Israël en guerre - Jour 649

Rechercher
Interview

Haïm Korsia : que chacun soit « le gardien de son frère »

Le grand rabbin de France, chef religieux de la première communauté juive d'Europe, appelle chacun à "devenir le gardien de son frère" après les récents attentats et actes antisémites en Europe

Haim Korsia, grand rabbin de France. (Crédit : Facebook)
Haim Korsia, grand rabbin de France. (Crédit : Facebook)

Après les attentats de Paris et Copenhague, qui ont visé notamment des juifs, des commentateurs ont parlé de fractures, entre citoyens, dans les sociétés européennes. Est-ce votre analyse ?

« On a longtemps refusé de faire ce constat. La manifestation du 11 janvier (à Paris) a été un moment de grandeur parce que d’unité et de fraternité retrouvées, qui a invité chacun à ne plus nier l’évidence. »

« Le vivre ensemble ne doit pas être un mantra mais une capacité à vivre des solidarités concrètes, en éloignant les fausses projections que l’on a sur l’autre. Je viens de me rendre au Mémorial du 11 septembre à New York, symbole de l’aptitude d’une société démocratique à se relever quand elle a été frappée en son sein – comme on vient de l’être. Il y a aux États-Unis une culture de la résilience dont j’ai vu les bienfaits. »

Depuis ces attentats, tout le monde en France veut promouvoir la laïcité. Mais laquelle ?

« Il n’y a pas de ‘mais’. La laïcité c’est la laïcité : la neutralité de l’Etat, la liberté de pratique religieuse dans la mesure où elle n’affecte pas les autres principes républicains. »

« La laïcité ne peut pas devenir une nouvelle religion niant le fait religieux, sinon nous allons créer deux sociétés alors que nous cherchons à produire de l’unité. Nous ne sommes pas une société monolithique, mais une communauté de citoyens avec leurs points de vue spirituels ou philosophiques, qui ont la même espérance : la France. »

« Ce n’est pas un pays où l’on est heureux, c’est un pays où l’on veut l’être. L’islam aussi a les moyens de s’adapter à la laïcité. Une prière pour la République – comme celle récitée dans nos synagogues – peut être élaborée dans l’islam français. »

Comment, en tant que rabbin, répondez-vous à cet antisémitisme qui resurgit, dans le dialogue avec les juifs ?

« En me plongeant dans le message biblique. Jamais le judaïsme n’a prôné autre chose que l’espérance. Appuyons-nous sur l’expérience des anciens : ils ont appris, par le prix terrible du sang, à détecter les vibrations les plus infimes de la société. »

« L’État a mis le temps pour les entendre, mais à présent la volonté politique de lutter contre ces maux est incontestable. Le pas suivant, c’est l’engagement des citoyens. Que chacun devienne le gardien de son frère, en déployant une vigilance. Nous gagnerons en efficacité ce que nous perdrons en innocence. »

La profanation du cimetière juif de Sarre-Union, dans l’est de la France, découverte dimanche, est-ce le signe d’une perte du sens de l’humanité même?

« D’aucuns disaient que l’inculture mènerait à la barbarie : nous y sommes. »

« Cette violence contre des tombes est la négation de l’humain même après sa mort. Et qu’on ne me raconte pas que ces adolescents ne savaient pas ce qu’ils faisaient : ils le savaient très bien car cela touche à l’interdit. »

Des tombes profanées au cimetière de Sarre-Union (Crédit : Nathan Kretz/Times of Israel)
Des tombes profanées au cimetière de Sarre-Union (Crédit : Nathan Kretz/Times of Israel)

« Manifestement, personne ne leur a inculqué le respect des morts ; comment alors demander de respecter les vivants ? Nous-mêmes, juifs, nous nous sommes dit que cette profanation était terrible parce qu’elle était massive. Mais à combien de tombes profanées fixe-t-on la limite de l’acceptable ? Une sépulture profanée, un crachat dans la rue au passage d’un juif, est inadmissible. Aux Etats-Unis, on appelle ça la théorie de la ‘broken window’ : dès la première vitre cassée, on sévit. »

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu multiplie les appels aux juifs d’Europe pour qu’ils émigrent en Israël. On sent que les responsables communautaires veulent répondre « restons en Europe, c’est ici qu’est notre vie ».

« Nous l’avons toujours dit ! Les juifs de France s’inscrivent dans une histoire française, ils entretiennent les traditions d’un judaïsme bimillénaire. Rachi, qui a permis aux juifs du monde entier de comprendre la Torah et le Talmud, a vécu il y a plus de 900 ans à Troyes (est). Nous devons encore porter ce génie combiné de la France et du judaïsme. »

« Si quelqu’un, spirituellement, sereinement, librement, fait le choix de l’alyah, c’est formidable. Mais ce ne peut être une fuite, ce serait tragique. Il faut donc qu’on réenchante la possibilité pour chacun d’habiter en France, en Europe. »

En savoir plus sur :
S'inscrire ou se connecter
Veuillez utiliser le format suivant : example@domain.com
Se connecter avec
En vous inscrivant, vous acceptez les conditions d'utilisation
S'inscrire pour continuer
Se connecter avec
Se connecter pour continuer
S'inscrire ou se connecter
Se connecter avec
check your email
Consultez vos mails
Nous vous avons envoyé un email à gal@rgbmedia.org.
Il contient un lien qui vous permettra de vous connecter.
image
Inscrivez-vous gratuitement
et continuez votre lecture
L'inscription vous permet également de commenter les articles et nous aide à améliorer votre expérience. Cela ne prend que quelques secondes.
Déjà inscrit ? Entrez votre email pour vous connecter.
Veuillez utiliser le format suivant : example@domain.com
SE CONNECTER AVEC
En vous inscrivant, vous acceptez les conditions d'utilisation. Une fois inscrit, vous recevrez gratuitement notre Une du Jour.
Register to continue
SE CONNECTER AVEC
Log in to continue
Connectez-vous ou inscrivez-vous
SE CONNECTER AVEC
check your email
Consultez vos mails
Nous vous avons envoyé un e-mail à .
Il contient un lien qui vous permettra de vous connecter.