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Le fondateur de ZAKA démissionne après des accusations de viols et abus sexuels

Yehuda Meshi-Zahav a quitté le groupe et rendu son Prix d'Israël à la demande d'ONG et de députés ; la police mène l'enquête

Le leader de la ZAKA, Rabbi Yehuda Meshi-Zahav, dans les couloirs de la Knesset, le 15 octobre 2012. (Crédit :  Miriam Alster/FLASH90)
Le leader de la ZAKA, Rabbi Yehuda Meshi-Zahav, dans les couloirs de la Knesset, le 15 octobre 2012. (Crédit : Miriam Alster/FLASH90)

La police a fait savoir dans la journée de vendredi qu’elle enquêtait sur les accusations lancées contre l’éminent activiste ultra-orthodoxe Yehuda Meshi-Zahav qui se serait rendu coupable de crimes et délits sexuels – notamment sur des mineurs – pendant plusieurs décennies.

Ces accusations, qui ont fait l’effet d’une bombe, ont été révélées dans un reportage d’investigation du journal Haaretz, jeudi dans la soirée.

Plusieurs heures après l’annonce, Meshi-Zahav, cofondateur et président des services d’urgence bénévoles de ZAKA, a fait savoir qu’il démissionnait de son poste au sein de l’organisation et qu’il rendait le Prix d’Israël qu’il devait recevoir cette année.

Dans un courrier adressé aux bénévoles de ZAKA, Meshi-Zahav a répété son rejet des accusations « sans fondement » et « diffamatoires », déplorant les dégâts que pourrait potentiellement essuyer l’organisation qu’il a créée et dirigée pendant des décennies.

« Première initiative : je veux renoncer à l’honneur qui m’a été fait avec le Prix d’Israël », a-t-il déclaré. « Ensuite, cette situation exige que je fasse une pause dans mon rôle au sein de l’organisation tant que le nuage ne se sera pas dissipé. »

Vendredi matin, un groupe de survivantes de violences sexuelles et deux membres de la Knesset ont appelé à ce que le Prix d’Israël ne soit pas remis à Meshi-Zahav.

Magen for Jewish Communities, une organisation à but non-lucratif qui soutient les survivantes de violences sexuelles, a estimé que les agressions présumées étaient particulièrement choquantes au vu du statut de Meshi-Zahav au sein de la communauté. Le groupe a demandé que le ministre de l’Éducation Yoav Gallant et les membres du jury du prix d’Israël « fassent la seule chose à faire en annulant sans délai le prix qui a été remis à Yehuda Meshi-Zahav ».

Il s’est insurgé contre l’idée que « la victime reste sur le bas de la route, saignante, alors que lui, l’agresseur, est honoré et remporte un prix au nom des Israéliens. »

« C’est toujours incroyablement douloureux d’entendre ces histoires terribles d’agressions sexuelles de la part d’une personnalité à laquelle sa victime faisait confiance », a déclaré la directrice du groupe, Shana Aaronson, au Times of Israël. « Dans le cas de Yehuda Meshi-Zahav, un grand nombre de personnes, au sein de la communauté, trouvent incompréhensible d’imaginer qu’un homme si connu et si apprécié puisse être capable de commettre des actes aussi horribles contre des enfants et contre des adultes vulnérables. »

« Même s’il est difficile d’entendre ces accusations, il est encore plus difficile de les avoir vécues. En tant que communauté, nous devons nous rassembler autour des victimes dont les vies ont été dévastées non seulement par les violences, mais aussi par le traumatisme secondaire d’avoir été victimes d’un homme connu et considéré par de nombreuses personnes comme un héros », a poursuivi Aaronson.

La dirigeante du Parti travailliste, Merav Michaeli, a elle aussi appelé Gallant à geler jusqu’à la fin de l’enquête la remise du prix qui devait être remis à Meshi-Zahav.

« Ce sont des témoignages difficiles et choquants. Je crois les victimes qui ont courageusement révélé le mal qui leur a été fait », a-t-elle écrit sur Twitter, ajoutant que le Parti travailliste dévoilerait dès la semaine prochaine son plan pour « éliminer les violences sexuelles en Israël ».

Tamar Zandberg, députée de la Knesset, a demandé que le Prix d’Israël soit retiré au rabbin, qualifiant les témoignages à son encontre de « nauséabonds » et ajoutant que l’homme « s’est révélé comme un prédateur cruel qui n’est assurément pas digne du Prix d’Israël. »

Elle a déclaré : « Aux nombreuses victimes qui ont choisi d’exposer ces faits avec bravoure, ce qui n’est pas facile – sachez que je vous crois. »

Mais Meshi-Zahav a fini par renoncer de lui-même au prix.

Pour sa part, le rabbin Yuval Cherlow, fondateur de l’organisation rabbinique Tzohar, a déclaré que les accusations étaient graves et qu’une enquête complète devait être menée, tout en recommandant de s’abstenir de juger immédiatement Meshi-Zahav.

« Lorsqu’une plainte pour violences sexuelles est révélée – ne faites pas de jugement », a-t-il écrit pour le site Srugim. « Nous ne croyons pas encore que tout se soit absolument passé et nous croyons plutôt avec certitude qu’il faudra enquêter sur toutes ces accusations. »

Appelant à soutenir pleinement les victimes présumées, il a averti que « la petite chance qu’il s’agisse d’accusations mensongères nous oblige à permettre à [Meshi-Zahav] de s’exprimer, de se défendre, et de l’écouter pleinement ».

