Fusées éclairantes sur le domicile de Netanyahu : la Cour ordonne de libérer les 4 accusés
Le juge Zaid Falah a estimé qu'il n'y avait pas assez de preuves pour les condamner pour terrorisme qu'il y avait des preuves manifestes d'insouciance et de négligence
Jeremy Sharon est le correspondant du Times of Israel chargé des affaires juridiques et des implantations.
Le tribunal de Haïfa a ordonné jeudi que les quatre militants anti-gouvernement accusés d’avoir tiré des fusées éclairantes sur la résidence du Premier ministre Benjamin Netanyahu à Césarée soient libérés et assignés à résidence après presque six semaines de détention. Ils avaient été arrêtés à la mi-novembre.
Le juge Zaid Falah, qui siège au tribunal de Haïfa, a écrit qu’il ne pensait pas qu’il y avait suffisamment de preuves pour condamner ces hommes pour terrorisme – il a averti que lancer ce genre d’accusation avec trop de légèreté était susceptible de conduire à « de tristes résultats » concernant la liberté d’expression et la liberté de manifester dans le pays.
Le magistrat a annoncé que les quatre accusés pouvaient être assignés à résidence à leur propre domicile, équipés d’un dispositif électronique.
Les quatre individus, le contre-amiral (Rés.) Ofer Doron, 63 ans, son fils Gal Doron, 27 ans, ainsi que deux militants anti-gouvernementaux de longue date, Itay Yaffe, 62 ans, et Amir Sadeh, 62 ans, avaient été inculpés par le tribunal de district de Haïfa pour acte de terrorisme, utilisation imprudente et négligente du feu, ainsi que pour tentative d’incendie criminel.
Les quatre hommes ont été inculpés « d’acte terroriste par imprudence et par négligence » et de « tentative d’incendie » pour leurs actes. Les accusations de terrorisme ont donné du poids à la demande de l’État de les maintenir en détention jusqu’à la fin de la procédure judiciaire.
Les deux premiers prévenus ont également été mis en examen pour obstruction à la justice. Il leur est reproché d’avoir initialement menti aux enquêteurs sur l’identité du tireur de l’une des fusées éclairantes.
Le juge a néanmoins mis en doute les charges liées au terrorisme dans sa décision de jeudi.
Il a déterminé que les casiers judiciaires vierges des quatre hommes « ainsi que le manque de preuves » – en plus de leur coopération totale au cours de l’enquête et des regrets qu’ils ont exprimés – signifiaient que le danger qu’ils représentent était moindre et qu’ils sauraient se conformer sans difficulté à leur assignation à résidence, avec port d’un bracelet électronique.
Le 16 novembre, les quatre hommes s’étaient subrepticement rendus à un endroit situé à quelque 270 mètres de la résidence de Netanyahu et ils avaient tiré les fusées éclairantes. L’une d’entre elles avait d’abord touché la végétation à l’extérieur de la maison de Netanyahu, provoquant un incendie et de la fumée qui avaient alerté un garde dans l’enceinte de maison. Quelques minutes plus tard, la seconde fusée avait atterri près de l’entrée de la maison, à environ deux mètres d’un autre garde qui s’était précipité pour éteindre le feu.
Personne n’avait été blessé lors de l’incident, aucun dégât n’avait été causé et les Netanyahu n’étaient pas chez eux à ce moment-là.
Les militants avaient été arrêtés le même jour et ils ont été maintenus en détention depuis lors.
Les accusations de terrorisme portées contre les quatre hommes – des accusations qui sont passibles de lourdes peines de prison en cas de condamnation – ont été fortement critiquées par certains, qui ont estimé qu’il s’agissait d’une politisation des faits susceptible d’avoir un effet dissuasif sur les manifestations anti-gouvernementales.
Dans sa décision de jeudi, Falah a clairement indiqué qu’il était lui aussi très sceptique face à ces accusations de terrorisme.
« Pour remplir les conditions définissant un acte de terrorisme, il y a la nécessité d’avoir [un acte qui] va ‘contraindre le gouvernement’ et non ‘exercer des pressions’ sur le gouvernement’, » a écrit Falah.
« Dans le cas contraire, tout mouvement de protestation, quel qu’en soit le type – des protestations qui pourraient s’accompagner d’un crime supplémentaire, tel que des violences – est susceptible de relever dorénavant de cette définition de ‘l’acte de terrorisme’, » a-t-il poursuivi.
« Cette pente glissante risque de conduire à de tristes résultats – et ce n’est pas ce que les députés avaient voulu lorsqu’ils avaient mené un débat approfondi et qu’ils avaient choisi le mot ‘contraindre’ et non un langage plus complexe – précisément dans le souci d’éviter ce risque d’élargir les incidents qui peuvent entrer dans la définition d’un acte terroriste ».
Falah a conclu qu’il ne pensait pas qu’il y avait suffisamment de preuves pour condamner les hommes pour terrorisme.
Il a toutefois écrit qu’il y avait des preuves apparentes qui attestaient du fait que les accusés pouvaient être coupables des accusations d’imprudence et de négligence puisque, a-t-il dit, ils ont tiré les fusées éclairantes « dans la direction générale de la résidence du Premier ministre » en sachant qu’il y avait des membres des services de sécurité dans ce secteur et que les fusées éclairantes pouvaient les mettre en danger.
Il a également déclaré qu’il n’acceptait pas les dires des prévenus lorsqu’ils affirmaient qu’ils avaient cherché à tirer les fusées éclairantes au-dessus d’une structure mise en place dans le cadre de la manifestation voisine et non en direction de la résidence du Premier ministre.
Falah a noté qu’il y avait une « contradiction logique » dans le fait d’associer une accusation de crime commis par imprudence et par négligence et une tentative délibérée d’incendie criminel. Il a reconnu qu’il existait des preuves permettant de condamner les accusés pour l’incendie criminel, mais il a fait valoir que ces preuves n’étaient pas particulièrement solides.
« Le bureau du procureur de l’État étudiera la décision de la Cour et son traitement des crimes qui sont attribués aux accusés et il évaluera sa position sur la question », a fait savoir le bureau du procureur de l’État en réponse à cette décision.