Israël en guerre - Jour 344

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Fermée en Israël, Al-Jazeera va saisir la justice et aller « jusqu’au bout »

Washington est « très préoccupé » par la décision d'Israël de fermer la chaîne qatarie ; le Hamas a qualifié la décision du gouvernement israélien de "violation flagrante de la liberté de la presse" visant "à cacher la vérité" sur la guerre à Gaza

Salah Negm, directeur de l'information d'Al-Jazeera en anglais, donne une interview à l'AFP à Doha le 6 mai 2024. (Crédit : KARIM JAAFAR / AFP)
Salah Negm, directeur de l'information d'Al-Jazeera en anglais, donne une interview à l'AFP à Doha le 6 mai 2024. (Crédit : KARIM JAAFAR / AFP)

Le directeur de l’information d’Al-Jazeera English a déclaré à l’AFP que la chaîne de télévision qatarie allait explorer toutes les voies de recours possibles pour contester en justice la fermeture de son bureau en Israël et irait « jusqu’au bout ».

Dimanche, le gouvernement israélien a décidé de fermer le bureau d’Al-Jazeera en Israël, conduisant rapidement à l’interruption de la diffusion télévisée. La décision s’applique pour une période renouvelable de 45 jours, selon les documents officiels.

« Les correspondants d’Al-Jazeera ont porté atteinte à la sécurité d’Israël et incité à la violence contre les soldats » israéliens, a expliqué le Premier ministre, Benjamin Netanyahu.

« S’il existe une possibilité de contester cette décision, nous irons jusqu’au bout », a affirmé lundi Salah Negm.

Peu après la décision du gouvernement israélien, une partie du matériel de la chaîne a été saisie, notamment ses équipements de diffusion. Elle a également été retirée des opérateurs satellites et du câble, et ses sites internet ont été bloqués.

« Les équipements qui ont été confisqués, la perte que nous avons subie du fait de l’arrêt de notre diffusion, tout cela fait l’objet d’une action en justice », a souligné le directeur de l’information d’Al-Jazeera English, critiquant une décision « digne des années 1960 plutôt que du XXIe siècle ».

Aujourd’hui, sur les écrans des chaînes arabe et anglaise d’Al-Jazeera s’affiche un message en hébreu indiquant « suspendu en Israël ».

La chaîne de télévision Al Jazeera indiquant en hébreu « Conformément à la décision du gouvernement, les émissions de la chaîne Al Jazeera ont été suspendues en Israël », à Jérusalem, le 5 mai 2024. (Crédit : Ronaldo Schemidt/AFP)

« Décision arbitraire »

La chaîne qatarie a immédiatement condamné la décision du gouvernement israélien, la qualifiant de « criminelle » et déclarant sur le réseau social X qu’elle « violait le droit d’accès à l’information ».

Salah Negm a également qualifié la fermeture du bureau d’Al-Jazeera de « décision arbitraire ». Mais il a toutefois minimisé l’impact de sa fermeture car la chaîne peut s’appuyer sur d’autres sources d’information en l’absence de « personnes sur le terrain », a-t-il dit.

« Je sais que les gens qui ont un VPN (réseau privé virtuel) peuvent nous voir en ligne à tout moment », a déclaré le directeur.

Al-Jazeera continue par ailleurs d’opérer en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, d’où elle continue d’émettre en direct sur la guerre entre Israël et le Hamas, déclenchée le 7 octobre après une attaque sans précédent du groupe terroriste islamiste palestinien sur le sol israélien.

Le siège principal de la chaîne d’information qatarie Al Jazeera dans la capitale Doha, le 6 mai 2024. (Crédit : KARIM JAAFAR / AFP)

La décision israélienne intervient après que la Knesset, a voté début avril une loi permettant d’interdire la diffusion en Israël de médias étrangers portant atteinte à la sécurité de l’Etat, un texte visant la chaîne qatarie, laquelle permet au Premier ministre d’interdire la diffusion du média visé et de fermer ses bureaux.

Fait majeur du passif entre la chaîne et Israël : la mort de sa journaliste américano-palestinienne Shireen Abu Akleh durant un raid israélien en Cisjordanie, en mai 2022. Al-Jazeera accuse Israël de l’avoir tuée délibérément.

L’armée israélienne a mené son enquête et reconnu que la balle responsable de la mort de la journaliste avait « très probablement » été tirée par une arme israélienne, tout en assurant que la journaliste n’avait pas été délibérément prise pour cible et a présenté des excuses.

Depuis le début de la guerre dans la bande de Gaza, le bureau d’Al-Jazeera dans le territoire palestinien a été bombardé et deux de ses correspondants ont été tués.

Le chef du bureau, Waël al-Dahdouh, a été blessé par une frappe imputée à Israël en décembre, qui a tué le caméraman de la chaîne.

Des Palestiniens devant une voiture touchée par une frappe attribuée à Israël et dans laquelle se trouvaient deux journalistes, Hanza Dahdouh, qui travaillait pour Al-Jazeera, et un indépendant, Mustafa Thuria, qui ont été tués, le 7 janvier 2024. (Crédit : Hatem Ali/AP)

« Al-Jazeera a perdu quelques personnes, leurs familles ont souffert, ce qui est vraiment différent des autres conflits dans ce sens », a déploré M. Negm.

