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Rothman veut emprisonner l’ancien procureur général pour « incitation à la violence »

L'architecte de la refonte judiciaire controversée s’insurge contre les avertissements de l'opposition à cette réforme et dit que Mandelblit est une "honte"

Le président de la Commission de la Constitution, le député Simcha Rothman, à gauche, aux côtés de Gur Blaï, conseiller juridique de la commission lors d'une discussion, à la Knesset, le 8 février 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)
Le président de la Commission de la Constitution, le député Simcha Rothman, à gauche, aux côtés de Gur Blaï, conseiller juridique de la commission lors d'une discussion, à la Knesset, le 8 février 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Le député de HaTzionout HaDatit a réclamé vendredi l’incarcération de l’ancien procureur général Avichai Mandelblit pour « incitation à la violence », après une interview dans laquelle ce dernier prévenait que la forte division qui règne dans le pays au sujet de la réforme judiciaire avancée par le gouvernement se terminerait probablement par des violences.

Rothman, qui est à la tête de la commission de la Constitution, du Droit et de la Justice de la Knesset, est l’un des principaux architectes de la réforme et son appel se fait l’écho de ceux d’autres membres du gouvernement à emprisonner les opposants critiques.

Mandelblit, qui a été procureur général sous le précédent gouvernement dirigé par le Premier ministre Benjamin Netanyahu, a accordé une longue interview à l’émission Uvda de la Douzième chaîne jeudi soir, dans laquelle il a averti que la réforme judiciaire équivalait à un « changement de régime » et qu’elle détruirait le système légal israélien.

Dans cette interview, Mandelblit a évoqué le profond fossé qui sépare les deux camps et a prévenu que la situation « continuera à se détériorer, ce n’est pas fini. Elle se terminera dans la violence, quelqu’un en paiera le prix dans le sang ».

Rothman a répondu à Mandelblit de manière agressive dans une interview sur Radio 103 FM vendredi, durant laquelle il a déclaré que l’ancien procureur général devrait être enfermé pour incitation à la violence.

« Une personne qui parle de corriger le système judiciaire et utilise des expressions telles que ‘du sang dans les rues’ est une personne irresponsable, qui appelle à la rébellion et incite à la violence. Le fait que cette personne ait été le procureur général est une honte totale… il devrait être mis en prison ». a déclaré Rothman.

Citant un avertissement tout aussi fort lancé par l’ancien président de la Cour suprême, Aharon Barak, Rothman a affirmé que les préoccupations exprimées par les deux hommes étaient fortement exagérées « car tout ce que nous faisons, c’est faire évoluer le système judiciaire, la séparation des pouvoirs et la restauration de la souveraineté du peuple ».

Dans une série d’interviews télévisées en janvier, Barak avait décrit les réformes comme une « série de pilules empoisonnées » qui, si elles se concrétisaient, marqueraient « le début de la fin du Troisième Temple » – la troisième période de la souveraineté nationale juive, après les époques anciennes du Premier et du Second Temple.

L’ancien procureur général Avichai Mandelblit parle à l’émission ‘Uvda’ de la Douzième chaîne, dans un programme diffusé le 9 février 2023. (Crédit : Capture d’écran vidéo)

Rothman a également accusé les médias d’exagérer l’opposition au plan et de donner une tribune à « toute personne opposée à la moindre virgule du projet de réforme ».

La coalition dirigée par Netanyahu soutient une réforme radicale qui renforcerait le contrôle du gouvernement sur le système judiciaire, lui permettrait d’annuler les décisions des tribunaux à la majorité absolue et lui donnerait les pleins pouvoirs sur les nominations judiciaires.

Selon ses détracteurs, ces réformes radicales, ainsi que d’autres projets de loi, auront un impact sur le caractère démocratique d’Israël car elles bouleverseront l’équilibre des pouvoirs, accorderont un pouvoir presque total à l’exécutif et laisseront les individus sans protection et les minorités sans défense.

Le député Zvika Fogel arrivant au Parlement israélien, pour la session d’ouverture de la Knesset, à Jérusalem, le 15 novembre 2022. (Crédit : Olivier Fitoussi/Flash90)

Rothman n’est pas le premier député du gouvernement à réclamer l’emprisonnement de ses critiques.

En janvier, Zvika Fogel, du parti d’extrême droite Otzma Yehudit, a taxé les chefs de l’opposition de « traîtres » et réclamé leur arrestation.

S’exprimant sur la chaîne publique Kan, Zvika Fogel répondait aux propos tenus à l’époque par le chef de l’opposition Yair Lapid, le chef du parti d’unité nationale Benny Gantz et les anciens députés Yair Golan et Moshe Yaalon, qui s’opposaient au projet du gouvernement de remanier le système judiciaire israélien.

« C’est de la folie. Ces quatre personnes devraient être arrêtées. Ce sont les personnes les plus dangereuses à l’heure actuelle », a déclaré Fogel. « En ce qui me concerne, c’est une trahison contre l’État, au cas où je ne me serais pas exprimé assez clairement ».

Ces propos ont été vivement dénoncés, notamment par Netanyahu et le chef du parti de Fogel, Itamar Ben Gvir, lequel a réaffirmé que « la police n’arrêterait pas les opposants politiques. »

Il a toutefois obtenu le soutien d’autres législateurs d’Otzmah Yehudit.

Lors de son interview télévisée de jeudi, Mandelblit a accusé Netanyahu d’avoir avancé le projet de refonte du système judiciaire afin de mettre fin prématurément à son procès pénal en cours et a insisté sur le fait que sa décision d’inculper le Premier ministre était justifiée malgré l’instabilité politique qui s’en est suivie.

Mandelblit a, par le passé, été un proche confident de Netanyahu. Il a même été secrétaire du gouvernement de 2013 à 2016 avant d’être nommé procureur général.

C’est alors que la police a commencé à enquêter sur des faits de corruption à l’encontre de Netanyahu, en 2016, et que Mandelblit l’a inculpé en novembre 2019.

C’était la première fois qu’un procureur général inculpait un Premier ministre en exercice.

Mandelblit a déclaré dans l’interview diffusée jeudi que le projet du gouvernement n’était « pas une réforme ».

« C’est une révolution, un changement de régime. C’est une modification totale de l’ADN avec lequel nous avons grandi, qui aura pour résultat la fin de l’indépendance du système judiciaire », a déclaré Mandelblit.

Jeremy Sharon a contribué à cet article.

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