Cela fait trois ans que la guerre civile a éclaté en Syrie et la fin est toute sauf proche.
Plus de 120 000 personnes ont été tuées. Il y a deux millions et demi de réfugiés. Le coût des dégâts faits aux infrastructures du pays s’élève à 3 milliards de dollars (plus de 2 milliards d’euros).
Sur le terrain, un équilibre fragile est maintenu entre le régime et les opposants.
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L’armée du président Bachar al-Assad protège quelques zones qu’elle a conquises dans des régions clefs, comme la côte près de Tartous et de Lattaquié, et dans des grandes villes comme Alep et Damas.
Mais le régime est loin d’avoir vaincu les rebelles et, dans certains cas, il a dû parvenir à un accord pour le contrôle de certaines zones, notamment la région kurde dans le nord-est du pays.
Les opposants d’Assad continuent pour leur part de montrer leur faiblesse et leur manque de discipline, alors que des groupes hétéroclites – certains islamistes radicaux, d’autres laïcs – combattent le régime et se battent les uns contre les autres.
L’armée syrienne compte aujourd’hui près de 230 000 hommes. Face à eux, 120 000 rebelles, dont les deux-tiers sont considérés comme islamistes (10 % sont liés à al-Qaïda) et qui ne cessent de s’entre-tuer.
Il est utile de rappeler que cette guerre a débuté avec un incident tellement mineur que personne n’y ferait attention s’il avait lieu aujourd’hui.
Un groupe d’enfants de la ville de Deraa, près de la frontière avec la Jordanie, a barbouillé des graffitis anti-Assad. Après les avoir arrêté et frappé, des policiers syriens ont emmené les enfants en prison.
Les habitants de la ville ont manifesté contre ces arrestations et, à partir de là, les cadavres se sont mis à s’entasser.
Cette semaine, la semaine dernière, et celle d’encore avant, des images choquantes de la Syrie ont été diffusées mais il semble que tout le monde, Syriens compris, s’y est habitué.
Les meurtres de femmes, d’enfants et de personnes âgées sont devenus une routine, tellement banale qu’elle n’affecte plus le téléspectateur moyen en Israël et dans tout le Moyen Orient.
Encore un village détruit par un bombardement, encore des réfugiés qui prennent la fuite, encore des cadavres empilés dans les rues.
L’une des atrocités les plus récentes a eu lieu en milieu de semaine dans la zone de Jaraboulous, près d’un endroit appelé a-Shiyuh.
Des membres de l’État islamique en Irak et au Levant, une filiale d’al-Qaïda, ont tué 22 personnes, dont des enfants, et ont jeté leurs cadavres dans les rues sous les yeux de la population effrayée.
Certains des corps ont été jetés dans l’Euphrate.
Les victimes n’étaient pas des partisans du régime, mais plutôt de l’Armée syrienne libre, le groupe militaire qui représente les factions modérées de l’opposition.
Et l’armée d’Assad continue de faire ce qu’elle sait faire : des bombardements aériens avec des barils explosifs ou des missiles sol-sol contre des quartiers de l’opposition, en plus de massacres commis par des des groupes armés qui ne font pas partie de l’armée régulière.
Néanmoins, il est difficile de ne pas s’émouvoir d’un rapport publié cette semaine par Amnesty International sur la situation à Yarmouk, près de Damas. Jusqu’au déclenchement de la guerre civile, Yarmouk était le principal camp de réfugiés palestiniens en Syrie.
Près de 150 000 personnes y vivaient dans des conditions de surpopulation. Mais depuis l’été dernier, le régime a mené un siège cruel contre les résidents du camp après que des combattants du Hamas ont pris part aux combats contre l’armée syrienne. Il ne reste désormais que 20 000 réfugiés dans le camp.
Le siège n’a provoqué aucune vague d’indignation internationale, contrairement au siège inexistant autour de la bande de Gaza.
De temps à autre, des rapports sur ce qui se passe dans le camp sont publiés et pourtant, la communauté internationale a laissé Assad mener à bien l’une de ses campagnes les plus brutales contre l’opposition.
Selon Amnesty International, le régime d’Assad essaye tout simplement d’affamer le camp. L’aide humanitaire qui y parvient est négligeable et 200 résidents sont morts, dont 128 de faim.
18 étaient des enfants et des bébés.
Selon Philip Louter, directeur de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord à Amnesty, « les forces syriennes commettent des crimes de guerre en se servant de la famine des civils comme d’une arme de guerre.
Les récits douloureux de familles ayant dû se résoudre à manger des chats et des chiens et ceux de civils visés par des snipers alors qu’ils cherchaient de la nourriture sont devenus des détails trop familiers de l’horrible projet qui se concrétise à Yarmouk.»
Selon Amnesty, le régime a empêché la livraison de nourriture et de matériel militaire, a arrêté et torturé le personnel médical du camp, a bombardé les écoles et les hôpitaux et provoqué une situation de grave malnutrition (60 % du camp souffre de malnutrition).
Mais le monde reste silencieux.
Même ceux qui, en Israël, s’indignent au moindre retard de quelques heures d’un sac de riz livré à Gaza, ignorent les atrocités.
Tant que des Arabes tuent d’autres Arabes, qui s’en soucie ?