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Ce que dit précisément l’arrêt de la cour d’appel dans l’affaire Halimi

L’arrêt de 29 pages a conclu à l'irresponsabilité pénale de l’assassin Kobili Traoré dans le meurtre antisémite de Sarah Halimi

Sarah Halimi. (Crédit : autorisation de la Confédération des Juifs de France et des amis d’Israël)
Sarah Halimi. (Crédit : autorisation de la Confédération des Juifs de France et des amis d’Israël)

Le magazine Le Point a publié la semaine dernière les détails de l’arrêt de 29 pages de la sixième chambre d’instruction de la cour d’appel de Paris concluant à l’irresponsabilité pénale de Kobili Traoré, qui a tué en 2017 Sarah Halimi, sexagénaire juive, dans son appartement parisien.

Les magistrats, soutenus par le parquet général, ont ainsi retenu le déroulement suivant des faits.

Kobili Traoré, 27 ans, un voisin, est entré dans l’appartement de la famille Diarra, qu’il connaissait, dans le 11e arrondissement de Paris, vers 3h30 dans la nuit du 3 au 4 avril 2017. La famille avait laissé entrer l’homme, qui n’avait plus les clés de chez lui, avant de s’enfermer dans une chambre en raison de son agressivité.

Traoré a alors escaladé le balcon le menant à celui de la voisine, Sarah Halimi, médecin retraitée, qui vit seule. Après l’avoir rouée de coups, il l’a défenestrée, a crié avoir « tué le sheitan » (le démon, en arabe), a récité des sourates du Coran et a « proféré des mots incompréhensibles ».

Il finira par regagner l’appartement des Diarra où il sera interpellé vers 5h du matin.

L’arrêt rapporte que, selon la famille de Traoré, l’homme a commencé à avoir un comportement étrange deux jours avant les faits. Le document explique qu’il a regardé la télévision la veille du meurtre avec un ami et qu’il est allé à la mosquée pour tenter de calmer ses angoisses.

Au juge, l’homme affirmé avoir été enfermé « dans son délire » et, s’il reconnaît qu’il avait conscience que sa victime était Juive, il dit ne pas être antisémite.

Durant l’enquête, les policiers ne trouveront aucune recherche à caractère antisémite dans son historique Internet. Les voisins et la gardienne de l’immeuble déclareront n’avoir « jamais eu de problème lié à l’antisémitisme dans la résidence ». Un fait face auquel la famille soutiendra le contraire, expliquant que Sarah Halimi avait peur de lui.

La dimension antisémite du crime sera finalement retenue le 27 février 2018.

Dans l’arrêt, est rapportée l’expertise du docteur Zagury, qui a conclu à
« l’altération du discernement » de Traoré et non à « l’abolition totale du discernement » en raison de sa « consommation volontaire et régulière de cannabis », comme finalement reconnue par les juges.

Selon le psychiatre, « l’hypothèse d’une intention terroriste n’est en rien confirmée. Sa pratique religieuse n’était pas particulièrement assidue (…) Certains délirants peuvent échafauder des projets terroristes, l’actualité nourrissant leur délire. Ce n’est pas son cas (…) L’existence avérée d’une bouffée délirante aiguë n’est pas incompatible avec une dimension antisémite. »

« Les témoignages portés à ma connaissance ne confirment pas l’existence chez Kobili Traoré d’un antisémitisme habituel, qui se serait antérieurement manifesté de façon claire. Dans le bouleversement délirant, le simple préjugé ou la représentation banale partagée se sont transformés en conviction absolue (…) Sarah Halimi n’avait peut être pas été délibérément recherchée et tuée parce que Juive, mais le fait que Kobili Traoré réalise qu’elle l’était à l’entrée dans l’appartement, s’est télescopé avec la thématique délirante, l’associant immédiatement au diable, et amplifiant le déchaînement frénétique haineux et vengeur », rapporte-t-il.

Si elles sont proches de celle du docteur Zagury, les deux autres expertises concluent elles à « l’abolition totale du discernement » de l’assassin – d’où la décision des juges – car la bouffée délirante aiguë déclenchée par la consommation de cannabis n’était pas prévisible.

Selon les parties civiles, l’acte était prémédité.

« Pourquoi Traoré n’a-t-il pas tué les gens qu’il avait séquestrés [dans l’appartement voisin de celui de Sarah Halimi], avant de jeter Mme Halimi par la fenêtre ? », s’est interrogé l’avocat de la famille de la victime Maitre Francis Szpiner. « Comment a-t-il pu, comme il l’a fait, enjamber son balcon avant de s’en prendre à elle ? Pourquoi a-t-il déclaré avoir ‘tué le démon’, puis hurlé ‘Allah Akbar’, s’il n’avait pas conscience de commettre un crime antisémite, comme il le prétend ? Pourquoi s’est-il rebellé lors de son interpellation, s’il avait perdu tout discernement ? Et comment a-t-il pu prétendre que Mme Halimi s’était suicidée, si ce n’est pour échapper à une responsabilité dont il avait pleinement conscience ? »

Une préméditation que n’a pas reconnue la cour d’appel, bien qu’elle ait reconnu le meurtre et sa dimension antisémite.

« Aucun élément du dossier n’indique que cet homicide volontaire ait été prémédité par Kobili Traoré et qu’il se soit rendu dans l’appartement de madame Attal avec l’intention de la tuer », indique l’arrêt.

« Nous dirions en résumé que Kobili Traoré était, au moment des faits, du fait de la prégnance du délire, un baril de poudre. Mais la conscience du judaïsme de madame Attal a joué le rôle de l’étincelle », ont écrit les juges, se basant sur les conclusions des trois experts Bensussan, Rouillon et Meyer-Buisan.

« Aucun élément du dossier d’information n’indique que la consommation de cannabis par l’intéressé ait été effectuée avec la conscience que cet usage de stupéfiants puisse entraîner une telle bouffée délirante », ont-ils ajouté au sujet de la consommation de cannabis de l’assassin.

La bouffée délirante ne fait ainsi « pas obstacle à ce que soit reconnue l’existence d’un trouble psychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes ».

William Attal, le frère de Sarah Halimi tuée en avril dans une attaque apparemment antisémite devant la synagogue centrale de Créteil, une banlieue de Paris, le 17 juin 2017 (Crédit : Raoul Wootliff/Times of Israel)

Suite à la décision de justice, le frère de Sarah Halimi, William Attal, avait fait part de son incompréhension.

L’homme avait accusé l’une des expertises, celle effectuée par le psychiatre Paul Bensussan, celle qui a provoqué cette décision de justice, d’être « catastrophique, totalement incohérente et incompétente », l’expert étant revenu sur ses conclusions.

L’homme ajoute qu’en raison de désaccords entre les psychiatres, il aurait été logique que l’affaire soit débattue en Cour d’assises.

L’affaire se poursuivra en cour de cassation, dernier recours possible pour les parties civiles.

La décision de justice de reconnaître pénalement irresponsable l’assassin de Sarah Halimi continue à provoquer des remous au sein de la société française, et nombreuses ont été les personnalités publiques à réagir.

La LICRA Paris a appelé au rassemblement le 5 janvier prochain afin que l’assassin soit jugé et des marches sont également prévues à Marseille et à Clermont-Ferrand.

De son côté, le Crif organisera le 9 janvier à 19h un rassemblement en mémoire aux victimes de l’attentat de l’Hyper Cacher de janvier 2015, évènement auquel la mémoire de Sarah Halimi sera associée.

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