Ministère de l’Éducation : le roman d’amour peut être étudié dans certaines classes
Les fonctionnaires reviennent sur l'interdiction du roman de Dorit Rabinyan, le programme n’inclut toujours pas ce livre
Le ministère de l’Education est légèrement revenu sur son annonce disant que le livre décrivant une histoire d’amour israélo-palestinienne avait été supprimé du programme des lycées, déclarant jeudi soir que l’étude du texte serait autorisée dans les classes de littérature avancée.
Cependant, le ministère a déclaré que le livre ne serait pas inclus dans la liste de lectures approuvées pour les études littéraires communes.
Le livre « Gader Haya » (la « barrière vivante »), de l’auteur israélienne Dorit Rabinyan, a été massivement demandé depuis son rejet par le ministère mercredi.
Le ministère de l’Education a déclaré que le livre avait été exclu de la liste de lecture malgré les demandes des enseignants, après avoir jugé son contenu non approprié aux lycéens.
Gader Haya, publié en 2014, raconte l’histoire d’amour entre Liat, traductrice israélienne et Hilmi, artiste palestinien qui tombent amoureux à New York mais se séparent ensuite ; elle retournant dans la ville israélienne de Tel Aviv et lui à Ramallah, en Cisjordanie.
Il touche à la question délicate des rapports intimes entre Israéliens juifs et Palestiniens, sur fond de conflit persistant depuis des décennies. Il faisait partie des vainqueurs du prix Bernstein pour les jeunes écrivains, un prix israélien annuel de littérature hébraïque.
« Les fonctionnaires ont discuté d’inclure le livre dans le programme, a déclaré le ministère dans un communiqué. Après avoir sérieusement examiné toutes les considérations, et pesé les avantages et les inconvénients, ils ont décidé de ne pas inclure le livre dans le programme. »
La responsable du ministère à l’origine de la décision a invoqué le danger que le livre de Dorit Rabinyan soit perçu comme encourageant les unions entre Israéliens et Palestiniens. De telles unions et la perte de l’identité juive sont deux craintes des juifs pratiquants.
Le ministre de l’Education Naftali Bennett, chef du parti nationaliste religieux HaBayit HaYehudi, a défendu la décision de ses services jeudi soir, tout en précisant ne pas y avoir pris part.
« Cela n’a rien à voir avec de la censure. Quiconque veut lire ce livre peut l’acheter », a-t-il déclaré à la Deuxième chaîne de télévision. Mais le ministère ne forcera pas des élèves à lire un livre qui présente les soldats israéliens comme des « sadiques » et les met sur un pied d’égalité avec les « terroristes » du mouvement islamiste palestinien Hamas, a-t-il ajouté.
L’auteure, Israélienne juive, a répondu en accusant Bennett de ne pas avoir lu le livre et de sortir les phrases de leur contexte.
Amos Oz, écrivain israélien, a ironisé vendredi sur l’exclusion des programmes scolaires du roman d’amour en écrivant qu’il faudrait mettre la Bible, encore plus subversive, au ban des études lycéennes.
« Peut-être vaudrait-il mieux supprimer les études littéraires des programmes, puisque la littérature mondiale et hébraïque la plus insigne recèle beaucoup de choses dérangeantes et pas vraiment casher », écrit Amos Oz dans le quotidien Yedioth Ahronoth.
« Il est même plus urgent de retirer du programme l’étude de la Bible : en matière de relations sexuelles entre juifs et gentils (terme désignant les non-juifs), la Bible est mille fois plus dangereuse que le livre de Rabinyan », raille celui qui passe pour l’écrivain israélien le plus connu.
« Le roi David et le roi Salomon étaient coutumiers de coucher avec des étrangères sans se soucier de vérifier leur nationalité sur leur carte d’identité », souligne Amos Oz.
Les ventes du livre ont augmenté spectaculairement à la suite de la décision du ministère.
« Jusqu’à présent, nous avons vendu 50 fois plus d’exemplaires qu’hier, et à la fin de la journée, cela pourrait être plus de 100 fois plus, a déclaré la chaîne de librairies Tzomet Sfarim. Les nombres croissent toutes les heures, et à la fin de la journée nous n’aurons probablement plus aucun exemplaire – comme c’est arrivé dans notre librairie du centre Dizengoff à Tel Aviv, par exemple. Nous en avons déjà redemandé à l’éditeur. »
La maison d’édition du livre, Am Oved, a déclaré que la demande était si importante qu’elle allait lancer une réimpression.