La levée de l’immunité parlementaire en Turquie inquiète l’Allemagne
En Turquie, la levée de l'immunité parlementaire pourrait affecter des dizaines de parlementaires pro-kurdes
La chancelière allemande Angela Merkel a exprimé lundi sa « profonde préoccupation » au président Recep Tayyip Erdogan après la levée de l’immunité parlementaire en Turquie, une mesure qui expose des dizaines de députés prokurdes à des poursuites judiciaires.
Cette mesure est « une source de profonde préoccupation que j’ai exprimée au président turc », a-t-elle déclaré lors d’un point de presse en marge du Sommet humanitaire international à Istanbul, ajoutant avoir dit à M. Erdogan qu’une démocratie avait besoin d’ « une justice indépendante, d’une presse indépendante et d’un Parlement fort ».
Le Parlement turc a largement approuvé vendredi une réforme constitutionnelle controversée pour lever l’immunité des députés visés par des procédures judiciaires. Les élus du Parti démocratique des peuples (HDP, prokurde) y voient une manœuvre du gouvernement pour les évincer du Parlement, où ils constituent actuellement la troisième force.
A ce jour, 138 députés de tous les partis représentés au Parlement sont exposés à des poursuites judiciaires suite à la perte de leur immunité, dont 50 élus (sur 59) du Parti démocratique des peuples. Plusieurs députés du HDP sont accusés de « propagande terroriste », ce qu’ils nient.
Un affaiblissement du HDP pourrait renforcer le Parti de la justice et du développement (AKP) au pouvoir, en plein débat sur une nouvelle Constitution pour instaurer le régime présidentiel voulu par M. Erdogan.
Le président turc, qui a multiplié les poursuites contre des journalistes pour « injure », est accusé par nombre d’ONG et d’opposants politiques de vouloir museler toute voix discordante.
Les relations entre la Turquie et l’Union européenne se sont dégradées ces dernières semaines après le refus de M. Erdogan d’assouplir la loi antiterroriste turque, jugée trop permissive par Bruxelles et utilisée pour multiplier les poursuites pour « propagande terroriste » en plein conflit kurde.
« Il reste beaucoup de questions sur ce sujet et nous allons devoir observer de manière très précise les évolutions sur les points qui ne sont pas réglés », a ajouté Mme Merkel.