Manifestation contre la réforme judiciaire israélienne avant une audience clé
"Nous sommes ici pour essayer d'arrêter les tentatives de ce gouvernement corrompu de transformer Israël, une démocratie libérale, en un régime fasciste", a déclaré un manifestant

Plusieurs milliers de personnes manifestent lundi soir à Jérusalem devant la Cour suprême contre la refonte judiciaire controversée, à la veille d’une audience de ce tribunal jugée cruciale pour la suite du processus, ont constaté des journalistes de l’AFP.
« Démocratie ! Démocratie ! » scandent les manifestants, brandissant des drapeaux israéliens.
« Nous sommes ici pour essayer d’arrêter les tentatives de ce gouvernement corrompu de transformer Israël, une démocratie libérale, en un régime fasciste », a déclaré à l’AFP Michael Elias, 42 ans, professeur de neurosciences.
« Je suis ici parce que je veux vivre dans un pays démocratique, je veux que mes enfants et mes petits-enfants puissent vivre la vie que nous avons espérée pour eux », a de son côté déclaré Miriam Galon, une retraitée venue de Givat Ela dans le nord d’Israël.
De nombreux lycéens étaient aussi présents à cette manifestation dont Lior, 17 ans, venue de Tel Aviv, pour qui « les jeunes doivent être dans la rue ».
« Il est temps de se réveiller, c’est à nous de défendre notre pays et nos droits », ajoute la jeune fille.
L’ex-ministre de la Justice, Tzipi Livni, a affirmé que le projet de refonte judiciaire du gouvernement avait révélé ses intentions « messianiques ».
« La différence entre le Premier ministre Benjamin Netanyahu et le député de Yahadout HaTorah Yisrael Eichler, c’est que l’un appelle déjà le pays un ‘ghetto juif’ et l’autre est sur le point de le faire si nous cessons le combat. » Livni faisait référence à la colère d’Eichler contre Netanyahu, dimanche, lorsque le Premier ministre avait dit : « Dieu n’a pas toujours protégé les Juifs en Europe », en demandant aux pèlerins de ne pas se rendre à Ouman en Ukraine. Eichler a répliqué que ce sont les sionistes qui ont tourné le dos aux « Juifs des ghettos ».
Livni a ajouté que si beaucoup disent « que nous sommes au bord de la crise constitutionnelle, la crise constitutionnelle est bel et bien là ».
L’annonce du projet gouvernemental début janvier a donné lieu à l’un des plus importants mouvements de contestation qu’ait connu le pays depuis sa création en 1948. Le camp des opposants à la réforme manifeste ainsi chaque samedi soir, principalement à Tel-Aviv, mais aussi dans de nombreuses villes du pays.
La Cour suprême doit tenir une audience exceptionnelle mardi en présence des 15 juges membres de cette cour afin d’examiner des recours déposés contre une première clause du projet de réforme adoptée par le Parlement en juillet.
Cette mesure empêche la Cour suprême d’invalider une décision gouvernementale en jugeant de son « caractère raisonnable ».
« Nous espérons que la Cour suprême va rejeter cette proposition qui n’a pas d’autre but que d’éliminer toute forme de pouvoir qu’elle devrait justement avoir », ajoute M. Elias.
Alors que les médias évoquent un accord de conciliation entre le gouvernement et l’opposition sur la poursuite de la réforme judiciaire, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a affirmé agir pour « parvenir à un consensus national qui rétablira l’équilibre entre les trois pouvoirs ».
Un peu plus tôt, le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir, du parti d’extrême-droite Force juive, avait déclaré être opposé à toute « capitulation ».
« Je suis pour le dialogue mais contre la capitulation […] cette réforme est importante pour l’Etat d’Israël », avait-il déclaré dans une vidéo diffusée par son bureau.
Le chef de l’opposition Yair Lapid avait de son côté mis en garde dimanche contre « une proposition de compromis trop belle pour être vraie ce qui en réalité signifie qu’elle est fausse. »
Selon le gouvernement, la réforme vise entre autres à rééquilibrer les pouvoirs, en diminuant les prérogatives de la Cour suprême au profit du Parlement.
Les opposants à la réforme craignent de leur côté que les changements proposés, en faisant sauter des garde-fous à l’action du pouvoir législatif et exécutif, ne fassent basculer la démocratie israélienne vers un système illibéral. Ils accusent M. Netanyahu, en procès pour plusieurs affaires de corruption, de conflit d’intérêts et de vouloir cette réforme pour se sortir de ses ennuis judiciaires.