C’est à cause des implantations, imbécile !
Alors que le retentissant "Oui" du parlement anglais résonne, l'empathie pour les intérêts vitaux d'Israël est érodée par la colère devant l'élargissement des implantations
David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).

« Les prochaines minutes seront personnellement assez pénibles pour moi… J’étais un ami d’Israël bien avant de devenir un Tory [conservateur]. La famille de mon épouse a contribué à la création de l’Etat juif. En effet, certains d’entre eux étaient avec Weizmann à la conférence de Paris [en 1919]… A la guerre des Six-Jours, je me suis personnellement impliqué. Il y avait alors une grande envie de détruire Israël… Six ans plus tard, dans la guerre du Kippour en 1973, la même situation s’est reproduite… »
« Je me suis tenu aux côtés d’Israël par vents et marées, dans les bonnes et les mauvaises années. J’ai discuté avec les ministres et les politiciens israéliens qui exigeaient des négociations pacifiques et une réaction proportionnée à la prévarication, pensant qu’ils étaient à l’écoute. Mais je me rends compte maintenant, en réalité, en regardant les vingt dernières années passées, qu’Israël s’est éloigné lentement de l’opinion publique mondiale. L’annexion des 400 hectares de la Cisjordanie il y a quelques mois m’a scandalisé plus que tout autre événement dans ma vie politique, surtout parce que cela me fait passer pour un fou, et c’est quelque chose que je n’apprécie pas… »
« Je ne suis pas encore convaincu que [la Palestine] soit apte à être un Etat … Dans des circonstances normales, je m’opposerais à la motion de ce soir ; mais ma colère sur le comportement d’Israël dans les derniers mois est telle que je ne m’y opposerai pas. Je dois dire que si le gouvernement israélien perd des gens comme moi, ce sera la perte d’un grand nombre de personnes ».
– Sir Richard Ottaway, député conservateur de Croydon Sud, qui s’est rendu en Israël avec sa femme lors d’un séjour organisé par les Conservative Friends of Israel [Les amis Tories d’Israël] il y a trois ans. Ottaway s’est abstenu à la Chambre des communes lors du vote de lundi soir visant à faire reconnaître la Palestine par le gouvernement britannique.
« Qui peut défendre la construction des colonies – la colonisation d’un autre pays ? Nous parlons d’environ 600 000 colons israéliens implantés sur le sol palestinien. »
– Andy Slaughter, député travailliste de Hammersmith. Slaughter a voté pour la motion, qui est passée par 274 voix contre 12.
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a raison.
Il a raison de dire qu’un Etat palestinien viable ne peut être atteint que par la négociation et le compromis avec Israël.
Il a raison de penser que donner à une Palestine une pleine souveraineté dans un Moyen-Orient violent et instable mettra Israël face à une menace existentielle potentielle.
Sa négociatrice en chef des pourparlers, réputée pour être pro-compromis, la ministre de la Justice Tzipi Livni, a déclaré au Times of Israel il y a tout juste trois semaines qu’il a toujours été clair pour le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas que « tout accord (relatif à un Etat palestinien) ne comprendrait pas de souveraineté pleine et entière… Il est clair que l’Etat palestinien souverain doit accepter ses limites. Certainement, la démilitarisation. »
Netanyahu a raison de mettre en évidence la facilité avec laquelle le Hamas a évincé les forces d’Abbas de Gaza en 2007 et a construit un Etat terroriste à la frontière sud d’Israël.
Et il a aussi raison de soulever sa profonde préoccupation si le Hamas venait à faire de même en Cisjordanie, au cas où Israël devait renoncer à la sécurité dans un avenir proche. Comme il l’a dit à l’ONU le mois dernier : « Israël ne peut voir des territoires dont il s’est retiré repris par des militants islamistes une fois encore, comme cela s’est produit à Gaza et au Liban. »
Il a raison de souligner que le Hamas reste ouvertement voué à la destruction d’Israël. Et il a raison de fustiger Abbas pour avoir approuvé un gouvernement
de « réconciliation » et d’unité avec le Hamas, une organisation terroriste qui a tué des centaines d’Israéliens dans des attentats-suicides lors de la Seconde Intifada et a retenu tout Gaza en otage alors qu’il utilisait sa machine de guerre contre Israël cet été.
Netanyahu a raison de condamner amèrement Abbas de la méprisable accusation de « génocide », que le président de l’AP a adressée à Israël depuis cette même tribune de l’ONU le mois dernier, devant des centaines de millions de téléspectateurs impressionnables à travers le monde.
Il a raison de s’en prendre à une telle incitation pernicieuse faite à l’encontre d’Israël et soigneusement calculée afin de faire gonfler l’hostilité arabe palestinienne, et même d’ailleurs quand il évoque l’existence d’Israël.
