Des milliers de personnes réclament la libération des otages à travers le pays
Sur la Place des Otages, l'ex-otage Iaïr Horn revient sur sa peur de mourir dans les geôles du Hamas ; arrestation de 62 manifestants ayant pris d'assaut le siège du Likud

Des milliers d’Israéliens ont participé mercredi à des manifestations dans tout le pays pour marquer le 600ᵉ jour depuis la prise d’otages par des terroristes palestiniens du Hamas lors de l’assaut sanglant du 7 octobre 2023. Des familles, d’anciens otages libérés et leurs soutiens ont attiré l’attention sur le sort des personnes toujours détenues dans la bande de Gaza.
Quelque 3 000 personnes se sont rassemblées sur la Place des Otages et dans la rue adjacente Shaul HaMelech à Tel Aviv pour participer à un rassemblement.
L’acteur Lior Ashkenazi, qui anime régulièrement les rassemblements du Forum des familles d’otages sur la place, a ouvert le rassemblement de mercredi soir par une diatribe furieuse contre l’incapacité du gouvernement à conclure un accord de cessez-le-feu et de libération des otages à Gaza ou à enquêter sur les failles sécuritaires qui ont conduit au pogrom du 7 octobre.
« Six cents jours depuis l’échec, et encore six cents jours d’échec », a-t-il lancé, sous les huées de la foule qui brandissait des photos des otages toujours retenus captifs.
« Six cents jours d’abandon, de tromperies du peuple, de dissimulation de l’enquête sur le plus grand échec de notre histoire », a déclaré Ashkenazi.
Iaïr Horn, qui a été relâché par le groupe terroriste palestinien du Hamas en février dans le cadre du dernier cessez-le-feu à Gaza, a déclaré qu’il ne savait pas si son jeune frère Eitan Horn, toujours otage, était encore en vie.

Iaïr a raconté sa peur de mourir à tout moment pendant sa captivité. « Dans les tunnels, on ne sait jamais si un terroriste va se lever un matin et vous tirer dessus, ou si le tunnel dans lequel vous dormez va exploser à cause d’une bombe », a-t-il déclaré.
Au cours d’une frappe israélienne, a-t-il raconté, « nos geôliers nous ont attrapés et nous avons commencé à courir dans un tunnel complètement tortueux, qui pouvait s’effondrer à tout moment, en essayant d’échapper aux bombardements et aux fumées toxiques ».
« Nous avons couru et couru jusqu’à ce qu’Eitan s’assaye, lourd de ses quelque 100 kilos… et me dise : ‘Je suis arrivé jusqu’ici. Laisse-moi’ », a raconté Iaïr.
« Je l’ai attrapé par le bras et je l’ai traîné, autant que j’ai pu, jusqu’à ce que je n’aie plus de forces. »
Puis, Iaïr a dit à son frère : « Si tu ne bouges pas, nous allons mourir ici tous les deux. »
« Alors il s’est relevé » a poursuivi Iaïr.
« Maintenant, je ne suis plus là pour le tirer par le bras. »
« Nous avons été épargnés par chance, mais cette chance est désormais épuisée », a-t-il déclaré.
« Au lieu de compter sur la chance, nous devons signer la fin de la guerre. Au lieu de compter sur la chance, nous devons ramener les 58 otages dès maintenant, les traîner par le bras jusqu’à un endroit sûr, à la maison. »
« Nous ne pouvons plus faire de sacrifices, ça suffit », a-t-il déclaré.
« Des soldats enrôlés qui donnent leur corps et leur âme – je préférerais qu’ils soient en vacances. Des réservistes courageux et expérimentés – je préférerais qu’ils emmènent leurs enfants à la maternelle tous les matins. »
« Je m’adresse donc à vous, Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu », a-t-il déclaré, tandis que la foule huait le nom du Premier ministre.
« Vous m’avez ramené à la maison. Recommencez. »
Ohad Ben Ami, qui a été relâché en même temps que Iaïr, a évoqué les cinq otages avec lesquels il était détenu dans un tunnel souterrain – Yosef Haïm Ohana, Bar Kupershtein, Elkana Bohbot, Segev Kalfon et Maxim Herkin. « Tous sont toujours là, dans le même froid nocturne, la même peur quotidienne. »
« Tout le monde est encore en vie, mais le mot clé ici est ‘encore’ », a souligné Ohad.
« Dans les dernières vidéos [publiées par le Hamas], je les ai vus, mais pas tels que je les connaissais », a-t-il déploré.

