Tsahal : une corrosion invisible a causé le crash mortel de l’hélicoptère en janvier
Selon l'enquête, la proximité à la mer aurait causé la rouille indétectée de l'appareil ; les pilotes tués, sont salués pour leur conduite dans la cabine enfumée
Emanuel Fabian est le correspondant militaire du Times of Israël.
Une corrosion extrêmement rare dans un des composants du moteur serait à l’origine du crash d’un hélicoptère en parfait état de marche qui s’est abîmé en mer au début de l’année, tuant les deux pilotes à bord, a déclaré l’armée israélienne dimanche au terme de son enquête sur le sinistre.
L’hélicoptère AS565 Panther – connu à l’armée de l’Air israélienne sous le nom « d’Atalef« , ou chauve-souris – s’est écrasé, le 3 janvier, au large de la côte de la ville de Haïfa, dans le nord du pays. Les deux pilotes, le lieutenant-colonel Erez Sachyani et le major Chen Fogel, ont été tués. Un troisième soldat à bord, le capitaine Ron Birman, a réussi à sauter et a été secouru avec des blessures relativement légères.
Le rapport final a largement confirmé les conclusions provisoires publiées par l’armée un mois seulement après le crash.
Selon l’enquête, le dysfonctionnement serait dû à une corrosion qui n’a pas pu être identifié lors de l’entretien, car le composant en question est situé à l’intérieur du moteur et ne fait donc pas partie des contrôles de routine recommandés par le fabricant, la société française Airbus Helicopters.
L’armée a déclaré que ce dysfonctionnement, le premier du genre, n’était connu ni du fabricant ni de l’armée de l’air.
Dans son rapport final, Tsahal a indiqué que la corrosion était probablement due à la proximité constante de l’appareil avec la mer. La flotte « Atalef » est capable d’atterrir sur les navires lance-missiles de la marine israélienne et est principalement utilisée pour des missions en mer.
Il est également indiqué dans le rapport que le « processus de rinçage » du moteur, qui vise à prévenir la corrosion, n’était « pas optimal » et que cette opération n’avait pas été effectuée « à la lettre » conformément aux instructions du fabricant.
Selon le rapport, l’hélicoptère devait être soumis à une révision plus complète par le fabricant au bout de 250 heures de vol supplémentaires. Sa dernière inspection complète, qui est censée avoir lieu toutes les 1 650 heures de vol, remontait à 2017.
La pièce corrodée a entraîné la rupture de l’aube de turbine, déclenchant un incendie dans le moteur gauche qui s’est rapidement propagé au moteur droit, remplissant la cabine de fumée. Selon l’armée, ce sont les composants du moteur qui n’étaient pas ignifugés à la « température nécessaire », comme l’aluminium, qui ont permis au feu de se propager.
« Ceci est dû à un problème de conception du fabricant. En conséquence, le fabricant de l’hélicoptère va fournir des informations de sécurité concernant les composants en aluminium du moteur », a déclaré Tsahal.
Il n’y a pas eu de commentaire immédiat de la part d’Airbus Helicopter ou de sa société mère Airbus.
Sachyani et Fogel ont réussi à garder le contrôle de l’appareil et ont essayé d’éteindre le feu avec un système d’extincteurs à bord, tout en tentant un atterrissage sur l’eau grâce à un système de flottaison intégré à l’hélicoptère.
Selon l’enquête, la force de l’impact avec l’eau a soit assommé Sachyani et Fogel, soit les a assez désorientés pour qu’ils ne puissent pas détacher leur ceinture de sécurité ou utiliser les réservoirs d’oxygène de la cabine lorsque l’hélicoptère a commencé à couler.
On pense que les deux hommes se sont noyés peu après l’impact. Les sauveteurs, qui sont arrivés dans les huit minutes suivant l’accident, n’auraient pas pu les sortir vivants, selon l’enquête.
Les conclusions finales de l’enquête ont été présentées aux familles de Sachyani et de Fogel, a indiqué l’armée.
Si l’enquête a déterminé que les pilotes étaient calmes et contrôlaient la situation pendant le dysfonctionnement et se sont relativement bien comportés, elle a également révélé que les pilotes avaient omis d’éteindre les moteurs avant de mettre en marche le système d’extinction d’incendie, ce qui a empêché ce dernier de fonctionner à pleine capacité.
« Nous soulignons que l’équipage était compétent, qualifié, et qu’il a fait face à une séquence de dysfonctionnements difficiles… dans des conditions de vol complexes, dans l’obscurité de la nuit au-dessus de la mer », a déclaré l’armée dimanche.
Après le crash, l’ancien chef de l’armée de l’air, Amikam Norkin, a cloué au sol la flotte d’hélicoptères AS565 Panther de l’armée. Ils sont restés hors service en raison des difficultés initiales à déterminer la cause du dysfonctionnement. Après avoir découvert qu’une pale corrodée était à l’origine du problème, l’armée de l’air a fait vérifier tous les hélicoptères encore en service afin de s’assurer qu’ils n’avaient pas un problème similaire. Elle a commencé à les remettre progressivement en service.
« Une enquête approfondie, professionnelle et minutieuse a été menée ici », a déclaré le chef de l’armée israélienne, Aviv Kohavi. « Nous avons perdu deux de nos meilleurs pilotes dans cet accident. Notre tâche consiste maintenant à analyser les conclusions et les leçons apprises, afin de prévenir un nouvel accident. »
Judah Ari Gross a contribué à cet article.