Le Crif sur le GODF : « la polémique est complètement close »
Selon Francis Kalifat, qui reste tout de même inquiet, la loge parisienne, appelée "Maximilien l'incorruptible", est une loge "dont chacun connaît l’extrémisme de gauche"
Le Grand Orient de France s’est défendu de tout antisémitisme, après une polémique née de la publication, ces derniers jours, d’une proposition de texte d’une loge visant le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif).
A l’origine de cette polémique : un « voeu », ou proposition de texte, émis par une loge parisienne, demandant aux responsables du GODF – qui compte quelque 1 360 loges – de ne plus participer aux manifestations organisées par le Crif, selon plusieurs sources. Ce dernier y est accusé d’être « suiviste de la politique » menée par Israël, une « politique de l’extrême droite religieuse », selon le texte publié par des blogs francs-maçons et présenté à l’AFP, et de favoriser la montée de l’antisémitisme.
Suite à « une erreur administrative », et sans suivre la procédure maçonnique habituelle (un vote par la région de rattachement), ce voeu a été envoyé directement, avec d’autres, au menu de l’assemblée générale (le Convent) de la principale obédience maçonnique française, qui a lieu à Rouen en fin de semaine, a expliqué à l’AFP Jean-Philippe Husch, grand maître du GODF.
Lundi, la commission chargée de l’analyse de ces propositions avant le vote au Convent, l’a retiré. Mais « cela a provoqué un émoi considérable » au sein du GO, a souligné une source franc-maçonne.
« Sur le fond, comment peut-on imaginer que des francs-maçons du Grand Orient de France puissent être antisémites ? (…) Non, les francs-maçons ne sont pas antisémites, comme ils ne sont ni racistes ni xénophobes », ont réagi dans un communiqué M. Hubsch et le président du Convent Christian Mathieu.
Ce voeu ne « représente absolument pas l’opinion de la très grande majorité des francs-maçons », a encore assuré M. Hubsch à l’AFP.
« Il va certainement y avoir une enquête administrative » interne et la justice maçonnique « sera certainement saisie », a-t-il ajouté.
Le président du Crif, Francis Kalifat, qui avait reçu le texte proposé au vote, avait réagi à L’Express : « C’est scandaleux, je suis à la fois choqué et en colère. Il est incompréhensible qu’au sein d’un mouvement de pensée comme le Grand Orient, on puisse emprunter le langage de l’extrême gauche mélenchoniste. » Le responsable accusait également le texte d’antisémitisme. « On y parle de ‘Français d’origine juive’ , alors que jamais on écrirait ‘Français d’origine catholique ou musulmane’. C’était le langage de l’extrême droite de l’entre-deux-guerres. »
Kalifat a affirmé mardi à l’AFP : « la polémique est complètement close à mes yeux et ne laissera aucune trace dans les relations avec le GODF ».
« Cela reste très circonscrit à une loge », a-t-il dit. Selon lui, la loge parisienne, appelée « Maximilien l’incorruptible », est une loge « dont chacun connaît l’extrémisme de gauche ».
La proposition de texte était « à la limite de la diffamation et à la limite de l’antisémitisme », a-t-il remarqué.
Il restait toutefois inquiet car une « telle polémique ne se serait jamais produite » il y a quelques années.
« La société française est perméable à la diffusion d’un nouvel antisémitisme qui n’est pas suffisamment combattu et traité : la haine d’Israël, a-t-il expliqué. S’il est légitime de critiquer la politique israélienne – et personne ne s’en prive en Israël –, cela ne peut pas conduire à la délégitimation de l’existence de l’État d’Israël. Or, c’est précisément ce que vise ce nouvel antisémitisme. Sous ce masque, il travaille à la fin d’Israël. Il est donc urgent en France de franchir un pas indispensable. L’Assemblée nationale française doit voter la résolution présentée par l’IHRA (International Holocaust Remembrance Alliance) qui inclut, dans la définition de l’antisémitisme, la haine d’Israël. »
Une résolution pourtant non-contraignante.