Esther Hayut dénonce des attaques « sans précédent » contre le système judiciaire
La présidente de la Cour suprême répond au ministre de la Justice du Likud qui a affirmé que les procureurs s'emploient à faire tomber les élus pour protéger leur propre statut

La juge en chef de la Cour suprême Esther Hayut a mis en garde mercredi contre les efforts « sans précédent » visant à politiser le système judiciaire israélien, repoussant les critiques cinglantes du ministre de la Justice Amir Ohana à l’encontre du ministère public et de la justice.
« En ces temps sans précédent dans notre histoire politique, nous devons tous faire preuve de fermeté et faire notre travail sans crainte », a déclaré Mme Hayut lors d’un événement dans la ville de Nazareth, au nord du pays.
« La politisation du système judiciaire risque de saper complètement ses fondements en tant que système indépendant et objectif », a-t-elle ajouté, avertissant que cela pourrait miner la confiance du public dans les tribunaux.
Ses propos sont intervenus au lendemain du jour où Ohana, membre du Likud du Premier ministre Benjamin Netanyahu, a accusé les procureurs de l’Etat opérant sous sa responsabilité de se livrer à des poursuites aveugles contre des agents de la fonction publique qui, à leur sens, mettent leur statut en péril, tout en étant soutenu par un « clan » de journalistes dévoyés.
En réponse à ces accusations, le procureur général Avichai Mandelblit et le procureur Shai Nitzan ont déclaré mardi qu’ils « déplorent » ces commentaires et « rejettent la tentative de dénigrer le travail de la police et du ministère public sans fondement factuel ».
Tout en soulignant que les tribunaux ne sont pas à l’abri des critiques, Mme Hayut a déclaré qu’il fallait faire preuve de prudence pour s’assurer que le constat de faute ne vise pas à délégitimer les institutions publiques et les fonctionnaires.
« Sans eux, nous aurons tous des difficultés à maintenir la primauté du droit », a-t-elle dit.

Les propos d’Ohana mardi ont été tenus en réponse à l’enquête visant Netanyahu, ainsi qu’à une nouvelle survenue cette semaine sur une éventuelle intimidation d’un témoin de l’Etat par des assistants du Premier ministre. Les dirigeants de droite ont qualifié d’anti-démocratiques les perquisitions policières des téléphones des assistants. Netanyahu les a qualifiées lundi « [d’]attaque terroriste contre la démocratie israélienne”.
Ohana a indiqué qu’il connaissait bien la procédure depuis des années en raison de son travail d’avocat et reconnu qu’il y avait de nombreux « avocats diligents et dévoués » qui veulent que justice soit faite au sein du système.
Il a également fait allusion à une sorte « [d’]État dans l’État », estimant qu’il existe « un autre ministère public – un ministère public au sein du ministère public. Il y a ceux qui, aux côtés d’une petite secte de journalistes de cour, sont parvenus à faire croire qu’il existe actuellement une guerre de la lumière contre l’ombre ».
Toute plainte contre le système judiciaire est présentée par ces « chroniqueurs judiciaires » comme « une atteinte à la primauté du droit », a-t-il assuré.
« Des carrières politiques et publiques ont été détruites l’une après l’autre » par ce système, a ajouté le ministre.

Le ministère public se « transforme ainsi en acteur politique » et fixe son calendrier en fonction des événements politiques, a dénoncé Ohana.
Il a également accusé les procureurs d’avoir abordé les enquêtes criminelles sur Netanyahu et le récent processus d’audience dans ces affaires avec leurs opinions déjà tranchées contre le Premier ministre.
Ohana a déclaré qu’il avait tenté d’ouvrir une enquête sur les « centaines de fuites » dans le cadre des investigations sur le Premier ministre, mais s’est vu opposer « un refus total de connaître la vérité ».
Ohana a nié qu’il agissait au nom du Premier ministre, disant que « ces questions brûlent en moi ».
M. Netanyahu fait face à des accusations de fraude, d’abus de confiance dans trois affaires pénales distinctes, ainsi que de corruption dans l’une d’elles. Il nie tout acte répréhensible et affirme être victime d’une chasse aux sorcières impliquant l’opposition, les médias, la police et le ministère public.