Refonte: Gantz propose de reprendre les négociations, le Likud rejette ses conditions
Le chef de HaMahane HaMamlahti a proposé de négocier sur la "raisonnabilité" en échange de l'acceptation par Netanyahu de n'adopter le reste de la réforme prévu que par consensus
Le chef du parti d’opposition, le député Benny Gantz a proposé mercredi d’entamer des négociations immédiates avec la coalition pour arriver à un consensus afin de modifier l’examen du critère juridique du « caractère raisonnable », alors que l’adoption d’un projet de loi visant à interdire son application au cabinet et aux décisions des ministres se rapproche à grands pas.
Il a toutefois conditionné cette offre à l’engagement du Premier ministre Benjamin Netanyahu de ne faire avancer les réformes judiciaires ambitieuses souhaitées par le gouvernement que par le biais d’un consensus, une condition que le Likud, le parti au pouvoir, a aussitôt rejetée.
« Je demande à Netanyahu et à tous les membres responsables de cette Chambre – vous avez le devoir national d’accepter la proposition », a déclaré Gantz lors d’une conférence de presse à la Knesset.
« Ce soir, nous pourrons nous réunir à la résidence présidentielle, où se sont déroulés les pourparlers de compromis avant qu’ils ne soient gelés en juin, et discuter de la mise en place d’un cadre convenu pour l’examen du « caractère raisonnable », d’une manière qui n’ouvrira pas la porte à la corruption et qui préservera les principes de la démocratie », a déclaré le chef de file du parti HaMahane HaMamlahti.
Ces propos sont intervenus une heure après que le président Isaac Herzog a conclu un discours devant le Congrès dans lequel il a promis de redoubler d’efforts pour parvenir à un consensus sur les réformes judiciaires, tout en louant la force et la résilience de la démocratie israélienne.
« En tant que président, je continuerai à faire tout ce qui est en mon pouvoir pour parvenir à un large consensus public et pour préserver, protéger et défendre la démocratie de l’État d’Israël », a déclaré Herzog.
Mais la difficulté de parvenir à ce consensus a été soulignée par le rejet par le Likud de la condition posée par Gantz, à savoir que tous les changements judiciaires futurs ne se fassent que par le biais d’un « consensus ».
« Il s’agit également de la condition sine qua non du dialogue, à savoir que le Premier ministre s’engage, en présence et avec le soutien du président, à ce que, si nous parvenons à des accords, les réformes de la justice et de la gouvernance ne soient dorénavant mises en œuvre que sur la base d’un large consensus, y compris tous les projets de loi discutés à la résidence présidentielle », a déclaré Gantz.
« Aucune autre législation ne sera avancée sans un large consensus », a-t-il ajouté.
En réponse, le Likud a reproché au chef de HaMahane HaMamlahti l’échec des négociations précédentes et a rejeté les conditions qu’il avait posées pour les reprendre.
« Nous nous attendions à une offre sérieuse. Malheureusement, nous avons reçu un autre diktat. Si Gantz souhaite sérieusement un dialogue et un compromis, il est invité au Bureau du Premier ministre ce soir », a déclaré le parti dans un communiqué.
Gantz a également été critiqué par les dirigeants des manifestations anti-gouvernement en cours, qui ont appelé les Israéliens à se rassembler jeudi soir « pour sauver le pays ».
« Seule une protestation déterminée et sans compromis empêchera la dictature », ont-ils déclaré dans un communiqué.
« Le temps est venu pour Gantz de comprendre que Netanyahu ment comme un arracheur de dents et qu’il veut transformer Israël en une démocratie dangereuse », ont-ils ajouté, faisant référence aux commentaires que le ministre d’extrême-droite des Finances, Bezalel Smotrich, avait faits au sujet du Premier ministre avant son retour au pouvoir l’année dernière.
Des sources au sein du parti Yesh Atid du leader de l’opposition Yaïr Lapid, qui a également pris part aux négociations judiciaires, ont déclaré que le parti n’avait pas l’intention de se joindre à Gantz pour demander la reprise des négociations. Gantz avait rompu son alliance avec Lapid en 2020 pour rejoindre un gouvernement dirigé par Netanyahu.
