La réponse d’Israël à la mort du pape transmet « un message d’exclusion » – groupe chrétien
Le Forum des chrétiens de Terre sainte demande à Jérusalem d'envoyer un représentant de haut-rang aux funérailles du pape, et réclame une enquête sur les policiers qui se sont heurtés aux fidèles lors de la cérémonie du feu sacré

Un groupe issu de la société civile chrétienne en Israël a dénoncé l’absence de condoléances, de la part du Premier ministre Benjamin Netanyahu, en direction des catholiques qui vivent en Terre sainte après la mort du pape François. Il a exigé que des représentants de premier plan du pays soient présents lors des funérailles du souverain pontife qui ont lieu samedi.
Dans une lettre datée de mercredi mais qui a été rendue publique vendredi, Wadie Abunassar, qui est le coordinateur du Forum des chrétiens de Terre sainte, a également demandé une enquête sur le comportement de la police lors d’une bagarre avec des fidèles qui se trouvaient, la semaine dernière, à l’église du Saint-Sépulcre, et la reconnaissance de « la contribution apportée par les entités chrétiennes à l’État ».
« Réduire au silence le deuil d’un responsable chrétien mondial transmet un message d’exclusion et d’abandon », a estimé Abunassar dans son courrier. Il a ajouté que la conduite d’Israël était un « grave affront fait non seulement aux citoyens chrétiens d’Israël, mais aussi aux chrétiens du monde entier, voire à l’Humanité entière ».
Abunassar, qui avait rencontré François et qui a servi de conseiller aux responsables catholiques en Israël, a déclaré qu’il écrivait cette lettre « au nom de centaines de citoyens chrétiens d’Israël », notamment au nom « d’ecclésiastiques et de laïcs qui œuvrent à renforcer la présence chrétienne en terre sainte » sous l’égide du Forum.
« Les chrétiens d’Israël sont des citoyens loyaux et à part entière ; ils renforcent la société israélienne dans tous les secteurs », a jugé Abunassar dans sa missive. « Leurs contributions apportées à la prospérité, à l’innovation et à la résilience de la société israélienne sont profondes et durables ».
Netanyahu a diffusé jeudi – soit au lendemain de la date indiquée dans la lettre – une brève déclaration de condoléances pour le décès de François, dont la critique de la guerre à Gaza a mis à rude épreuve les liens entretenus par Israël avec le Vatican. Une déclaration qui est survenue après plusieurs jours de silence.
Le ministère israélien des Affaires étrangères, de son côté, avait publié un message de deuil peu après la mort du pape, qu’il avait ensuite rapidement supprimé.

Le ministère avait également demandé aux ambassadeurs israéliens stationnés à l’étranger de supprimer les condoléances qu’ils avaient déjà publiées, suscitant l’indignation des envoyés, ont rapporté les médias israéliens.
Écrivant à Netanyahu, Abunassar a exigé que le Premier ministre émette un « clair message de deuil » et qu’il délègue un haut-responsable aux funérailles du pape, qui ont lieu samedi. Israël sera représenté par son ambassadeur au Vatican – un recul par rapport à la dernière inhumation d’un pape en exercice, en 2005, lorsqu’Israël avait été représenté par son président et par son chef de la diplomatie.
Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Oren Marmorstein, a fait savoir que ce niveau de représentation du pays n’était pas le signe de quelconques tensions avec le Vatican, mais qu’il était du en partie à des conflits de calendrier liés aux funérailles qui ont lieu le jour du Shabbat juif, ce qui oblige les responsables politiques israéliens à rester à distance de marche de l’événement.
Abunassar a estimé que la réaction d’Israël à la mort du souverain pontife était « particulièrement scandaleuse à la lumière des défis douloureux et croissants auxquels sont confrontés les chrétiens qui vivent en Israël », avec notamment « la diminution des subventions accordées aux écoles chrétiennes ».
Il a indiqué que l’insulte était d’autant plus grave qu’elle faisait suite à des heurts survenus à l’église du Saint-Sépulcre à Jérusalem, samedi dernier, où la police a « bloqué, confiné et agressé » des fidèles qui s’étaient « rassemblés pacifiquement pour attendre le feu sacré – le moment le plus sacré du calendrier chrétien orthodoxe, le moment qui annonce la résurrection de Jésus-Christ ».
Israeli police attacked Christian worshippers celebrating Easter at the Church of the Holy Sepulcher in occupied East Jerusalem – the site where Christians believe Jesus was crucified and buried. pic.twitter.com/1iysnaq8Qf
— AJ+ (@ajplus) April 24, 2025
Les images de ces heurts « ont choqué les communautés chrétiennes du monde entier et elles ont laissé une blessure profonde dans le cœur des chrétiens israéliens », a noté Abunassar.
« Ces actes… symbolisent le mépris croissant pour la présence chrétienne en Israël et elles peuvent potentiellement avoir un impact négatif sur l’image et sur le statut d’Israël dans le monde », a-t-il ajouté.
« Nous restons déterminés à construire une société israélienne dans laquelle tous les citoyens œuvrent pour le bien commun, sur la base du respect mutuel », a poursuivi Abunassar. « Il est temps que le gouvernement montre qu’il s’engage également à préserver et à honorer la communauté chrétienne de ce pays et les valeurs sacrées que nous défendons ».
Le pape François avait suscité l’ire de Jérusalem, vers la fin de sa vie, en dénonçant « la cruauté » d’Israël dans la guerre à Gaza – une guerre qui avait été déclenchée lorsque des milliers de terroristes placés sous la direction du Hamas avaient pris d’assaut le sud d’Israël, le 7 octobre 2023. Dans le cadre de cette attaque sanglante, ils avaient massacré plus de 1 200 personnes et ils avaient enlevé 251 personnes qui avaient été prises en otage dans la bande.
De nombreuses déclarations du pape avaient laissé aux Juifs et aux Israéliens un sentiment de confusion ou de colère.
Lors d’un appel téléphonique avec le président Isaac Herzog, au mois de novembre 2023, François avait déclaré, semble-t-il, qu’il était « interdit de répondre à la terreur par la terreur », faisant référence à la campagne militaire israélienne qui visait à détruire le Hamas à Gaza, à le chasser du pouvoir et à garantir la remise en liberté des otages.

Il y a, en Israël, environ 180 000 chrétiens, dont la majorité vit dans le nord du pays, selon le rapport de fin d’année qui a été établi par le Bureau central des statistiques en 2024. Il n’a pas précisé la répartition par confession de ces chrétiens.
Un rapport publié l’année dernière avait fait état d’une « augmentation notable » des attaques commises contre les chrétiens et leurs biens en 2023.
Les autorités israéliennes n’ont pas pu ou elles n’ont pas souhaité mettre un terme à ce phénomène, selon un rapport qui a été diffusé par le Centre Rossing d’Éducation et de Dialogue, une étude intitulée « Attaques contre les chrétiens en Israël et à Jérusalem-Est ».
L’ONG attribuait cette augmentation au « climat socio-politique général ».