Ben Gvir veut s’associer à Smotrich pour entraver l’accord sur les otages
Le ministre des Finances dément et accuse le ministre de la Sécurité nationale de "jouer un jeu" avec les médias ; l'opposition promet de soutenir le gouvernement si besoin

Le ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, aurait contacté mercredi le ministre des Finances, Bezalel Smotrich, pour demander que les deux hommes forment un bloc uni au sein du gouvernement pour bloquer l’accord de cessez-le-feu à Gaza poussé par l’administration Trump.
Selon des informations parues dans la presse israélienne, les deux hommes, qui dirigent respectivement les partis Otzma Yehudit et HaTzionout HaDatit, envisageraient de tenir une réunion pour coordonner leur opposition à l’initiative américaine.
Cependant, dans un communiqué envoyé à la presse par l’intermédiaire de son porte-parole, le ministre des Finances a démenti toute coopération de ce type et a accusé Ben Gvir de « jouer un jeu » en divulguant des informations à la presse.
L’idée même que des ministres puissent empêcher un accord pour la libération des otages a suscité l’indignation des dirigeants de l’opposition, qui ont promis de donner au gouvernement la majorité à la Knesset pour tout accord de ce type, ainsi que des familles des otages, qui ont qualifié leur comportement présumé de « honteux ».
La chaîne publique Kan a rapporté les propos de Ben Gvir, qui expliquait vouloir l’aide de Smotrich, car il ne pouvait « à lui seul mettre fin à ce processus, mais qu’ensemble, ils disposaient de suffisamment de voix à la Knesset pour s’opposer à l’accord ».
Leurs partis détiennent à eux deux 13 sièges à la Knesset, qui en compte 120, et la coalition au pouvoir ne dispose que d’une faible majorité avec seulement 61 députés. Bien que le cabinet n’ait pas besoin de l’approbation de la Knesset pour conclure un accord concernant les otages, il peut l’autoriser même contre la volonté de Ben Gvir et Smotrich. Toutefois, ces deux partis pourraient menacer d’entraver l’action législative de la coalition au Parlement s’ils n’obtiennent pas gain de cause.

Une source proche de Smotrich a réfuté toute coordination avec Ben Gvir, déclarant aux médias que « Ben Gvir n’a pris aucune initiative [à l’égard de Smotrich] ; il a simplement informé les médias d’une réunion qui n’avait pas été convenue ».
« La question de la victoire à Gaza est trop importante et la vie des otages est trop précieuse pour se livrer à un jeu de brèves aux médias », a ajouté la source.
« Le ministre des Finances travaille sur cette question avec toute son énergie et son sérieux depuis un certain temps déjà. »
De son côté, le ministre des Affaires étrangères, Gideon Saar, a déclaré dans un message publié sur le réseau social X qu’une « large majorité au sein du gouvernement et de l’opinion publique est favorable à un accord-cadre pour la libération des otages. S’il y a une chance d’y parvenir, nous ne devons pas la manquer ! »
En réponse à Saar, le ministre de la Diaspora Amichaï Chikli (Likud) a écrit que l’accord-cadre n’avait pas encore été présenté au gouvernement.
Le chef de l’opposition Yaïr Lapid a offert au Premier ministre Benjamin Netanyahu le soutien de l’opposition pour un cessez-le-feu qui compenserait la « perte » stratégique de Ben Gvir et Smotrich.
En échange des 13 voix de Ben Gvir et Smotrich à la Knesset, « vous avez 23 voix de ma part pour garantir l’accord sur les otages », a déclaré Lapid dans un communiqué.
« Nous devons ramener tout le monde à la maison maintenant. »

Le chef du parti Les Démocrates, Yaïr Golan, a écrit sur X que Smotrich et Ben Gvir étaient « deux kahanistes ratés » dont les actions montrent qu’ils ne sont « ni sionistes ni dignes de siéger à la table du gouvernement », en référence au défunt rabbin ultra-nationaliste interdit Meïr Kahane, dont Ben Gvir était un disciple et qui a été assassiné à New York en 1990.
Le Forum des familles des otages et disparus, le plus grand groupe représentant les familles des captifs, a réagi à cette information en déclarant que Smotrich et Ben Gvir, tous deux juifs pratiquants, « avaient oublié ce que signifiait être juif et l’importance des valeurs d’amitié et de responsabilité mutuelle sur lesquelles l’État d’Israël avait été fondé ».
« Nous n’avons pas d’autre mot pour les qualifier ce matin que ‘honte’ », a ajouté le forum.
Einav Zangauker, dont le fils Matan est retenu en otage à Gaza, a appelé Netanyahu à ne pas se ranger du côté de ces deux « misérables » ministres pour entraver un accord.

Elle a également souligné que le Premier ministre lui-même lui avait récemment assuré qu’il n’avait besoin ni de Ben Gvir ni de Smotrich pour approuver un accord sur les otages, car il bénéficiait d’un large soutien pour une telle mesure, même sans eux.
Mardi soir, le président américain Donald Trump a annoncé qu’Israël avait accepté les conditions nécessaires pour finaliser un cessez-le-feu de 60 jours avec le le groupe terroriste palestinien du Hamas dans la bande de Gaza.
« Nous travaillerons avec toutes les parties pour mettre fin à la guerre » pendant cette trêve de deux mois, a-t-il déclaré dans un message publié sur Truth Social, résumant les développements issus des réunions tenues mardi à Washington entre de hauts responsables américains et le ministre israélien des Affaires stratégiques, Ron Dermer, actuellement en visite aux États-Unis.
Le président américain a déclaré qu’il se montrerait « très ferme » avec le Premier ministre israélien sur la nécessité de mettre fin à la guerre à Gaza lors de leur prochaine réunion à la Maison Blanche qui devrait se tenir le 7 juillet.
Le parti Otzma Yehudit de Ben Gvir avait quitté le gouvernement en janvier pour protester contre un précédent accord de cessez-le-feu et de libération d’otages, avant d’y revenir en mars, lorsque les hostilités avaient repris. Smotrich avait maintenu son parti, HaTzionout HaDatit, au sein de la coalition pour le cessez-le-feu, mais avait conditionné son maintien à la reprise des combats contre le Hamas plutôt qu’à l’utilisation de la période de trêve pour négocier une fin définitive de la guerre, comme le prévoyait initialement l’accord.
Le cessez-le-feu a été rompu en mars lorsque l’armée israélienne a repris ses attaques contre le Hamas, accusant le groupe terroriste palestinien de violer les termes de l’accord. Des dizaines d’otages en vie, mais aussi des dépouilles, ont recouvré la liberté pendant cette trêve.
La guerre à Gaza a éclaté lorsque quelque 6 000 Gazaouis dont 3 800 terroristes dirigés par le Hamas ont pris d’assaut le sud d’Israël le 7 octobre 2023, tué plus de 1 200 personnes, principalement des civils, enlevé 251 otages de tous âges, et commis de nombreuses atrocités et en utilisant la violence sexuelle comme arme à grande échelle.
Les groupes terroristes de la bande de Gaza détiennent 50 otages, dont 49 des 251 personnes enlevées par des terroristes du Hamas le 7 octobre 2023.
Parmi eux se trouvent les corps d’au moins 28 personnes dont le décès a été confirmé par l’armée israélienne, et 20 seraient encore en vie. Les autorités israéliennes ont fait part de leurs vives inquiétudes concernant le sort de deux autres personnes. Le Hamas détient également le corps d’un soldat des Tsahal tué à Gaza en 2014.