Dans ses remarques, Gantz a mis en garde contre les retombées si un accord n’était pas trouvé. Il a évoqué le prochain jeûne de Tisha BeAv, qui commémore la destruction du Second Temple, et a déclaré qu’Israël « était sur la voie de la destruction ».
« La situation en matière de sécurité est la plus difficile que nous ayons connue depuis la guerre froide, avec le danger d’une guerre sur des fronts à la fois proches et lointains. Le terrorisme frappe dans nos rues, nos ennemis reçoivent le mauvais message, ce qui érode notre capacité de dissuasion », a déclaré Gantz, ancien ministre de la Défense et chef d’état-major.
« Je suis très inquiet. Il s’agit d’un danger clair et immédiat », a-t-il ajouté, réitérant son opposition aux menaces des réservistes de cesser de se porter volontaires pour protester contre la réforme.
Quelques heures avant qu’il ne prenne la parole, des centaines de réservistes ont signé une déclaration dans laquelle ils s’engagent à ne pas se porter volontaires en signe de protestation contre la refonte.
Gantz a salué le discours prononcé mercredi par Herzog lors d’une session conjointe du Congrès américain, tout en soulignant les récentes frictions entre le gouvernement Netanyahu et l’Administration de Biden au sujet de la refonte et de la politique israélienne en Cisjordanie.
« Non seulement notre sécurité a été mise à mal, mais aussi notre force diplomatique », a déclaré Gantz. « Israël ne peut pas perdre ses atouts stratégiques. »
Il a également souligné l’augmentation du coût des biens et des services, la montée des crimes violents et a déclaré que la « résilience interne » du pays avait été mise à mal par la coalition actuelle, qui comprend, outre le Likud de Netanyahu, des partis ultra-orthodoxes et d’extrême-droite.
« Israël gagnera n’importe quelle guerre contre n’importe quel ennemi, à l’exception d’une guerre civile dans laquelle nous serons tous perdants », a averti Gantz.
« La désintégration de la société israélienne est la plus grande menace à laquelle nous ayons été confrontés en 75 ans d’existence. »
Les remarques de Gantz sont intervenues alors que la coalition a continué à avancer sur la voie de l’adoption du projet de loi dit du « caractère raisonnable », la commission de la Chambre de la Knesset ayant voté plus tôt mercredi pour approuver le calendrier accéléré de l’adoption de la mesure avant la clôture de la session parlementaire, le 30 juillet.
Selon ce calendrier, le plénum de la Knesset s’ouvrira dimanche, alors qu’il ne se réunit pas habituellement ce jour-là, et le président de la commission de la Constitution, du Droit et de la Justice de la Knesset, le député Simcha Rothman, présentera le projet de loi. Les objections et le débat se poursuivront jusqu’à lundi midi, après quoi le vote commencera.
La commission de la Chambre limite le nombre de votes sur ces objections à 140, le président du Likud, Ofir Katz, accusant l’opposition « d’exploiter négativement l’outil que constitue l’utilisation des objections ».
Parallèlement, l’opposition a utilisé un agenda législatif chargé en vue de faire obstruction. Elle cherche à retarder les derniers préparatifs nécessaires pour soumettre au vote dimanche le projet de loi largement controversé.
Des dizaines de projets de loi étaient prévus pour la session plénière de mercredi, et des sources de l’opposition ont déclaré que leur plan était de faire durer la session plénière jusqu’à « au moins » jeudi, mais la commission a repris tard mercredi lorsque la Knesset a déclaré une suspension de séance.
Les commissions de la Knesset – y compris la commission de la Constitution, du Droit et de la Justice qui s’efforce actuellement d’approuver le projet de loi sur l’examen de la notion juridique du « caractère raisonnable » – sont généralement obligées d’interrompre leurs activités pendant la session plénière.
En gardant la plénière pleine avec un ordre du jour chargé, l’opposition a tenté de retarder le vote de la commission de la Constitution, du Droit et de la Justice pour approuver le projet de loi pour ses deuxième et troisième – dernières – lectures, actuellement prévues pour ce dimanche.
Carrie Keller-Lynn et Alexander Fulbright ont contribué à cet article.