GB/Antisémitisme : Une philanthrope juive démissionne de ses fonctions de bénévole
Candida Gertler a annoncé sa décision pour protester contre la "normalisation de la haine" après que le musée d'art de Londres a rompu les liens qui l'unissaient à elle ; elle est mise en cause pour sa défense d'Israël et son amitié avec Netanyahu
Une philanthrope juive de premier plan a annoncé sa démission à effet immédiat de toutes les fonctions bénévoles qu’elle occupait au sein des institutions d’art britanniques pour protester contre l’antisémitisme et contre la « normalisation de la haine » suite à des campagnes menées à l’encontre de son fonds d’art, mis en cause en raison des liens qu’il entretient avec Israël, ont fait savoir, vendredi, des journaux qui se consacrent au monde artistique.
Candida Gertler, qui est co-fondatrice de l’Outset Contemporary Art Fund, a fait part de son départ après que le Centre d’art contemporain Goldsmiths, au sein de l’université de Londres, a expliqué, lundi, qu’il ôterait son nom et celui de son époux de l’une de ses galeries et du bureau des donateurs – une initiative qui mettra un terme à un boycott mené par des activistes pro-palestiniens et anti-israéliens depuis des mois.
Gertler a expliqué que sa décision « n’a pas été prise parce que j’ai peur, par faiblesse ou par sentiment de défaite, mais elle est un acte de protestation de principe qui vise à dénoncer la montée alarmante de l’antisémitisme ».
« L’incapacité à affronter une telle haine compromet l’essence même de ce que tout l’art défend – c’est un moyen d’empathie, d’exploration et d’humanité partagée », a-t-elle indiqué, ajoutant que « ce n’est pas un adieu que je fais à l’art, je ne fais que réimaginer comment il peut être à nouveau une force de véritable changement sociétal. »
Outset, que Gerlter avait aidé à fonder en 2003, a collecté plus de 16 millions de livres pour soutenir les arts – ce qui a valu à la philanthrope une reconnaissance de la part de la royauté britannique, a noté l’Art Review. Le fonds contribue aussi aux institutions d’art israéliennes et Gertler est membre de la commission des British Friends of Art Museums in Israel.
Gertler a épousé le milliardaire britanno-allemand Zak Gertler, qui a fait fortune dans la promotion immobilière. Il avait accueilli la fête organisée à l’occasion du 70e anniversaire de Benjamin Netanyahu, en 2019, et il a fait des dons généreux aux campagnes politiques du Premier ministre, selon les médias israéliens.
Les liens entretenus par le couple avec Netanyahu et le soutien apporté par Outset aux musée israéliens qui offrent « des programmes artistiques aux soldats de Tsahal » ont été soulignés dans le cadre de la campagne Strike Outset, qui réclame un boycott du fonds.
Candida Gertler steps down from Outset Contemporary Art Fund citing 'alarming rise of antisemitism' in cultural spaces.Move comes after 1100 art workers sign open letter demanding Tate cuts ties with philanthropic organisation, which she co-founded in 2003 https://t.co/iShQeaBqbr pic.twitter.com/kJFdnoXXIo
— alain servais (@aservais1) November 29, 2024
La campagne, lancée au mois de mars, s’est concrétisée cette semaine par une lettre signée par plus de 1 000 personnes appartenant au milieu de l’art. Ce courrier a été l’occasion, pour ses signataires, de demander au premier musée britannique, la Tate, de rompre ses liens avec Outset.
Il a aussi pris pour cible un autre fonds juif, le Zabludowicz Art Trust.
La missive a accusé les deux fonds d’être « profondément complices du régime israélien », dénonçant leur « artwashing du génocide et de l’apartheid. »
Poju Zabludowicz, fondateur de l’Art Trust avec son épouse Anita, avait aussi créé le Britain Israel Communications and Research Centre (BICOM). Il verse des fonds à des causes juives et israéliennes. Une partie de la fortune de la famille remonte au travail mené par le père de Poju, Shlomo, dans l’entreprise de défense israélienne Soltam Systems, dans laquelle il était très impliqué.
Selon l’Art Newspaper, Poju et Anita Zabludowicz ont refusé de commenter la lettre appelant à leur boycott – répétant une déclaration qu’ils avaient faite en 2023 où ils disaient être « très attristés et troublés par la guerre horrible qui se déroule actuellement en Israël et à Gaza ». Ils ont ajouté, dans cette déclaration, qu’ils « soutiennent avec force le cadre de la solution à deux États, ainsi qu’une solution pacifique qui garantira les droits des Israéliens et des Palestiniens à vivre et à travailler côte à côte, dans un contexte de coopération avec le Moyen-Orient plus largement ».
Les institutions d’art du monde entier ont connu des appels croissants au boycott contre Israël avec, en arrière-plan, la guerre à Gaza – une guerre qui avait été déclenchée quand des milliers de terroristes du Hamas avaient envahi le sud d’Israël et qu’ils y avaient commis un véritable pogrom, massacrant plus de 1 200 personnes et kidnappant 251 personnes qui avaient été prises en otage dans la bande de Gaza, le 7 octobre 2023.