Il a raison de se plaindre du système de deux poids deux mesures dans le traitement réservé à Israël par la communauté internationale, et de la catastrophique couverture médiatique faite sur la guerre Israël-Hamas de cet été.
Il a raison de protester contre les iniquités de l’ONU, avec son parti pris anti-Israël intrinsèque et obsessionnel, ses cyniques enquêtes relatives aux crimes de guerre prétendument commis, avec son rôle central dans la perpétuation de la crise des réfugiés palestiniens.
Quand l’heure sonne où ils ont besoin de nous, à la frontière Nord, où ils fuient les groupes terroristes islamistes pour se réfugier chez nous, nous répondons présent. Mais quand notre frontière Sud est ébranlée par des tirs de roquettes, dont certaines ont été retrouvées dans ses installations à Gaza, il n’y a pas de commission d’enquête contre le Hamas.
Netanyahu a raison, certes, ne pas assimiler le Hamas avec l’État islamique, mais il faut certainement bien souligner les points qu’ils ont en commun, à savoir la perversion de la religion, le mépris pour la vie humaine et l’immense brutalité.
Il a raison de souligner les dangers auxquels sont confrontés le minuscule Etat d’Israël dans une région en proie à l’extrémisme islamique : le Hamas reste au pouvoir à Gaza et cherche constamment à jouir d’une plus grande influence en Cisjordanie ; le Hezbollah armé jusqu’aux dents dans le sud du Liban, l’anarchique Etat islamique en marche en Syrie et en Irak et le financement du terrorisme dans la région et bien au-delà par l’Iran qui poursuit sans cesse sa constitution d’un arsenal d’armes nucléaires – oui, tout cela laisse présager un réel enfer dans la région,
Netanyahu a raison sur tous ces points évoqués – mais cela n’a, à vrai dire, aucune importance.
Parce que, comme le dernier volet de la dispute épuisante entre Israël et son allié majeur américain le souligne, comme la politique affirmée par le nouveau gouvernement suédois le confirme, et comme le débat à la Chambre des communes le prouve, ces arguments essentiels n’ont pas la résonance nécessaire dans le monde occidental. Ils ne sont pas tout simplement éclipsés, parfois ils disparaissent devant la question des implantations. Leur crédibilité est minée par le problème des implantations. Ainsi, le soutien crucial pour Israël est érodé par la question des implantations.
La construction des implantations a été citée de manière péjorative environ 40 fois pendant le débat lundi soir à Westminster. Peu importe que la construction à Givat Hamatos – l’objet de la récente volée de critiques de la part des États-Unis – n’a pas encore débuté, ou que Givat Hamatos se situe à peine au-delà de la Ligne verte, et dans le territoire revendiqué par Israël pour une Jérusalem unifiée et souveraine.
Peu importe que l’annexion des terres prévue en Cisjordanie, qui est si pénible pour Sir Richard Ottaway, se situe dans la région du Gush Etzion, dans le sud de Jérusalem, – des terres en grande partie achetées par des Juifs avant la création d’Israël, – et que de nombreux Israéliens pensent que cette région fera partie d’Israël lors d’un éventuel échange de terres pour redéfinir les frontières dans le cadre d’un accord permanent avec les Palestiniens.
Cela ne fait aucune différence pour eux que les 400 hectares en question soient à proximité de l’endroit où trois adolescents israéliens ont été enlevés et assassinés par une cellule terroriste du Hamas le 12 juin dernier.
Israël construit au-delà de la Ligne verte. Israël reste sourd aux supplications ses amis, même les meilleurs, qui lui demandent de cesser de construire jusqu’à ce que le statut des territoires contestés soit résolu via des négociations. Et même certains de ses meilleurs amis sont à présent sourds aux besoins d’Israël, un Israël avec des préoccupations existentielles et légitimes.
Netanyahu a également raison d’affirmer qu’à chaque fois qu’une Suède promet la reconnaissance de la Palestine, ou qu’un Parlement britannique appelle à cette reconnaissance, ils renforcent les positions maximalistes palestiniennes pour les paramètres d’un tel Etat, et empêchent ainsi une conclusion satisfaisante pour les négociations israélo-palestiniennes en vue de trouver une solution à deux Etats.
Mais une proportion sans cesse croissante de la communauté internationale ne se soucie plus de cela, tant elle est exaspérée par l’expansion constante des implantations.
Comment – lisez entre les lignes – Netanyahu peut-il contester de façon crédible l’activité politique unilatérale pro-palestinienne, comment peut-il s’attendre à être entendu alors que son Israël est en train de réécrire unilatéralement les faits sur le terrain ?