« La peur que j’ai vue dans leurs yeux ne me quitte pas. Leur état physique est épouvantable, leur état mental est encore pire. »
« Dans les tunnels, nous vivions de restes, physiquement et émotionnellement. Et au moment où je vous parle, ils sont toujours là, respirant encore, mais à peine », a-t-il expliqué.
« Ne les laissez pas tomber dans l’oubli », a-t-il supplié.
« Ne laissez pas le 601ᵉ jour arriver comme si rien ne s’était passé. »
Idit Ohel, mère de l’otage Alon Ohel, a déclaré que le pays ne pouvait pas manquer l’occasion de récupérer les captifs, affirmant que des sondages réguliers montraient que « le retour des otages était la clé de la réhabilitation » du pays.
Miriam Lapid, fondatrice du mouvement pro-implantations du Gush Emunim dans les années 1970, est devenue un symbole du traumatisme national en 1994 lorsque son fils et son mari ont été assassinés lors d’une attaque du Hamas près de Hébron, en Cisjordanie. Elle a également pris la parole lors du rassemblement, appelant le gouvernement à « déclarer immédiatement la fin de la guerre et le retour de tous les otages ».
« Vous ne devez laisser personne derrière », a-t-elle ajouté.
En mars, Lapid avait suscité quelques réactions dans les rangs de la droite lorsqu’elle avait vivement critiqué le gouvernement lors d’une manifestation à Jérusalem contre la décision de Netanyahu de limoger Ronen Bar, le chef de l’agence de sécurité intérieure du Shin Bet. Elle avait ensuite déclaré au site d’information religieux Kipa que son discours, dans lequel elle avait appelé les pratiquants à se joindre aux manifestations, avait été improvisé après qu’une personne dans la foule l’avait reconnue et lui avait demandé de prendre la parole.

Ailleurs, des manifestants anti-gouvernement ont affronté des policiers, dont certains à cheval, devant le Metzudat Zeev, le siège du parti Likud dans le centre-ville de Tel Aviv, où plus de 60 militants ont été arrêtés après que des dizaines de personnes ont pris d’assaut le bâtiment.
À l’intérieur, certains manifestants ont réussi à atteindre le bureau de Netanyahu, tandis que d’autres se sont attachés à la rampe d’escalier.
L’Organisation de soutien aux détenus a déclaré que les personnes détenues à « Metzudat Zeev Tel Aviv, transformé ce soir en ambassade du Qatar », ont été emmenées au poste de police de Salame, dans le sud de la ville.
Affichage de l’ambassade visant à se moquer des collaborateurs de Netanyahu, chef du Likud, accusés de liens criminels avec le Qatar, soutien du Hamas.

À Metzudat Zeev, les policiers ont fait reculer les manifestants sur le trottoir. Certains manifestants portaient des combinaisons orange et des masques à l’effigie de Netanyahu.
Les manifestants ont applaudi lorsqu’ils ont projeté un drapeau qatari avec la mention « Ambassade du Qatar » en hébreu et en arabe sur le bâtiment, qui porte le nom du leader sioniste révisionniste Zeev Jabotinsky et abrite un institut qui a publié ses écrits.
Les manifestants ont scandé « Rébellion civile » et « Ben Gvir est un terroriste », en référence au ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir, qui supervise la police.
La police a ensuite annoncé 62 arrestations pour trouble à l’ordre public et affrontements avec les forces de l’ordre. Deux personnes ont dû être soignées, dont une pour une fracture du bras.
Le Likud a qualifié ces troubles de « pogrom », affirmant que « la démocratie est attaquée » et comparant les manifestants au groupe de partisans de Trump qui ont envahi le Capitole américain le 6 janvier 2021 dans le but de faire échouer la certification des résultats de l’élection présidentielle.
« Ce sont des hors-la-loi dangereux qui tentent de semer la terreur politique et de saper les fondements de l’État », a déclaré le parti dans un communiqué.
À Jérusalem, plusieurs centaines de manifestants se sont rassemblés au parc HaMesila avant de se diriger vers le domicile du ministre des Affaires stratégiques Ron Dermer. Ce dernier n’a obtenu la libération d’aucun otage supplémentaire depuis sa nomination à la tête de l’équipe chargée des pourparlers en février.
« Vivants, vivants, nous les voulons vivants ! », ont crié les manifestants.
מפגינים נכנסו לתוך מצודת זאב התיישבו על המדרגות וקשרו עצמם למעקה, המשטרה מנסה לפנות אותם pic.twitter.com/oiFY3NFzSW
— Bar Peleg (@bar_peleg) May 28, 2025
« Il n’y aura aucun pardon pour un gouvernement qui abandonne son peuple. »
Alors que les manifestants approchaient du domicile de Dermer, les policiers ont déplacé une série de barricades, permettant aux manifestants de se rapprocher.
« Ron Dermer, démissionnez, vous n’avez pas d’autre choix », ont-ils scandé devant son domicile.
Parmi les orateurs présents au rassemblement figurait Shlomo Alfasa, beau-frère d’Avner et de Maya Goren, tous deux membres du kibboutz Nir Oz, tués le 7 octobre. Le corps d’Avner a été retrouvé dans les champs et celui de Maya a été emmené en captivité à Gaza. Alfafa a déclaré que Netanyahu et Dermer devaient ramener les 58 otages, dont 57 ont été enlevés lors du pogrom perpétré par le Hamas. Il a souligné qu’il n’était ni de droite ni de gauche, mais centriste.
« Notre Premier ministre n’avait pas obtenu de résultats, alors il s’est débarrassé du ministre de la Défense, puis du chef d’état-major de l’armée israélienne Herzl Halevi, puis du chef du Shin Bet, et maintenant, il est temps de se débarrasser de Ron Dermer », a déclaré Alfasa.
« Dermer, Dermer, démissionnez ! » ont scandé les manifestants.
« Nous ne voulons plus de vous. »
Alfasa a conclu son intervention en déclarant que Dermer n’avait jamais rencontré aucune des familles des otages. « Je suis ici, sortez et venez me parler », a-t-il ajouté.

