, figure l’évacuation de Khan al-Ahmar.
L’injonction temporaire de lundi fait suite à une injonction similaire émise par la Cour suprême jeudi dernier, après une autre plainte en référé des avocats représentant le village bédouin.
Ils ont ensuite affirmé que l’administration civile a refusé d’examiner une proposition soumise par les villageois pour légaliser le village avant d’ordonner sa démolition.
La Cour suprême a donné à l’État jusqu’à mercredi pour réagir.
Si la plus haute instance juridique – suite à la réponse de l’État – choisit de rejeter la plainte de la défense et que la grève de l’administration civile est terminée, le gouvernement pourra poursuivre son projet de démolition du village.
Toutefois, en raison de la nouvelle plainte de lundi, il ne sera pas possible d’expulser les résidents de la région avant au moins le 16 juillet, date à laquelle l’État aura répondu et la Cour suprême rendra sa décision finale.
Pour les habitants, cela signifie qu’ils pourront commencer la nouvelle année scolaire dans le village le 15 juillet, comme prévu à l’origine. Le hameau a attiré l’attention internationale pour ses bâtiments scolaires construits avec des pneus, de la boue et de l’huile de cuisson usagée en raison des restrictions israéliennes en matière de construction.
Après des années de batailles juridiques, la Cour suprême avait approuvé la démolition en mai. L’État affirme que les structures ont été construites sans permis de construire et représentent une menace pour les résidents en raison de leur proximité avec une autoroute.
Mais les militants affirment que les villageois – qui vivent sur le site depuis les années 1950, après que l’État les a expulsés de leurs maisons du Néguev – n’avaient guère d’autre choix que de construire sans permis de construire israélien, car ceux-ci ne sont presque jamais délivrés aux Palestiniens pour construire dans certaines parties de la Cisjordanie, comme Khan al-Ahmar, où Israël a le contrôle total des affaires civiles.
Israël s’est engagé à réinstaller les résidents, dont le nombre, selon l’ONU, est de 180 personnes.
Israël dit avoir offert aux occupants un autre emplacement, près d’une décharge appartenant à la ville palestinienne d’Abu Dis. Les villageois bédouins disent que l’endroit n’est pas adapté à leur mode de vie et ont affirmé que les habitants d’Abu Dis les ont avertis de ne pas y aller.
Les opposants à la démolition affirment qu’elle s’inscrit dans le cadre d’un effort visant à permettre l’expansion de l’implantation voisine de Kfar Adumim et à créer une région de contrôle israélien continu de Jérusalem à la mer Morte.
La semaine dernière, Tsahal a émis des ordres autorisant le contrôle des routes d’accès au village.
Depuis, des engins de chantier y ont été vus et, jeudi, on a pu voir des bulldozers élargir la route d’accès au village, laissant supposer que la route était en cours d’aménagement pour faciliter l’évacuation et la démolition.
La veille, des affrontements ont éclaté entre la police et les manifestants au village. Les résidents et les militants ont tenté d’empêcher la progression des véhicules de chantier, ce qui a donné lieu à des bagarres violentes.
La police a déclaré dans un communiqué que onze personnes ont été arrêtées lors de troubles sur le site et que des pierres ont été lancées sur les policiers. L’ONG israélienne de défense des droits de l’homme B’Tselem a déclaré que parmi les personnes détenues figurait le responsable des enquêtes sur le terrain de son organisation.
Deux des manifestants ont été libérés peu de temps après.
Dimanche, un juge du tribunal militaire d’Ofer a ordonné la libération conditionnelle de huit autres Palestiniens.
Le juge a prolongé la détention provisoire du dernier suspect jusqu’à jeudi, après que le procureur militaire a déclaré qu’il avait l’intention de l’accuser pour avoir lancé des pierres.