L’escalade avec le Hezbollah, nouvelle épreuve pour les Israéliens déplacés du nord
"Personne ne me garantit que ce qui est arrivé le 7 octobre l'année dernière ne se reproduira pas dans le nord", dit Menahem Sharon, un habitant

« Je pense qu’il faudra encore un an pour que nous puissions rentrer chez nous » à Kiryat Shmona, ville du nord d’Israël proche du Liban, prédit Menahem Sharon. Comme d’autres habitants déplacés par les tirs de roquettes du Hezbollah, il s’attend à une nouvelle guerre contre le groupe terroriste chiite libanais pro-iranien dans le pays voisin.
Les échanges de tirs quotidiens entre le groupe terroriste chiite libanais du Hezbollah et l’armée israélienne se sont fortement intensifiés ces derniers jours.
« Ça donne l’impression que nous allons peut-être partir en guerre, mais qu’après nous pourrons rentrer chez nous », projette Sharon, réfugié depuis quelques mois à Yokneam Illit, dans la région de Haïfa, troisième ville du pays.
Depuis le début de la guerre contre le groupe terroriste palestinien du Hamas dans la bande de Gaza guerre déclenchée par le pogrom perpétré par ce dernier le 7 octobre sur le sol israélien, le Hezbollah tire des projectiles sur Israël, affirmant agir en soutien à son allié du Hamas.
Des dizaines de milliers d’habitants du nord proche de la frontière ont été évacués, et ils sont toujours près de 60 000 déplacés à l’intérieur du pays, selon des données officielles. De plus en plus de voix s’élèvent pour que le nécessaire soit fait pour leur permettre de rentrer chez eux.
Incertitude

« Nous avons ici une mission qui n’a pas été accomplie et cette mission consiste à faire évoluer la situation sécuritaire et à ramener les habitants dans leurs foyers » a déclaré le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant le 10 septembre.
Depuis, Tsahal a multiplié les frappes aériennes visant des sites du Hezbollah au Liban. Des bombardements de grande ampleur lundi ont fait au moins 558 morts selon les autorités libanaises – qui ne fait pas de distinction entre les civils et les terroristes -, bilan le plus lourd depuis la dernière guerre entre Israël et le Liban en 2006.
Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a déclaré dimanche que son pays ne pouvait « tolérer qu’on tire sur ses habitants » et qu’il était déterminé à agir pour le retour des personnes évacuées du nord. L’armée a elle indiqué que l’opération contre le Hezbollah allait se poursuivre et s’amplifier.
« Cela pourrait se terminer dans un mois, dans huit mois ou dans deux ans, on ne peut pas savoir ce qui va se passer », estime Sharon, un enseignant de 29 ans ayant déménagé près d’une dizaine de fois, changé de métier, et de quotidien depuis le début de la guerre à Gaza.
S’il a « encore envie de rentrer » chez lui, il anticipe des difficultés : « réparer les infrastructures », chasser « les cafards ou les rats » des maisons évacuées, et sécuriser la région.
« Personne ne me garantit que ce qui est arrivé le 7 octobre l’année dernière ne se reproduira pas dans le nord », dit-il en référence à l’assaut barbare et sadique du Hamas dans le sud d’Israël, qui a entraîné la mort de 1 200 personnes, principalement des civils, et l’enlèvement de 251 otages de tous âges, au milieu de nombreuses atrocités et en utilisant la violence sexuelle comme arme à grande échelle.
On estime que 97 des 251 otages enlevés par le Hamas le 7 octobre 2023 se trouvent toujours à Gaza, y compris les corps de 33 otages dont le décès a été confirmé par l’armée israélienne.
Le groupe terroriste palestinien détient également deux civils israéliens entrés dans la bande de Gaza en 2014 et 2015, ainsi que les corps de deux soldats tués en 2014.

« Montagnes émotionnelles »
Partagée entre ce même désir de retrouver sa vie d’avant et la conviction que tout a changé, Didi, une femme qui n’a pas voulu donner son nom, s’est installée dans la communauté de Klil, une trentaine de kilomètres au sud de sa maison du kibboutz d’Adamit, collé au Liban.
« Je n’ai absolument pas peur, mais c’est déprimant cette attente », affirme la professeure de théâtre et de yoga de 44 ans.
« Je crois que rien ne sera plus jamais comme avant en Israël, car ce qui s’est passé est trop fou. »
Comme beaucoup dans le pays, la guerre lui paraît inéluctable.
« Même si c’est triste, c’est quand même une bonne chose que Israël mène cette guerre et cela devait arriver de toute façon », estime Didi en précisant qu’elle n’a pas « la solution ».
Ajoutant à l’appréhension générale, les tirs de roquettes venus du Liban et les interceptions de la défense aérienne israélienne emplissent le ciel de détonations sourdes, tandis que vrombissent les avions militaires.
Ido Reuven, un guide touristique de 27 ans, a aussi quitté Kyriat Shmona pour se mettre à l’abri, et le village dans lequel il loue un appartement, Givat Avni, a été touché par une roquette lundi.

« Les jours à venir s’annoncent difficiles, mais il faut espérer que tout ira pour le mieux », avance-t-il, décrivant un quotidien sur « des montagnes russes émotionnelles ».