Le génocide commis par l’EI, première préoccupation de Washington
“L'EI est clairement responsable de génocide à l'encontre des yézidis, des chrétiens et des musulmans chiites”, a déclaré Rex Tillerson
« Génocide » commis par l’Etat islamique (EI), discriminations à travers le monde, « rhétorique anti-musulmans » dans certains pays européens : les Etats-Unis ont publié mardi leur rapport sur la liberté religieuse, le premier sous la présidence de Donald Trump, lui-même décrié pour son message parfois hostile aux musulmans.
Comme chaque année, ce panorama sur les entraves à la liberté de culte et de croyance dans près de 200 pays, qui porte sur 2016, dresse un sombre tableau.
« Près de 80 % de la population mondiale sont confrontés à des restrictions ou des actes hostiles qui limitent leur liberté religieuse », a déclaré le secrétaire d’Etat américain Rex Tillerson en présentant le rapport à Washington. « Les persécutions et l’intolérance religieuses restent bien trop répandues », a-t-il insisté, promettant d’agir contre ces situations.
Selon l’ambassadeur Michael Kozak, du bureau de la démocratie, des droits de l’Homme et du travail au département d’Etat, s’attaquer à ces violations des droits « réduit les risques de guerre civile et de recrutement par des groupes terroristes » et est donc dans « l’intérêt national » des Etats-Unis.
Comme l’an dernier, le département d’Etat américain a choisi de mettre l’accent sur les « atrocités » commises par le groupe jihadiste Etat islamique (EI) en Irak et en Syrie.
« Alors que nous progressons dans notre campagne pour battre l’EI », « ses membres terroristes ont ciblé et continuent de cibler de nombreux groupes religieux et ethniques, par le viol, les enlèvements, l’esclavage et même la mort », a dénoncé Rex Tillerson.
Le chef de la diplomatie a voulu « lever toute ambiguïté par rapport à des déclarations ou rapports précédents du département d’Etat » : « l’EI est clairement responsable de génocide à l’encontre des yézidis, des chrétiens et des musulmans chiites ». Il s’est appuyé sur les « trois éléments » qui définissent le crime de génocide, à savoir « des actes précis, avec l’intention spécifique de détruire totalement ou en partie un peuple spécifique. »
« La protection de ces groupes – et d’autres qui sont la cible de l’extrémisme violent – demeure une priorité de l’administration Trump en matière de droits de l’Homme », a-t-il assuré.
Pas de sanctions immédiates
Pendant sa campagne, le candidat Trump a été critiqué pour avoir appelé à surveiller les mosquées aux Etats-Unis et promis d’interdire l’entrée dans le pays aux musulmans. Une fois à la Maison Blanche, une de ses mesures les plus controversées a été un décret censé prévenir l’arrivée de « terroristes étrangers », qui interdit temporairement l’entrée aux Etats-Unis aux ressortissants de six pays musulmans (Syrie, Libye, Iran, Soudan, Somalie et Yémen), ainsi qu’aux réfugiés du monde entier.
Interrogé sur ces prises de position, l’ambassadeur Kozak a simplement assuré que les Etats-Unis avaient une « longue tradition » de liberté religieuse.
Le rapport publié mardi recense les discriminations contre les musulmans et l’antisémitisme en Europe, notamment en Hongrie où Washington a fait part de sa « préoccupation au sujet de la rhétorique anti-musulmans de la part de responsables du gouvernement » de Viktor Orban sur fond de crise migratoire.
L’administration américaine a aussi exprimé des « inquiétudes » s’agissant d’actes antisémites et de discrimination anti-musulmane en Allemagne, où une interdiction partielle du voile intégral islamique est en débat. Elle relève aussi les controverses en France autour d’une possible interdiction du burkini sur la plage.
Plusieurs pays sont plus durement épinglés, comme chaque année.
Parmi eux, des ennemis de longue date des Etats-Unis, comme l’Iran qui « continue de condamner à mort des personnes au nom de lois vagues sur l’apostasie », a déploré Rex Tillerson. En Chine, « le gouvernement torture, arrête et incarcère des milliers de personnes pour avoir pratiqué leurs croyances religieuse », a-t-il ajouté.
Mais des alliés sont aussi pointés du doigt, comme l’Arabie saoudite, où « le gouvernement ne reconnaît pas le droit des non musulmans à pratiquer leur religion en public », ou le Pakistan, « où plus d’une vingtaine de personnes sont dans les couloirs de la mort ou emprisonnées à vie pour blasphème ».
Le rapport se borne toutefois à fournir un état des lieux à l’administration et au Congrès, ce qui n’implique pas de sanctions immédiates.