« Le Hezbollah a conquis le nord » : Tikva Hadasha fustige un gouvernement « incapable »
Au lendemain de la tragédie de Majdal Shams, une ex-élue du Likud dit avoir prédit un "désastre", accuse son ancien parti de ne savoir ni gouverner, ni gérer la guerre efficacement
Le gouvernement d’extrême droite du Premier ministre Benjamin Netanyahu est bien connu pour la rhétorique belliqueuse de ses membres, avec un cabinet de ministres suggérant périodiquement diverses mesures allant de l’utilisation d’armes nucléaires dans la bande de Gaza à obliger les Palestiniens à émigrer.
Mais si la rhétorique est résolument agressive, la députée de Tikva Hadasha, Sharren Haskel, estime que les actions du gouvernement reflètent une « politique de capitulation et de faiblesse » qui a favorisé à la fois les attaques extérieures et l’agitation interne.
S’adressant au Times of Israel cette semaine, l’ancienne députée du Likud, aujourd’hui membre de l’aile droite de l’opposition, a critiqué son ancien parti de manière cinglante, le jugeant est « incapable » de relever les défis auxquels Israël est confronté et l’accusant d’avoir abandonné le terrain aux groupes terroristes du Hamas dans le sud et du Hezbollah dans le nord.
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Haskel s’est exprimée avant la frappe israélienne de mardi à Beyrouth qui a éliminé Fuad Shukr, le principal commandant militaire du groupe chiite libanais du Hezbollah et bras droit du chef terroriste Hassan Nasrallah, et avant l’assassinat du chef politique du groupe palestinien du Hamas, Ismail Haniyeh, à Téhéran, dans une frappe qui a été attribuée à Israël tôt dans la journée de mercredi.
Dans un communiqué de suivi, la législatrice de droite a déclaré que ces décès devraient envoyer un « message clair » aux ennemis d’Israël : « Si vous attaquez Israël, si vous blessez nos citoyens et les assassinez de la manière la plus monstrueuse qui soit, vous n’aurez nulle part où vous cacher ». Elle n’a pas précisé si ces événements avaient modifié sa position sur la compétence du gouvernement.
Adepte autoproclamée de l’idéologie sioniste révisionniste des fondateurs du Likud, Haskel a quitté le parti pour se joindre au parti Tikva Hadasha de Gideon Saar fin 2020, se plaignant à l’époque d’un « grand fossé entre ces idées et les valeurs et normes qui caractérisent le Likud aujourd’hui. »
Les quatre députés de Tikva Hadasha ne sont « pas dans l’opposition pour le plaisir d’être dans l’opposition », a expliqué Haskel au Times of Israel sur les relations de son parti avec la coalition actuelle dirigée par le Likud.
Lorsque le conflit a éclaté en octobre, Tikva Hadasha a rejoint la coalition de guerre dans le cadre de son alliance avec HaMahane HaMamlahti et Benny Gantz. Il a mis fin à son union avec Gantz, avant de quitter la coalition en mars, estimant qu’il n’avait pas les moyens d’influer sur la gestion du conflit par le gouvernement.
Son avenir politique actuel n’est pas clair. Selon les sondages actuels, le parti Tikva Hadasha serait exclu de la Knesset s’il se présentait seul aux prochaines élections, mais il pourrait faire partie de la plus grande faction de la Knesset s’il s’alliait avec d’autres partis de droite.
« Nous sommes dans l’opposition face à l’un des pires gouvernements que nous aurions pu avoir à un moment aussi difficile et éprouvant pour notre pays », a affirmé Haskel. « Nous nous opposons au gouvernement parce que sur le plan militaire et sécuritaire, nous estimons qu’il n’est pas assez déterminé et que sa stratégie n’est pas assez ciblée pour réellement parvenir à éliminer le Hamas ».
Le gouvernement maintient que seule la pression militaire permettra de libérer les otages encore à Gaza, mais de « ce que nous avons pu constater ces quatre-cinq derniers mois, c’est un cessez-le-feu discret », a-t-elle déclaré, ajoutant que « le fait d’avoir un gouvernement incapable de gérer la situation est notre plus grande responsabilité ».
Haskel a fait le lien entre cette « incapacité » et l’attaque à la roquette survenue le week-end dernier dans le village de Majdal Shams, dans le nord du pays, au cours de laquelle 12 enfants et adolescents ont été tués par une roquette du Hezbollah, ainsi que les émeutes dans deux bases de Tsahal par des militants d’extrême droite et des législateurs lundi, suite à l’arrestation de soldats soupçonnés d’avoir violenté des détenus de la bande de Gaza.