Selon le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), une association établie à New York, au moins 97 journalistes ont été tués depuis le début de la guerre le 7 octobre entre Israël et le Hamas, parmi lesquels 92 Palestiniens.

La mort de journalistes « n’est pas quelque chose que nous pouvons simplement raconter avec politesse », a estimé Negm.

« Nous devons nous méfier, être prudents et alerter les gens sur la nature de la guerre qui se déroule et sur son caractère mortel pour la population et pour nous en tant que profession », a-t-il poursuivi.

Réactions

Les Nations unies ont dénoncé une « décision faisant reculer la liberté de la presse », et plusieurs pays, notamment les Etats-Unis, grand allié d’Israël, se sont opposés à cette décision.

« Concernant la fermeture du bureau d’Al-Jazeera en Israël (…), nous avons dit clairement que nous sommes fermement contre toute décision faisant reculer la liberté de la presse », a déclaré Stéphane Dujarric, porte-parole du secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres.

« Une presse libre fournit un service inestimable pour garantir l’information et l’engagement du public », a-t-il ajouté.

Washington est « très préoccupé » par la décision d’Israël de mettre fin aux activités d’Al Jazeera dans le pays, a déclaré lundi le porte-parole du Département d’État, Matthew Miller.

« Nous avons clairement indiqué que nous soutenons la liberté des médias dans le monde entier, y compris en Israël », a indiqué Miller.

« Nous pensons qu’Al Jazeera devrait pouvoir opérer en Israël, comme elle le fait dans d’autres pays de la région », a-t-il ajouté.

L’Égypte, les Émirats arabes unis, le Bahreïn et l’Arabie saoudite interdisent tous à Al Jazeera d’exercer ses activités dans leur pays, la considérant comme un dangereux porte-parole des groupes terroristes.

L’Association de la presse étrangère (FPA), qui représente les médias étrangers en Israël, en Cisjordanie et à Gaza, a condamné dimanche la décision d’interrompre les activités du réseau d’information qatari en Israël et a estimé qu’il s’agit là d’une « source d’inquiétude pour tous les partisans d’une presse libre ».

Un employé du réseau d’information et de la chaîne de télévision Al Jazeera, basé au Qatar, dans les bureaux de la chaîne à Jérusalem, le 31 juillet 2017. (Crédit : Ahmad Gharabli/AFP)

« C’est un jour sombre pour les médias. C’est un jour sombre pour la démocratie », a déclaré la FPA dans un communiqué.

Le ministère allemand des Affaires étrangères a qualifié lundi de « mauvais signal » pour la liberté de la presse la décision du gouvernement israélien de fermer en Israël la chaîne qatarie Al-Jazeera.

« Une presse libre et diverse est un important pilier de toute démocratie libérale. Particulièrement en temps de crise, il est nécessaire de protéger la liberté de la presse », a souligné le ministère sur X.

Le Hamas a qualifié dimanche la décision du gouvernement israélien de fermer la chaîne qatarie Al-Jazeera en Israël de « violation flagrante de la liberté de la presse » visant « à cacher la vérité » sur la guerre dans la bande de Gaza.

La décision d’Israël est « une mesure de rétorsion contre le rôle (…) que joue Al-Jazeera dans la mise en lumière des crimes » de l’armée israélienne dans la bande de Gaza et en Cisjordanie, a estimé le groupe terroriste islamiste palestinien dans un communiqué sur Telegram, dénonçant « l’apogée d’une guerre contre les journalistes de la part d’Israël », ayant pour « but de cacher la vérité ».

Suite au boycott par ses ministres du vote du cabinet dimanche sur l’arrêt des opérations du réseau d’information Al Jazeera en Israël, le parti HaMahane HaMamlahti a précisé qu’il soutenait la mesure mais a estimé que le moment choisi pourrait nuire aux négociations en cours pour la libération des otages israéliens retenus à Gaza.

« À la demande des responsables des agences de sécurité, et en particulier du chef du Mossad, et afin de ne pas nuire aux efforts de négociation, il a été décidé lors de cette réunion de reporter le vote de quelques jours. Le fait de soumettre la question au vote ce matin lors de la réunion du cabinet est une décision correcte à un moment malheureux qui pourrait saboter les efforts pour parvenir à [un accord] et qui découle de considérations politiques », a indiqué le parti dans un communiqué.

Selon les médias israéliens, les chefs de l’agence de sécurité intérieure du Shin Bet et de l’agence de renseignement du Mossad ont averti la semaine dernière que l’approbation de la fermeture du réseau qatari à ce stade pourrait avoir des ramifications négatives pour l’accord en raison du rôle de Doha dans les pourparlers en cours.

Le directeur d’Al Jazeera en Israël et dans les Territoires palestiniens a pour sa part qualifié de « dangereuse » la décision du gouvernement de mettre fin aux activités locales de la chaîne qatarie, décision motivée par la politique plutôt que par des considérations professionnelles.

Depuis le 7 octobre, Al Jazeera diffuse en continu des reportages sur les conséquences des opérations militaires israéliennes dans l’enclave.

Ses émissions ont été parmi les plus suivies au Moyen-Orient, dans un contexte de désenchantement généralisé à l’égard de la couverture médiatique occidentale.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a accusé Al Jazeera d’être « un organe de propagande du Hamas et d’avoir participé activement » à l’assaut barbare et sadique du groupe terroriste palestinien sur le sud d’Israël le 7 octobre.

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