Affaire Duma : un complice israélien condamné pour « terrorisme »
Le complice avait préparé l'attaque incendiaire de 2015 qui avait tué trois membres d'une famille palestinienne
Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.

Le tribunal de Lod a condamné jeudi le complice de l’attaque terroriste de Duma, un incendie criminel qui a décimé une famille palestinienne dont un bébé en 2015 d' »appartenance à une organisation terroriste ».
Cette décision ajoute un chef d’inculpation au dossier du jeune homme maintenant âgé de 19 ans. Il avait préparé l’attaque incendiaire de 2015 qui avait tué trois membres d’une famille palestinienne.
L’adolescent, dont le nom n’est pas autorisé à la publication parce qu’il était mineur à l’époque de l’attaque, avait passé un accord avec le bureau du procureur de l’Etat en mai dernier dans lequel il avait reconnu avoir planifié l’incendie de la maison Dawabsha. L’inculpation à son encontre avait été modifiée pour ne faire aucune mention du bébé Ali Saad Dawabsha et ses parents, Riham et Saad, qui ont été assassinés dans l’attaque.
Dans le cadre de cet accord, approuvé par un juge du tribunal de Lod, l’adolescent a admis avoir préparé un crime motivé par le racisme, le même chef pour lequel il avait été inculpé en janvier 2016. L’inculpation a été modifiée pour spécifier le crime d’incendie volontaire, et non de meurtre, comme cela était le cas à l’origine.
Pourtant, les deux camps n’ont pas pu trouver un accord concernant l’inculpation d’appartenance à une organisation terroriste et ont décidé de laisser le tribunal trancher la question. Une commission de juges dirigée par Ruth Lorch avait recommandé en juillet d’abandonner les charges, notant que prouver que l’accusé était membre d’un groupe organisé sur des « divagations » était « un peu exagéré ». Toutefois, le procureur a souligné que le tribunal conserverait ce chef d’inculpation après avoir estimé que les preuves contre l’adolescent étaient suffisantes.
Dans sa décision de jeudi, Lorch a semblé avoir changé d’avoir d’avis, « l’existence de l’organisation terroriste et son affiliation est démontrée par les mots et les actions de l’accusé ».
Lorch a mis en avant le fait que lors de son interrogatoire, l’adolescent a avoué que « le but ultime est la création d’un Etat qui fonctionnera à la lumière de l’autorité de la Torah… Il n’y a aucune place pour les Goys… et s’ils ne quittent pas la terre, ils devraient être tués ».
Malgré la décision du tribunal, la loi impose que l’accusé passe une évaluation par des officiers de probation du ministère des Affaires sociales avant de pouvoir être condamné pour une telle accusation. Un date pour la remise de la décision finale doit encore être fixée.

L’avocat de l’adolescent, Adi Keidar de l’organisation de conseil juridique Honenu a déclaré aux journalistes qu’il prévoyait de faire appel de la décision de jeudi, déclarant qu’elle ne correspondait pas à ce que les juges avaient recommandé en juillet. « Le tribunal avait alors déclaré que [les procureurs] n’avaient pas un dossier solide. C’est cela qui me surprend ».
De son côté, le bureau du procureur de l’Etat a publié un communiqué saluant la décision, déclarant que « les actions violentes menées par l’accusé et d’autres au sein de l’organisation terroriste visaient à envoyer un message dissuasif et à semer la terreur et la peur parmi la population arabe ».
« Il a été déterminé que l’accusé et d’autres personnes ont agi avec un motif raciste et idéologique avec l’intention de faire changer le gouvernement dans sa politique, pour que l’Etat d’Israël soit gouverné par les lois de la Torah », a ajouté le procureur.
En outre, l’accord de mai a vu l’activiste d’extrême-droite reconnaître avoir mené trois autres crimes racistes ciblant des Palestiniens : l’incendie d’un garage à proximité d’une résidence dans le village Cisjordanie d’Aqraba, l’incendie d’un taxi à proximité de la ville voisine de Yasuf, et la lacération de pneus dans le quartier de Jérusalem est de Beit Safafa.
A l’époque, un membre de l’accusation avait déclaré au Times of Israël que l’Etat acceptait de plaider un arrangement parce que l’adolescent n’était pas présent au moment de l’attaque de Duma elle-même, pour laquelle un autre extrémiste israélien, Amiram Ben-Uliel, est dans le box des accusés. Aucun accord négocié n’a été proposé à Ben-Uliel, le suspect principal de l’attaque du Duma.
« Pour une raison inconnue, l’accusé n’a pas réussi [à se rendre sur] le lieu de rencontre prévu entre l’accusé et l’autre [accusé] cette nuit-là », a déclaré l’officiel cité dans le document d’inculpation.
Le bureau du procureur d’Etat a demandé que le suspect soit condamné à cinq ans et demis de prison ferme. En déduisant le temps qu’il a déjà passé en prison, il lui resterait encore deux ans et demi à purger.
Une audience de condamnation doit être fixée pour le 19 janvier.
Nasr Dawabsha, qui a aidé à élever le seul survivant de l’attaque, Ahmad, a déclaré jeudi au Times of Israël, que « nous appelons à ce qu’il soit condamné à la peine maximale ».

En juillet dernier, le tribunal de Lod a libéré l’accusé en assignation à domicile, moins de deux mois après avoir invalidé plusieurs de ses aveux parce qu’ils avaient été obtenus sous la pression extrême des interrogateurs du service de sécurité du Shin Bet.
Le tribunal a également écarté certains aveux de Ben-Uliel, qui est accusé d’avoir lancé la bombe incendiaire mortelle sur la maison de Dawabsha. Pourtant, le tribunal a statué que les autres aveux de culpabilité, qui n’ont pas été faits sous la pression des interrogateurs, pouvaient être utilisés dans l’affaire contre lui.
L’affaire contre Ben-Uliel a continué mais, lors de la dernière audience sur le sujet en juin, le suspect a renoncé à son droit de témoigner devant le tribunal, déclarant dans un communique lu par son avocat qu’il ne coopérerait pas avec « l’injustice » des procédures.
Adam Rasgon a contribué à cet article.