Le président israélien invite la Croatie à « faire face à son passé »
"La Croatie est capable de faire face au passé et ne pas l'ignorer est une obligation morale qui constitue une composante fondamentale de toute société juste", a affirmé Rivlin
Le président israélien Reuven Rivlin a insisté mercredi sur la nécessité pour la Croatie de « faire face à son passé », lors d’une visite au mémorial des victimes du camp d’extermination de Jasenovac, considéré comme l' »Auschwitz croate ».
Le gouvernement croate a été critiqué pour la faiblesse de sa riposte aux discours de haine et expressions de soutien au régime pro-nazi oustachi durant la Seconde Guerre mondiale qui a massacré serbes, juifs, roms et opposants croates au camp de Jasenovac.
« Certains préfèrent refouler leur passé et le considérer comme un ‘trou noir’ ne nécessitant aucune étude ou introspection », a déclaré en hébreu M. Rivlin devant le monument du mémorial, à 100 km au sud-est de Zagreb.
« La Croatie est capable de faire face au passé et ne pas l’ignorer est une obligation morale qui constitue une composante fondamentale de toute société juste », a-t-il poursuivi, selon une traduction officielle.
Cela « continuera de représenter un élément important de l’amitié entre la Croatie et Israël », a ajouté le président israélien.
M. Rivlin, arrivé à Zagreb mardi pour une visite de deux jours, était accompagné de son homologue croate Kolinda Grabar-Kitarovic. Tous deux ont visité le musée du camp et déposé des gerbes devant le mémorial. M. Rivlin a également récité une prière juive traditionnelle.
Mme Grabar-Kitarovic a exprimé sa profonde sympathie pour les victimes du régime oustachi.
« Aucun objectif ou régime politique ne peut justifier les crimes commis en son nom », a-t-elle déclaré, s’engageant à continuer à prendre soin de « la mémoire collective des crimes commis ici ».
La présidente croate en photo avec un blason oustachi
Depuis trois ans, la communauté juive, la minorité serbe et des associations antifascistes boycottent la cérémonie officielle annuelle en mémoire des victimes du camp de Jasenovac pour reprocher aux autorités leur mansuétude face à un regain de l’idéologie des Oustachis dans le pays.
Les associations de victimes ont été particulièrement indignées par la pose près du mémorial en novembre 2016 d’une plaque commémorative frappée du slogan du régime oustachi, « Za Dom Spremni », « Prêts pour la patrie ». Déposée par des vétérans d’une formation paramilitaire, HOS, la plaque a été éloignée à une dizaine de km un an plus tard.
En Croatie, le virage à droite inquiète ; Salut oustachi face à Israël
Les relations israélo-croates se sont améliorées après la mort en 2000 du président Franjo Tudjman qu’Israël accusait de ne pas dénoncer suffisamment le régime oustachi sous lequel environ 75 % des quelque 40 000 juifs de Croatie ont été assassinés.
Mis en place en 1941, Jasenovac était un « système de détention » composé de cinq grands camps de concentration et de plusieurs plus autres petits, sur un espace de plus de 200 km2.
Les estimations du nombre de victimes de Jasenovac, où des personnes ont été tuées à l’aide de marteaux, de couteaux et de pierres, varient d’environ 82 000 selon le musée du camp à 700 000 selon les sources serbes. Le musée du Mémorial de l’Holocauste à Washington l’évalue à 100 000.