Israël en guerre - Jour 374

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En Israël, les règles de Shabbat à l’épreuve de la guerre

Les exceptions aux dérogations du pikuach nefesh se multiplient avec la guerre contre la Hamas qui dure depuis plus de 8 mois

Une table de Shabbat dressée pour les otages détenus par le Hamas est exposée sur la "Place des otages", à Tel Aviv, le 15 décembre 2023. (Crédit : Noam Amir)
Une table de Shabbat dressée pour les otages détenus par le Hamas est exposée sur la "Place des otages", à Tel Aviv, le 15 décembre 2023. (Crédit : Noam Amir)

En Israël, Shabbat met traditionnellement le pays au ralenti mais depuis l’assaut barbare et sadique du groupe terroriste palestinien du Hamas sur le sud d’Israël le 7 octobre et avec la guerre en cours à Gaza, certaines règles associées au repos hebdomadaire juif sont bouleversées.

Le samedi 8 juin, les forces israéliennes libèrent quatre otages aux mains du Hamas dans le centre de la bande de Gaza, dévastée par huit mois de guerre. Une partie du pays ne l’apprend qu’à la nuit tombée, comme Eliana Gurfinkiel, trentenaire franco-israélienne vivant à Jérusalem.

Shabbat commence en effet le vendredi au coucher du soleil pour s’achever le samedi soir une fois la nuit tombée, et pour les pratiquants soucieux de respecter la loi juive orthodoxe – ou halakha -, tout travail ou toute action créatrice d’énergie comme allumer la lumière, un poste de radio, répondre au téléphone ou conduire est interdit pendant ce temps de repos.

Gurfinkiel reconnaît avoir été transportée d’émotion, mais pour elle, apprendre la bonne nouvelle à 11h du matin ou à 20h30 « ne change rien ».

Les ambulances aériennes du Magen David Adom évacuent les blessés de l’attaque terroriste du Hamas du 7 octobre 2023. (Crédit : Autorisation)

Pour prévenir leurs voisins pratiquants sans attendre, certains Israéliens ont fait circuler la nouvelle sur des papiers écrits à la main, selon des images diffusées sur les réseaux sociaux.

Un site internet ultra-orthodoxe raconte qu’un homme a écrit un mot pour remercier ses voisins de l’avoir prévenu, tout en leur demandant de ne pas réitérer ce geste de profanation à ses yeux.

« Petit coup de stress »

Depuis l’assaut du Hamas le 7 octobre, « il y a un petit coup de stress à la fin de chaque Shabbat quand on rallume notre téléphone », reconnaît Gurfinkiel.

Lancée de la bande de Gaza, l’attaque du groupe terroriste palestinien a entraîné la mort de près de 1 200 personnes, principalement des civils, tout en prenant 251 otages de tous âges, en commettant de nombreuses atrocités et en utilisant la violence sexuelle comme arme à grande échelle. Sur les 251 personnes enlevées ce jour-là, 116 sont toujours otages à Gaza dont 41 ont été déclarées mortes par l’armée israélienne.

Plus de 37 400 personnes seraient mortes à Gaza depuis le début de la guerre, selon le ministère de la Santé du Hamas. Les chiffres publiés par le groupe terroriste sont invérifiables, et ils incluraient ses propres terroristes, tués en Israël et à Gaza, et les civils tués par les centaines de roquettes tirées par les groupes terroristes qui retombent à l’intérieur de la bande de Gaza.

Au petit matin du 7 octobre, les alertes à la roquettes résonnent, et des hordes de terroristes du Hamas se ruent à l’assaut de kibboutz du sud d’Israël. Alors, contrevenant aux règles de Shabbat, certains Israéliens allument leur portable quand d’autres sautent dans des voitures pour aller se battre.

La possibilité de déroger à Shabbat quand une vie est en jeu « est un principe très connu et très respecté », explique Nitzan Perelman, doctorante en sociologie à l’Université Paris Cité.

C’est le pikuach nefesh (littéralement, « sauvetage d’une âme » en hébreu) : « Si on a la possibilité de sauver une vie, on préfèrera la sauver plutôt que de respecter Shabbat », explique Yonathan Seror, rabbin à Tel Aviv.

C’est ainsi que les ambulances peuvent rouler pendant Shabbat, ou qu’un juif pratiquant s’autorisera à prendre sa voiture pour aller à l’hôpital en urgence.

Radio silencieuse

Depuis la guerre du Golfe (1992), une station de radio à destination des foyers orthodoxes émet en silence pendant Shabbat, ce qui permet de laisser le transistor allumé sans être dérangé. Le silence n’est troublé qu’en cas d’alerte, immédiatement diffusée.

Dans les semaines suivant le 7 octobre, Seror a conseillé à ses fidèles de garder leur téléphone allumé pendant Shabbat, mais plus aujourd’hui car « ce sont des autorisations ponctuelles ».

Les exceptions aux dérogations du pikuach nefesh se multiplient néanmoins avec la guerre qui se prolonge, relève Perelman.

Efi est mère de deux soldats au front à Gaza (et pour cette raison ne souhaite pas que son nom de famille soit mentionné). « Le samedi, c’est ce qu’il y a de plus stressant », dit-elle à l’AFP.

« Nous n’utilisons pas le téléphone et ne savons pas ce qui se passe, mais je laisse l’appareil allumé. »

« S’il n’y a rien d’autre [que quelques bips], je sais que tout va bien. Sans ça, je ne pourrais plus vivre pendant Shabbat », ajoute-t-elle.

En Israël, Shabbat est aussi synonyme de repos politique, sauf en cas de danger pour la vie d’autrui ou pour la sécurité de l’État.

Le samedi 7 octobre, le Premier ministre Benjamin Netanyahu avait publié une vidéo à la mi-journée pour annoncer que son pays était « en guerre ».

Mais le 8 juin, Netanyahu a rendu visite aux otages libérés sans attendre la fin de Shabbat, suscitant de vives critiques du quotidien ultra-orthodoxe HaMevasser.

Déjà le samedi précédent, le bureau de Netanyahu avait envoyé un communiqué pour réagir à une déclaration du président américain Joe Biden, en plein repos hebdomadaire.

Ses alliés ultra-nationalistes, les ministres Itamar Ben-Gvir et Bezalel Smotrich, tous deux religieux, avaient attendu la nuit pour fustiger cette proposition de cessez-le feu à Gaza.

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