Une délégation de religieux druzes syriens se rend en Israël
Une première depuis 1948 : 60 religieux rencontreront le chef de leur communauté, avant de se rendre sur la tombe de Nabi Shuaib ; certains Druzes syriens s'opposent à ce pèlerinage

Des dizaines de religieux druzes syriens se sont dirigés, à bord de deux bus, vendredi matin vers Israël pour y effectuer un pèlerinage religieux, une première depuis la création de l’État d’Israël en 1948, selon un correspondant de l’AFP dans le sud de la Syrie.
Une délégation d’une soixantaine de religieux druzes se sont regroupés à la lisière du village de Hader, situé dans la zone tampon démilitarisée entre la Syrie et Israël sur le plateau du Golan, sous les yeux des soldats israéliens qui se sont récemment déployés dans ce secteur, a précisé le correspondant.
Selon une source proche du groupe, la délégation devait rencontrer le chef spirituel de la communauté druze d’Israël, le cheikh Muafak Tarif, dans le nord du pays.
Ils devaient ensuite se rendre sur la tombe de Nabi Shuaib, non loin de Tibériade, en Galilée, le site religieux le plus important des Druzes.
Les adeptes de cette religion monothéiste ésotérique sont principalement répartis entre la Syrie, le Liban et Israël.
Une source proche de la délégation a déclaré que la visite faisait suite à une invitation de la communauté druze d’Israël, mais qu’elle s’était heurtée à une « forte opposition » de la part d’autres Druzes en Syrie.

Les Druzes représentent environ 3 % de la population syrienne et sont fortement concentrés dans la province méridionale de Soueïda.
En Israël, on compte environ 150 000 Druzes, dont la plupart vivent en Israël, ont la nationalité israélienne et servent dans l’armée.
Cependant, sur les quelque 23 000 Druzes vivant sur le plateau du Golan, la plupart n’ont pas la nationalité israélienne et se considèrent toujours comme des ressortissants syriens.
Le Dr. Amir Khnifess, président du Mouvement druze et circassien pour la démocratie et l’égalité, a salué cette visite comme un « moment historique et significatif » pour les Druzes, dans une déclaration citée par le site du quotidien Israel Hayom.
Cette visite a marqué « le début d’un nouveau chapitre dans l’histoire du pays avec son voisin », a-t-il déclaré.
« Alliance audacieuse »
Israël avait repris à la Syrie une grande partie du plateau stratégique du Golan lors de la Guerre des Six Jours en 1967, puis l’avait annexé en 1981, une décision reconnue par les États-Unis mais pas par la plupart des pays du monde.
Ce pèlerinage intervient alors qu’Israël a exprimé son soutien aux Druzes de Syrie et sa méfiance envers les nouveaux dirigeants islamistes du pays.

Après l’éviction du dictateur syrien de longue date Bashar el-Assad en décembre, Israël a mené des centaines de frappes aériennes sur la Syrie et envoyé des troupes dans la zone tampon démilitarisée du Golan, dans le sud-ouest de la Syrie.
Le porte-parole du gouvernement, David Mencer, a déclaré jeudi que 10 000 colis d’aide humanitaire avaient été envoyés à « la communauté druze dans les zones de combat en Syrie » au cours des dernières semaines.
« Israël a une alliance audacieuse avec nos frères et sœurs druzes », a-t-il déclaré aux journalistes.
Lors d’une visite mardi dans des avant-postes militaires situés dans la zone tampon entre Israël et la Syrie, sous contrôle de l’ONU, le ministre de la Défense, Israel Katz, a déclaré qu’Israël resterait dans la région et assurerait la protection des Druzes.
Début mars, à la suite d’affrontements meurtriers entre les forces gouvernementales islamistes et les combattants druzes dans la banlieue de Damas, Katz a déclaré que son pays ne permettrait pas aux nouveaux dirigeants syriens « de nuire aux Druzes ».
Ces propos ont été immédiatement rejetés par les dignitaires druzes, qui ont réaffirmé leur attachement à l’unité de la Syrie.
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a déclaré que le sud de la Syrie devait être complètement démilitarisé, avertissant que son gouvernement n’accepterait pas la présence des forces du nouveau gouvernement dirigé par les islamistes près de son territoire.
Les Druzes sont restés en retrait de la guerre civile en Syrie et se sont principalement attachés à protéger leurs territoires.
Leurs représentants sont en négociation avec le pouvoir central à Damas pour parvenir à un accord qui inclurait l’intégration de leurs groupes armés dans la future armée nationale.