Israël en guerre - Jour 376

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Gantz parle beaucoup dans sa première grande interview – mais en dit peu

Le chef de Hossen LeYisrael a affirmé qu'il deviendra Premier ministre, évitant au mieux de dire s'il siégerait dans un gouvernement Netanyahu en cas d'inculpation par Mandelblit

Raoul Wootliff est le correspondant parlementaire du Times of Israël

L'ancien chef d'état-major Benny Gantz lors de son premier discours électoral dans la ville côtière de Tel Aviv, le 29 janvier 2019. (Crédit : Thomas Coex/AFP)
L'ancien chef d'état-major Benny Gantz lors de son premier discours électoral dans la ville côtière de Tel Aviv, le 29 janvier 2019. (Crédit : Thomas Coex/AFP)

Après qu’un extrait de la toute première interview politique de Benny Gantz a entraîné la fureur de la droite après sa diffusion en début de semaine, le Yedioth Aharonoth a publié vendredi dans son intégralité cette « conversation personnelle » – comme l’a qualifié le journal.

Suite aux critiques émises sur les réponses « sans substance » apportées par Gantz aux questions soulevées par son éloge du désengagement de Gaza, en 2015, un porte-parole de Hossen LeYisrael a indiqué jeudi au Times of Israel que l’interview toute entière était « un article en profondeur de presque 10 pages qui se penche sur les questions économiques, sociales, sécuritaires et étatiques importantes qui intéressent le public ».

Alors que le duo d’intervieweurs constitué du chanteur israélien célèbre Shlomo Artzi et du journaliste et comédien de droite Hanoch Daum peut toutefois paraître curieux, l’interview de 7 000 mots sous forme d’entretien-fleuve aborde en effet une grande variété de sujets liés à presque toutes les sphères du discours public israélien.

Gantz, considéré comme le principal défi à un maintien de Netanyahu au pouvoir, se montre dans cet entretien peu disert sur un grand nombre de questions épineuses, affirmant toutefois sans équivoque : « Je vais être Premier ministre » et : « Je vais battre Benjamin Netanyahu.”

Alors qu’il lui est demandé s’il est de gauche ou de droite, Gantz répond que, pour lui, « la question centrale est toujours la question sécuritaire », esquivant la problématique en évoquant « la nécessité du rassemblement des certitudes et des opinions ».

Sur le désengagement, Gantz explique qu’Israël « devait trouver un moyen de ne pas contrôler les vies d’autrui », mais il ne s’engage pas à établir un Etat palestinien ou à ne pas évacuer davantage d’implantations – affirmant qu’un bon négociateur sait ne pas faire part de ses pensées de manière prématurée.

Photo d’illustration : Un soldat israélien garde l’implantation de Kedumim avec le village palestinien de Kadum en arrière-plan, le 13 novembre 2009 (Crédit : Gili Yaari/Flash90)

Gantz estime également que le sujet ne sera pertinent qu’en cas de « réveil » des Palestiniens et si ces derniers acceptent d’entrer dans des négociations sérieuses.

Daum se réfère à des propos tenus par Gantz au cours de son tout premier discours politique, la semaine dernière : « Vous avez dit que nous devons renforcer les blocs d’implantations. Mais il y a des habitants israéliens qui vivent à l’extérieur des implantations. Des gens qui vivent à Eli, à Kedumim. Cela signifie-t-il qu’ils devront partir ? », a-t-il interrogé.

« Tous, parmi nous, avons une expérience dans le monde des négociations », riposte Gantz. « Je ne pense pas avoir besoin de m’exprimer trop en détail et de manière prématurée sur ce que je pense et sur ce que je ne pense pas. Je peux vous dire ce qui me porte. Je suis porté par ce qui est dans l’intérêt d’Israël. Je suis porté par le fait que 90 % des gens seront d’accord avec
90 % de ce que je pense. Je ne suis pas dans l’attente. Je continue à améliorer, je continue à renforcer, je commence à construire », dit-il.