De par sa capacité à poursuivre ses assauts quotidiens sur le nord d’Israël depuis octobre, « le Hezbollah a conquis le nord d’Israël », a-t-elle affirmé. « La tragédie de Majdal Shams aurait pu être évitée si la politique du gouvernement avait visé à empêcher le Hezbollah de prendre le dessus sur le plan militaire et à lui tirer dessus. »
Depuis le 8 octobre, des terroristes dirigés par le Hezbollah lancent des attaques quasi-quotidiennes contre des communautés israéliennes et des positions militaires le long de la frontière. Ces attaques ont contraint des dizaines de milliers de résidents à quitter leur domicile. À ce jour, les affrontements ont causé la mort de 25 civils du côté israélien, ainsi que de 18 soldats et réservistes de Tsahal.
Bien qu’Israël ait répondu en nature aux attaques et tué près de 400 membres du Hezbollah, il n’a pas réussi à mettre fin aux attaques, et les dirigeants hésitent à lancer une campagne de grande envergure parallèlement à la guerre dans la bande de Gaza.
« J’ai averti la Knesset à plusieurs reprises que la politique de capitulation et de laxisme ne devait pas être poursuivie, j’ai mis en garde contre un désastre et j’ai expliqué qu’il fallait répondre à chaque tir », a déclaré Haksel. « Douze enfants ont été assassinés de sang-froid et le prix à payer doit être réel. Ce n’est pas à cela que ressemblent la dissuasion et la victoire ».
Évoquant les attaques menées par des foules d’extrême droite contre les bases de Sde Teiman et de Beit Lid, Haskel a indiqué que « le pire gouvernement de l’histoire d’Israël a perdu le contrôle, et le chaos qui s’en est suivi est le résultat de son échec ».
Bien qu’il soit « difficile » d’arrêter des soldats suspects en temps de guerre, Haskel a affirmé qu’il « y avait des moyens de gérer [cette situation] ou de modifier les procédures conformément à la loi ». La barre est entre leurs mains et au lieu de diriger le navire, ils sautent par-dessus bord et entraînent avec eux tous les passagers ».
Le gouvernement sait et dit « ce qui devrait se passer », a-t-elle ajouté, « mais ils sont aux commandes et ne le font pas. Et je pense que c’est là notre plus grande frustration : lorsqu’ils disent quelque chose, et comment cela devrait être géré, mais qu’ils font exactement le contraire ».
Selon Haskel, cette mauvaise gestion s’étend au-delà de la guerre et affecte des questions allant de l’économie à la réforme du système judiciaire.
« Ils avaient dit qu’une refonte du système judiciaire était essentielle. Nous etions d’accord », a-t-elle déclaré, rappelant les efforts déployés par le chef du parti et ancien ministre de la Justice Saar pour, entre autres, scinder le rôle du procureur général en deux postes.
Malgré cela, les efforts déployés par le gouvernement actuel en 2023, qui ont provoqué de profondes divisions au sein de la société israélienne, pour remédier à ce que de nombreuses personnes de droite considèrent comme un système défectueux, semblent davantage viser à retirer du pouvoir au système judiciaire pour le donner à l’exécutif.
Si Haskel et ses collègues de Tikva Hadasha estiment que de nouvelles élections sont nécessaires pour déloger Netanyahu, elle a, malgré tout, exprimé une certaine réserve, avertissant que le faire prématurément, alors que les combats se poursuivent, pourrait « mettre en péril la sécurité d’Israël. »
Tikva Hadasha est actuellement « en pourparlers pour créer un front uni » à droite, mais la question n’est pas seulement de savoir combien de sièges un tel bloc de droite obtiendrait, mais aussi qui le dirigerait, a expliqué Haskel. Elle a insisté sur le fait que seul Saar, avec son expérience des négociations de coalition, pourrait mener une telle liste et que « la seule alternative au Likud est Tikva Hadasha ».
Des sondages récents indiquent qu’une nouvelle alliance de droite comprenant Saar, le leader de Yisrael Beytenu Avigdor Liberman, l’ancien Premier ministre Naftali Bennett et l’ancien chef du Mossad Yossi Cohen pourrait devenir le plus grand parti de la Knesset avec 27 à 32 sièges.
Mais Cohen aurait décidé de ne pas entrer en politique et il est peu probable que Saar, moins populaire, beneficie du soutien les autres et se voit confier la direction d’une alliance électorale – un fait dont il semble bien conscient, puisqu’il s’est dit prêt à faire des « concessions » pour créer un bloc de droite qui s’opposerait à Netanyahu.
Interrogé sur les différences entre son parti et le Likud, Haskel a répondu que « nous ne nous contentons pas de parler de certaines réformes ou de certains changements. Nous ne promettons pas des rêves que nous ne pourrons pas réaliser, mais nous promettons des choses qui sont au cœur idéologique de la droite ici en Israël, des choses que nous savons comment réaliser ».
« Nous allons devoir rétablir la sécurité, notre pouvoir de dissuasion, l’économie et le tissu social ».
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