Opposition à l’installation de caméras sur le mont du Temple
Le ministre des Affaires étrangères de l’AP, le Hamas et les défenseurs juifs du mont du Temple dénoncent les mesures de surveillance proposées, chacun pour ses propres raisons
Elhanan Miller est notre journaliste spécialiste des affaires arabes
Moins de 24 heures après que le secrétaire d’Etat américain John Kerry a salué l’initiative de placer des caméras de surveillance 24h/24 sur le mont du Temple comme un moyen d’assurer le calme dans le lieu saint, dimanche, le ministre palestinien des Affaires étrangères Riyad al-Maliki a qualifié cette idée de « piège ».
S’exprimant à la radio palestinienne dimanche, M. Maliki a averti que les promesses du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu autorisant les Musulmans à prier le samedi au mont du Temple alors que les non Musulmans ne seraient autorisés qu’à le visiter n’étaient pas crédibles.
Netanyahu, dit-il, avait promis au roi Abdallah de Jordanie et à Kerry que les Musulmans se verraient accorder un accès illimité au mont du Temple avant le mois du Ramadan en juin dernier, mais ce n’était que pour limiter l’âge des hommes éligibles à l’entrée au-dessus de 40 ou 50 ans.
« Une fois de plus, nous tombons dans le même piège », a déclaré Maliki à la station de radio. « Nous ne pouvons pas faire confiance à Netanyahu ».
« Qui va surveiller les écrans de ces caméras ? Qui va enregistrer les mouvements de ces fidèles qui souhaitent entrer? Comment ces caméras seront-elles utilisées, et est-ce que les enregistrements seront utilisés plus tard pour arrêter les jeunes gens et les fidèles sous prétexte d’incitation ? », a demandé Maliki.
Dimanche, Netanyahu a promis une fois de plus de ne pas modifier le statu quo sur le mont du Temple en place, garantissant l’autorisation de prier pour les Musulmans et le droit de visite pour les non Musulmans.
Il a déclaré que les caméras aideraient à dissiper les accusations selon lesquelles Israël voudrait briser le statu quo, et a exprimé l’espoir que cela aiderait à apaiser les tensions dans la région.
Dans un message télévisé diffusé samedi, Netanyahu a déclaré qu’ « Israël continuera à appliquer sa politique de longue date: les Musulmans prient sur le mont du Temple et les non Musulmans le visitent ».
Maliki a cependant exigé que toutes les décisions concernant le mont du Temple fassent l’objet d’une résolution écrite au Conseil de sécurité des Nations Unies, et ne soient pas que des engagements verbaux du Premier ministre israélien.
Selon Kerry, l’ « excellente suggestion » de placer des caméras de surveillance 24h/24 sur le Mont du Temple est une idée du Roi Abdallah, et permettrait « une visibilité complète et une transparence » qui feraient office de « changement des règles du jeu pour décourager quiconque voudrait perturber la sainteté de ce site sacré ».
Ironie du sort, c’était la Jordanie elle-même qui avait condamné Israël pour avoir installé des caméras de surveillance sur le mont du Temple en décembre 2013 et qui avait demandé à Israël de les enlever.
« En ce jour du 8 décembre, la Jordanie rejette l’installation par Israël de caméras pour surveiller les représentants et les fidèles du Waqf, en particulier les femmes », avait alors déclaré Mohammad Momani, ministre de l’Information, à l’agence de presse de Petra.
Dimanche, un responsable du Fatah s’exprimant à la radio israélienne s’est moqué de l’idée que seules des caméras pouvaient assurer le calme, affirmant qu’Israël doit rétablir la situation qui existait sur le mont du Temple avant 2000, lorsque les surveillants du ministère jordanien des dotations (Waqf) décidaient de qui pouvait entrer ou ne pas entrer dans l’enceinte.
Aujourd’hui, les policiers israéliens placés à chacune des 10 portes du mont du Temple examinent les cartes d’identité de tous ceux qui souhaitent entrer et sont autorisés à interdire l’entrée de juifs ou de musulmans pour des mesures de sécurité.
Pendant ce temps, alors que ministre jordanien des Affaires étrangères Nasser Judeh a salué samedi la déclaration de Netanyahu, la qualifiant de « pas dans la bonne direction », le groupe terroriste palestinien du Hamas et les activistes juifs du mont du Temple ont accueilli cette nouvelle avec consternation.
« C’est une tentative abjecte de la part de Netanyahu, avec l’approbation américaine, de consolider le contrôle sioniste sur la mosquée al-Aqsa et de donner le droit à l’occupation d’autoriser et d’interdire aux Musulmans de prier à la mosquée al-Aqsa », affirme un communiqué du Hamas publié samedi.
Fawzi Barhoum, un porte-parole du Hamas, a affirmé que la déclaration de Kerry n’était qu’une « pathétique » tentative d’ « embellir le projet de judaïsation sioniste et de sauver Netanyahu de la crise dans laquelle il se trouve à cause de sa politique raciste et extrémiste ».
Le Hamas, qui a renversé l’Autorité palestinienne dans la bande de Gaza en 2007 et qui est considéré comme une organisation terroriste par les Etats-Unis et l’Union européenne, encourage depuis longtemps les Palestiniens vivant à Jérusalem et en Cisjordanie à perpétrer de violentes attaques contre les Juifs et les soldats israéliens.
La Coalition des organisations du Temple, une entité regroupant des groupes juifs militant pour le droit des Juifs à prier sur le mont du Temple, a publié un communiqué furieux dimanche suite à l’annonce de Netanyahu selon laquelle les Juifs ne seraient pas autorisés à prier sur le site.
« Le Premier ministre ne peut pas empêcher les Juifs de prier sur le mont du Temple », affirme le communiqué. « Empêcher les Juifs de prier sur le mont du Temple contredit la loi de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme des Nations unies selon laquelle Jérusalem est la capitale d’Israël ».
Les organisations ont interprété l’annonce de Kerry d’installer des caméras de surveillance comme une capitulation face aux exigences jordaniennes, les qualifiant de « remise des éléments de la souveraineté du gouvernement à une puissance étrangère ».
« Les ordres conditionnels jordaniens et palestiniens visant à réduire ces cruelles attaques terroristes… sont incompréhensibles », déplore la déclaration.