« Je ne répondrai pas à des questions qui ne sont pas pertinentes aujourd’hui », ajoute-t-il. « Si les Palestiniens décident, un jour, de se réveiller et de rejoindre un processus diplomatique conduit avec le soutien des pays de la région, avec le soutien international – ils seront les bienvenus. Mais je ne suis pas dans l’attente ».

Daum demande alors si ces propos signifient qu’en l’absence de telles négociations, Gantz se retirerait de certaines parties de la Cisjordanie de manière unilatérale, comme cela avait été le cas avec le désengagement de la bande de Gaza en 2015.

« J’ai dit que je ne suis pas dans l’attente », a renchéri Gantz. « Je n’ai pas dit que ce serait unilatéral et je ne veux pas affirmer une telle chose. Nous ferons quelque chose de constructif. Jusqu’à aujourd’hui, ma profession a été de détruire, et mon rôle est dorénavant de construire. Je n’attendrai pas, je construirai ».

Dans l’entretien, Gantz semble saluer le désengagement de 2005 en disant que « c’était une action légale. Elle a été approuvée par le gouvernement d’Israël, conduite par l’armée et les habitants d’implantations israéliens avec beaucoup de douleur – mais elle s’est faite dans les règles. Nous devons en tirer les leçons et les mettre en pratique ailleurs ».

Un habitant d’implantation grimpé sur un toit alors que les soldats israéliens s’approchent de l’implantation juive de Netzer Hazani, dans le bloc d’implantations de Gush Katif, dans le sud de la bande de Gaza, le 18 août 2005 (Crédit : AP Photo/Emilio Morenatti)

Ayant d’ores et déjà appris certaines tactiques politiques au cours du mois qui s’est écoulé depuis le lancement de son parti, Gantz ne répond pas à une question de possibles fusions pré-électorales, tout en refusant d’exclure une participation au sein d’une coalition aux côtés de formations ultra-orthodoxes ou arabes – dans la mesure où elles s’identifient comme « sionistes ».

Gantz dément également des rumeurs qui avaient affirmé que son épouse serait impliquée auprès de l’organisation de gauche Machsom Watch.

« Ce sont des bêtises. La plus grande des bêtise. La plus grande bêtise entre toutes », a-t-il commenté.

Interrogé sur les manifestations contre le procureur-général qui réclament l’inculpation de Netanyahu, Gantz répond : « Oui, nous sommes dans un pays démocratique et les gens ont le droit de manifester ». Il ajoute que, contrairement au Premier ministre, il a la certitude qu’Avichai Mandelblit « est totalement dévoué à la loi et ne sera pas influencé ».

Benjamin Netanyahu, le 5 février 2019 à Jérusalem (Crédit : capture d’écran YouTube)

Tandis qu’il a d’ores et déjà fait savoir qu’il ne participerait pas à un gouvernement avec Netanyahu si ce dernier devait faire l’objet d’une inculpation, Gantz fait de son mieux pour éviter de clarifier si cette détermination s’appliquerait également après l’annonce par Mandelblit d’une mise en examen – mais avant un processus d’audience finale qui pourrait ne pas se terminer avant une année encore.

Il répète alors à trois occasions : « S’il y a une inculpation, je ne siégerai pas à ses côtés », sans en dire davantage.

Passant d’un badinage léger et nostalgique à des questions pressantes sur des propositions politiques sérieuses, Artzi et Daum poussent également Gantz à évoquer son histoire personnelle d’enfant de parents survivants de la Shoah et de sa foi religieuse. Il se qualifie lui-même de « laïque traditionnel ».

Le duo de journalistes parvient à donner un nouvel éclairage sur l’ancien chef d’Etat-major en levant un peu le rideau – mais Gantz, qui a déclaré vouloir être Premier ministre, prend soin de garder encore sa part d’ombre.

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