Décès de Mary Ann Stein, engagée pour la justice sociale aux USA et en Israël
Ses proches disent d'elle qu'elle était "profondément attachée" à l'intégration de la communauté éthiopienne en Israël et à la prévention du VIH pour les femmes
Installée à Bethesda, Maryland, la présidente et fondatrice du Fonds Moriah, Mary Ann Stein, connue pour son combat en faveur des droits humains et civils aux États-Unis et en Israël, des droits des femmes, de la santé reproductive et de la justice économique, est décédée le 6 septembre à l’âge de 80 ans.
A partir de 1985 et durant plus de 30 ans, Stein a présidé le Fonds Moriah, fondation privée créée par son père et son oncle, Robert et Clarence Efroymson. Sous son mandat, le fonds a créé le Centre israélien pour l’innovation éducative, engagée en faveur de l’alphabétisation des olim éthiopiens. Ses proches ont dit d’elle qu’elle était « profondément attachée à l’intégration de la communauté immigrée éthiopienne en Israël ».
Stein a également été présidente et longtemps membre du Conseil d’Administration du New Israel Fund, qui promeut la société civile et les institutions démocratiques d’Israël. Partisane des droits des Palestiniens et des Juifs israéliens, elle a été coprésidente d’Americans for Peace Now et, en 1997, a soutenu les critiques du président Clinton envers les implantations israéliennes.
« Pendant des décennies, Mary Ann s’est profondément engagée en faveur de la démocratie et de la consolidation de la paix en Israël et en Palestine », a déclaré par voie de communiqué Americans for Peace Now . « Sa personnalité et ses oeuvres ont ouvert de nouvelles perspectives pour les institutions de la région et des États-Unis, pour l’avènement d’un avenir meilleur pour les Israéliens et les Palestiniens. »
Stein a également été la cofondatrice et présidente du Fund for Global Human Rights, qui, depuis 2002, a versé plus de 125 millions de dollars de subventions à plus de 900 organisations de 60 pays dans le monde.
Son fils, Gideon Stein, a déclaré qu’elle laissait une éthique de la philanthropie « basée sur la confiance » et axée sur la recherche de solutions sans idées préconçues sur les problèmes ou défis à relever.
En témoigne, a-t-il expliqué, son action en faveur de la Campagne mondiale pour les microbicides, qui promeut la prévention du VIH, notamment en ce qui concerne les femmes. Lorsqu’elle a approché la Fondation Bill et Melinda Gates pour obtenir son soutien et arrêter la propagation des maladies sexuellement transmissibles, un expert lui a dit que les femmes des pays en développement seraient embarrassées d’utiliser les applicateurs utilisés pour administrer les microbicides.
Sans se laisser décourager, Stein a contacté Melinda Gates lors d’une conférence et l’a convaincue de donner les 8 millions de dollars nécessaires aux essais cliniques en Afrique du Sud et subsaharienne. En 2003, la Fondation Gates a accordé une subvention de 60 millions de dollars pour favoriser l’emploi de microbicides topiques afin de prévenir la transmission du VIH.
« Elle croyait profondément qu’il fallait directement parler aux gens », ajoute son fils.
Selon Gideon Stein, sa mère « se sentait profondément juive » et se sentait plus à l’aise en Israël, où elle se rendait trois fois par an, pour de longues périodes. Elle n’hésitait pas à prêter son appartement israélien, dont a par exemple profité le romancier Colum McCann pour y travailler sur son roman de 2020, Apeirogon.
Petite-fille d’immigrants juifs originaires d’Europe de l’Est, Mary Ann Efroymson a grandi dans l’Indiana, où son père dirigeait l’entreprise de bonneterie Real Silk Company et plus tard la société d’investissement Real Silk, Inc.
Après avoir obtenu son diplôme au Wellesley College, dans le Massachusetts, à l’apogée du mouvement des droits civiques, Stein, âgée de 22 ans, est partie s’installer dans le comté de Calhoun, en Caroline du Sud, pour les événements d’été Freedom organisés par la Southern Christian Leadership Conference. Elle y a inscrit des électeurs noirs et fait la connaissance de celui qui allait devenir l’un de ses mentors, Hope Williams, petit-fils d’esclaves et fondateur de la branche du comté de Calhoun de la NAACP. Des décennies plus tard, après la mort de George Floyd, Breonna Taylor et d’autres, Stein a été l’une des premières donatrices au Black Voices for Black Justice Fund, un fonds philanthropique.
« Mon père m’a appris les principes de base des droits civiques et humains », déclarait-elle en 2020 à Inside Philanthropy. « Il m’a dit les choses très clairement, et j’ai essayé de faire passer le message à d’autres, du fait que nous avons le devoir d’aider les autres. Nous avons la responsabilité de donner, que ce soit notre fortune ou notre entregent, pour aider les autres. Cela a guidé ma vie. »
Après avoir obtenu son diplôme en droit de l’Université George Washington, elle a travaillé avec le Département des services sociaux du district de Columbia et siégé à la Commission des nominations judiciaires de DC. Au milieu des années 1980, son père et son oncle ont décidé de créer une fondation familiale et elle les a convaincus de la laisser la diriger.
Au-delà de son action en Israël, le Fonds Moriah a soutenu des organisations communautaires progressistes comme Community Change, la D.C. Alliance of Youth Advocates, les bailleurs de fonds pour l’équité en matière de reproduction, Human Rights First et la National Coalition on Black Civic Participation. En 1998, le Fonds Efroymson, doté de 90 millions de dollars, a été créé grâce à un don du Fonds Moriah de la Central Indiana Community Foundation.
Son mariage en 1970 avec le conseiller philanthropique libéral Robert Stein, fondateur de Democracy Alliance, s’est terminé par un divorce mais ils sont restés en bons termes, a déclaré son fils. Robert Stein est décédé en 2022.
La disparition de Stein laisse dans la douleur ses enfants, Gideon Stein, de New York, ainsi que Dorothy et Noah Stein, de Washington, DC, et ses cinq petits-enfants.