Meshi-Zahav a été accusé jeudi d’agression sexuelle, de viol, et d’abus par six personnes dans un article publié par le quotidien Haaretz, qui a indiqué que le nombre de cas était probablement bien supérieur.

Yehuda Meshi-Zahav, président de l’organisation d’intervention d’urgence ZAKA, le 4 février 2010. (Crédit : Yaakov Naumi/Flash90)

Les accusations proférées à l’encontre de Yehuda Meshi-Zahav ont été émises par des hommes et des femmes. Certains étaient mineurs au moment des faits présumés.

Meshi-Zahav est une éminente personnalité de la communauté ultra-orthodoxe qui, au début du mois, a reçu le Prix d’Israël récompensant son travail de toute une vie. ZAKA fait partie des services d’urgence majeurs en Israël comme à l’étranger.

Meshi-Zahav aurait profité de son statut, de son pouvoir, de son argent et même de l’organisation pour se livrer à des agressions sexuelles, a noté l’article d’Haaretz.

Une victime présumée a déclaré qu’elle avait été déshabillée de force par l’homme et que ce dernier l’aurait violée après lui avoir offert une aide financière. La femme a indiqué que, pendant l’agression, Meshi-Zahav l’avait menacée, lui disant : « Si tu parles, une jeep de ZAKA va te rouler dessus. »

Un homme a affirmé que Meshi-Zahav avait abusé de lui quand il était adolescent et qu’il n’avait réalisé que des années plus tard qu’il avait été son « escort, son prostitué dans tous les sens du terme », a-t-il confié à Haaretz.

L’article a noté que plusieurs autres femmes avaient indiqué qu’il s’était masturbé devant elles et qu’elles avaient été victimes d’attouchements.

Sur les six témoignages présentés, le plus ancien date de 2003 et le dernier de 2011. Le reportage ajoute que de nombreux résidents de plusieurs quartiers ultra-orthodoxes de Jérusalem avaient connaissance des actes commis par Meshi-Zahav mais qu’ils n’ont rien dit et qu’ils n’ont rien fait savoir aux autorités.

Photo d’illustration : Des bénévoles de ZAKA sur les lieux d’un accident à Beit Shemesh, le 18 janvier 2018. (Crédit : Yaakov Lederman/Flash90)

Au moins une de ces affaires avait toutefois été remise entre les mains de la police, mais le dossier avait été fermé pour manque de preuves en 2014.

Le dossier avait aussi impliqué les frères de Meshi-Zahav, Moshe et Rami. Rami avait finalement été condamné pour viol puis emprisonné, a noté le journal.

Moshe et Yehuda étaient soupçonnés d’agressions contre des jeunes filles de 16 ans, et Yehuda était aussi soupçonné de viol – ce qu’il a nié. Moshe avait fui le pays après l’ouverture du dossier et est revenu au sein de l’État juif il y a quelques mois, mais est décédé depuis.

Les enquêteurs s’étaient tournés vers une autre victime de viol présumée, une femme d’une vingtaine d’années, qui avait refusé de porter plainte – tout comme les autres femmes qu’il était soupçonné d’avoir agressées dans le dossier. L’enquête avait été fermée et son existence n’avait jamais été rendue publique.

Yehuda Meshi-Zahav. (Autorisation : ZAKA)

Meshi-Zahav a nié ces accusations, disant au journal qu’elles étaient « sans fondement » et qu’elles entraîneraient des « dégâts irrévocables » pour sa bonne réputation.

Au début du mois, Meshi-Zahav avait reçu le Prix d’Israël récompensant son travail de toute une vie pour ses contributions apportées à la société israélienne.

Le ministre de l’Éducation, Yoav Gallant, avait annoncé que le prix serait remis à Meshi-Zahav pour ses décennies de travail au sein de ZAKA.

Le comité de sélection du prix avait noté dans une déclaration que Meshi-Zahav avait apporté une « contribution exceptionnelle » aux services de secours et qu’il avait su créer une unité au sein de la société israélienne, tout en affichant « une croyance authentique dans la nécessité de construire des passerelles et d’assurer le dialogue ».

Meshi-Zahav dirige ZAKA depuis trois décennies. L’organisation est devenue un élément essentiel des services d’urgence israéliens, dans le pays et à l’étranger, disait la déclaration, et le rabbin « est un exemple et un modèle de l’esprit du bénévolat au sein de la société israélienne, sous toutes ses formes ».

Meshi-Zahav avait aussi fait les gros titres au mois de janvier, quand ses parents étaient tous les deux décédés de la COVID-19 à quelques jours d’intervalle, et moins d’un mois après la mort de son petit frère – mais d’une cause différente.

Il a été un critique virulent de certaines autorités ultra-orthodoxes pendant la pandémie, qui ont minimisé l’importance du virus. Il a notamment condamné les responsables haredim dans un entretien accordé au Times of Israël au mois d’octobre.

Fondée en 1989, ZAKA est un des services d’urgence les plus identifiables en Israël et le groupe est intervenu au cours de différentes catastrophes naturelles dans d’autres pays.

En plus d’offrir des services d’urgence et d’aider dans les opérations de recherche et de sauvetage, ZAKA intervient aussi pour aider et identifier les cadavres suite à des attentats terroristes, des crashs aériens et autres catastrophes.

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