Les familles de soldates tuées le 7 octobre se rendent sur la base Nahal Oz
Un père, visitant ce qui reste du centre de commandement de la base militaire qui a été prise d'assaut par le Hamas, a estimé que l'armée a "abandonné" ses soldats
Un groupe de proches de soldates chargées de la surveillance au sein de Tsahal et autres troupes tuées pendant l’assaut du 7 octobre, quand les terroristes du Hamas avaient attaqué la base de Nahal Oz, ont visité cette dernière et son centre de commandement incendié mardi. Un parent a déploré une sécurité minimale ajoutant que des protocoles sécuritaires plus stricts auraient pu permettre à de nombreuses personnes de survivre.
La visite de cette base dorénavant abandonnée, à proximité de la frontière avec Gaza, a été organisée par l’armée – avec les toutes premières images du centre de commandement détruit, noir de suie, qui ont fait leur apparition. C’est là que plus d’une dizaine de jeunes soldates avaient été tuées.
« L’armée a probablement voulu se rapprocher un peu des familles », a commenté Eyal Eshel, le père d’une soldate de surveillance, Roni Eshel, qui a été portée-disparue pendant un mois après l’attaque avant d’être déclarée morte.
S’exprimant devant les caméras de la chaîne Kan, Eshel a indiqué qu’il avait déjà visité la base cinq jours après l’attaque « quand il y avait encore des véhicules militaires sur la route qui étaient criblés de balle, et des cadavres qui étaient dégagés », avec des explosifs laissés sur les lieux par les terroristes au moment où les différents pièges étaient enlevés.
« Cela ressemblait à un camp de concentration », a-t-il ajouté.
L’attaque commise sur la base Nahal Oz, située à moins d’un kilomètre de la frontière avec Gaza, était survenue au début de l’assaut meurtrier perpétré par le Hamas – lorsque près de 3 000 terroristes avaient franchi la frontière avec la bande de Gaza par voie maritime, aérienne et terrestre sous couvert de milliers de roquettes. Ils avaient infiltré plus de 20 communautés de tout le sud du pays, tué plus de 1 200 personnes et kidnappé environ 240 otages. Des familles avaient été massacrées dans leurs habitations, devant leurs êtres chers et 364 personnes avaient été froidement abattues à une rave-party.
Pendant l’attaque commise sur la base, 15 soldates chargées de la surveillance avaient été tuées et six avaient été prises en otage. Au total, 66 soldats sont morts dans cette attaque.
Visitant les vestiges brûlés du centre de commandement, mardi, aux côtés d’autres proches endeuillés, Eshel a dit au site d’information Ynet que « c’est une vision difficile pour nous tous. Les filles étaient là depuis 6 heures 30 du matin et pendant six longues heures, personne n’est venu les secourir, personne n’est venu les aider. C’est incompréhensible ».
« Les parents ont pleuré. On a vu les postes de travail des filles. Ce qui était, dans le passé, un centre de commandement à la pointe de la technologie, on a bien vu comment tout a été incendié. On a allumé des bougies en leur mémoire », a dit Eshel.
Lior Glass, le père de Yam Glass, soldate de surveillance, a raconté à Ynet : »J’ai ressenti une grosse boule à l’estomac. Ma fille a été brûlée vive ici. Aujourd’hui, nous avons constaté de notre propres yeux ce qui nous avait été dit. C’est bouleversant et malheureux ».
Mais Eshel a fait aussi part de sa colère.
« Ce que nous avons compris, c’est que la salle des communications était fermée. Si elle avait été ouverte, nos chères filles auraient pu y rentrer et elle s’y seraient enfermées ; peut-être seraient-elles encore en vie, aujourd’hui », a-t-il indiqué.
« Il n’y avait pas de protocoles sur la base [dans un scénario de tentative d’infiltration] ; il n’y avait pas de mesure de sécurité ou d’outils anti-incendie, même pas de système d’extincteur. Quelles chances avaient-t-elles donc de survivre ? Nos soldates de surveillance ont été abandonnées », a-t-il estimé.
Une enquête militaire sur l’origine de la mort des soldates de surveillance a révélé qu’un grand nombre d’entre elles ont été tuées par un gaz toxique qui a entraîné une perte de conscience et des suffocations seulement quelques minutes après qu’il a commencé à se dégager, a signalé la Douzième chaîne, la semaine dernière.
Les premières conclusions de l’enquête auraient indiqué qu’une substance inflammable mais toxique dont le nom n’avait pas été précisé avait apparemment été jetée à l’entrée du bâtiment qui accueillait le centre de commandement des soldates de surveillance où 22 personnes se cachaient, tentant de trouver malgré tout une voie de sortie.
Arrivées à la sortie de secours, les soldats avaient néanmoins réalisé que la porte était en feu et qu’il n’y avait aucun moyen de l’ouvrir, voire de seulement s’en rapprocher. Ceux qui étaient encore capables de tenter de sortir s’étaient finalement rendus aux toilettes, où une petite fenêtre, en haut du mur, ouvrait vers l’extérieur.
L’un des soldats était parvenu à casser la fenêtre. Il avait réussi à quitter le bâtiment avec cinq autre officiers et une soldate de surveillance.
S’exprimant devant les caméras de la Douzième chaîne, Eshel a affirmé qu’un plus grand nombre de vies auraient pu être sauvées s’il y avait eu une échelle de secours dans les toilettes.
Les soldates de surveillance appartiennent au Corps des renseignements de combat et elles travaillent le long des frontières du pays, ainsi que dans toute la Cisjordanie.
Considérées par un grand nombre comme « les yeux de l’armée », elles fournissent des informations en temps réel aux soldats sur le terrain, 24 heures sur 24 et sept jours sur sept.
Au moins trois mois avant l’attaque meurtrière, les soldates stationnées à Nahal Oz avaient fait savoir qu’elles observaient des événements inhabituels à la frontière de Gaza, déjà agitée, selon des survivants de l’assaut qui se sont exprimés auprès des médias au mois d’octobre.
Parmi les activités rapportées par les soldates, des informations sur des sessions d’entraînement des hommes du Hamas qui étaient organisées plusieurs fois par jour – où les terroristes creusaient des trous et plaçaient des explosifs le long de la frontière. Selon les témoignages qui ont été rapportés, aucune action n’a été prise par leurs supérieurs suite à ces signalements, qui ont été considérés comme sans importance par les responsables des renseignements.
Les soldates ont déclaré, le mois dernier, au site Haaretz qu’elles pensaient que le sexisme avait tenu un rôle dans cette absence de prise au sérieux de leurs avertissements.