Conscription des Haredim : Netanyahu déclare qu’il fera avancer la loi soutenue par Gantz
Orit Farkash-Hacohen a rejeté cette initiative, évoquant une "ruse minable et outrageusement visible"
Après avoir échoué à trouver un accord sur le sujet du recrutement, au sein de l’armée, des membres de la communauté ultra-orthodoxe avec ses partenaires de coalition haredim, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a annoncé qu’il fera avancer un projet de loi qui abaissera l’âge de l’exemption de service militaire pour les étudiants en yeshivot – une législation qui avait été proposée pour la première fois par Benny Gantz lorsqu’il était ministre de la Défense, en 2022.
En choisissant de mettre en avant une version de la loi qui avait été approuvée par Gantz, Netanyahu cherche apparemment à apaiser la mise en garde ouvertement lancée par le ministre du cabinet de guerre, ce week-end. Gantz avait sommé le Premier ministre de ne pas présenter sa propre version de la loi. Il avait estimé que le texte ne favoriserait pas l’enrôlement de la population haredi, qu’il entraînerait des divisions profondes et que l’avancée d’une telle législation « à des fins politiques » serait une erreur.
« Afin de remédier aux différends et d’ouvrir la porte à un large consensus, le Premier ministre a décidé de faire avancer la loi sur la conscription qui avait été adoptée en première lecture par la Knesset précédente » et de la présenter devant la commission des Lois demain, a noté un communiqué émis mercredi par le Bureau du Premier ministre.
Netanyahu a appelé toutes les formations politiques qui avaient apporté leur soutien à cette version à voter à nouveau en sa faveur.
Ce plan prévoit que l’âge de l’exemption de service militaire obligatoire, pour les étudiants en yeshivot, passerait de 26 ans à 21 ans. Un grand nombre de ces étudiants resteraient dans les programmes d’études religieuses plus longtemps qu’ils ne le feraient normalement pour éviter le service militaire, réclamant pour cela des dérogations jusqu’à ce qu’ils atteignent l’âge officiel de l’exemption. En abaissant cet âge de l’exemption, le gouvernement espère pousser ces jeunes hommes ultra-orthodoxes à quitter les yeshivot et à rejoindre plus tôt le marché du travail.
Pendant une conférence de presse, au mois de février, Gantz et un autre membre de son parti HaMahane HaMamlahti, Gadi Eisenkot, avaient présenté une ébauche de projet de loi portant sur le recrutement militaire des Arabes et des Juifs haredim, appelant « une majorité de jeunes gens » à servir le pays.
Si Gantz n’avait pas proposé de quotas spécifiques concernant l’enrôlement des ultra-orthodoxes, il avait indiqué que le nombre devrait augmenter graduellement, année après année, et il avait expliqué que si la majorité des Haredim seraient finalement amenés à faire le service militaire, il resterait toutefois « une élite qui continuera à étudier et un grand nombre feront leur service en même temps qu’ils étudieront ».
Toutefois, après que Netanyahu a annoncé son plan de faire avancer le projet de loi qui avait été approuvé par Gantz, une députée du parti HaMahane HaMamlahti, Orit Farkash-Hacohen, a rejeté une « ruse minable et outrageusement visible ».
Farkash-Hacohen a écrit sur X : « Ce n’est pas une ruse ‘brillante’ de la part du Premier ministre. Au contraire. Seul un Premier ministre dénué de morale comme le nôtre peut, une minute après une journée de Yom HaZikaron qui a été si difficile, se livrer à une ruse aussi minable, aussi outrageusement visible, au détriment des citoyens israéliens ».
« Ce qui était justifié avant le 7 octobre ne l’est plus aujourd’hui », a-t-elle ajouté.
« Israël a besoin de soldats, pas de combines politiques, » a dénoncé pour sa part mercredi Gantz.
« L’État d’Israël a besoin de soldats et non pas de combines politiques qui divisent le peuple alors que le pays est en guerre », a-t-il affirmé, précisant que sa proposition avait été présentée comme une mesure provisoire et comme « une base pour l’élaboration d’une ébauche concernant le service militaire israélien, en vue d’instaurer un service pour toutes les catégories de la population ».
Cette loi « n’était pas satisfaisante à l’époque et n’est pas pertinente dans la réalité d’aujourd’hui, au lendemain du 7 octobre », a-t-il soutenu, affirmant que « le temps des discussions est révolu, le temps est à l’action ».
Les partis ultra-orthodoxes sont farouchement opposés à la conscription des élèves des yeshivot dans l’armée. La Haute Cour de justice a estimé que la situation actuelle viole le principe d’égalité. Les critiques de la communauté haredi affirment, pour leur part, que les ultra-orthodoxes forcent le reste de la population à porter le fardeau de la sécurité, invoquant le risque posé à la vie des soldats.
Auparavant, Gantz avait insisté sur le fait que sa version de la loi devait s’accompagner d’efforts visant à étendre l’obligation de service national aux ultra-orthodoxes et aux Arabes israéliens.
Condamnant Netanyahu pour avoir joué un « jeu politique honteux en temps de guerre, alors que des soldats sont tués chaque jour », le chef de l’opposition Yair Lapid a assuré que l’opposition « s’opposera à lui de toutes ses forces. »
« Netanyahu continue d’agir comme si le 7 octobre n’avait jamais eu lieu. Le 7 octobre a bel et bien eu lieu. Sous son mandat », a ajouté Lapid, dénonçant la « discrimination entre le sang et le sang ».
« Nous n’accepterons pas que les Haredim continuent de crier ‘nous mourrons plutôt que de rejoindre Tsahal’ alors que nos enfants continuent de mourir parce que [les Haredim] sont exemptés de service militaire ».
Le ministre de la Défense Yoav Gallant a laissé entendre mercredi qu’il ne soutiendrait pas le projet de loi proposé par Netanyahu.
« Ma position n’a pas changé. Je soutiendrai tout projet de loi qui sera acceptable par toutes les parties de la coalition. Mais je ne laisserai pas passer, et l’establishment de la défense ne fera pas avancer un projet de loi présenté unilatéralement par certaines factions de la coalition », a-t-il déclaré en réponse à une question lors d’une conférence de presse.
La Haute-Cour de justice a estimé que la situation actuelle contrevenait aux valeurs d’égalité.