À l’Université Reichman, les étudiants ont d’abord marché quinze kilomètres depuis Herzliya jusqu’à la Place des Otages à Tel Aviv, où ils ont rejoint leurs homologues de l’Université de Tel Aviv. À l’Université hébraïque de Jérusalem, les étudiants et les enseignants du campus du mont Scopus se sont rassemblés pour une manifestation de cinquante-huit minutes en hommage aux cinquante-huit otages toujours retenus captifs.
Des centaines de jeunes Israéliens suivant des programmes préparatoires à l’armée ont participé à une série de marches qui partaient toutes les deux heures de la Place des Otages à Tel Aviv et suivaient un parcours autour du complexe du ministère de la Défense situé à proximité.
Un cortège de dizaines de voitures a roulé de Latroun à Tel Aviv, et des centaines de personnes ont participé au sit-in silencieux organisé par Mishmeret 101 sur la place historique Bialik de Tel Aviv.
Maccabit Meïr, tante des frères jumeaux otages Ziv et Gali Berman, a déclaré que la victoire en Israël ne pouvait être remportée sans le retour des deux frères dans les bras de leur mère, ainsi que celui des autres otages. Ce n’est qu’alors que la société israélienne pourra guérir, a-t-elle ajouté.

« J’espère que vous vous souviendrez de vos espoirs et de vos rêves et que vous vous transmettrez vos pensées même si vous n’êtes pas ensemble », a déclaré Meïr à l’attention de ses neveux.
Meïr était accompagné de Ruti Strum, la mère d’Eitan et de Iaïr Horn, ainsi que de Dalia Cusnir, la belle-sœur des Horn, et de Niva Wenkert, la mère de l’ex-otage Omer Wenkert.
La chanteuse et compositrice Rona Kenan s’est jointe à eux et a doucement entraîné l’assemblée dans le chant « Sahki, sahki », une chanson contestataire écrite par Shaul Tchernikovsky il y a 120 ans.
Les groupes terroristes détiennent toujours 57 des 251 personnes enlevées par le Hamas le 7 octobre 2023. Parmi eux se trouvent les corps d’au moins 35 personnes, dont l’armée israélienne a confirmé la mort, et 20 seraient encore en vie. Les autorités israéliennes ont fait part de leurs vives inquiétudes concernant le sort de trois autres personnes.
Le Hamas a relâché 30 otages – 20 civils, 5 soldates et 5 ressortissants thaïlandais – ainsi que les corps de huit otages israéliens au cours de l’accord de cessez-le-feu en vigueur entre janvier et mars, puis un autre otage, un citoyen américaino-israélien, en mai, en guise de « signe de bonne volonté » envers les États-Unis.
Il avait précédemment libéré 105 civils au cours de la semaine de trêve de la fin novembre 2023, et quatre otages avaient été libérées auparavant, au cours des premières semaines de la guerre.
En échange, Israël a libéré quelque 2 000 terroristes palestiniens emprisonnés, des prisonniers sécuritaires et des suspects de terrorisme gazaouis arrêtés pendant la guerre.
Huit otages vivants ont été secourus par les soldats et les dépouilles de 41 otages ont été récupérées, notamment celles de trois Israéliens qui ont été tués accidentellement par Tsahal, ainsi que le corps d’un soldat tué en 2014.
Le corps d’un autre soldat tué en 2014, le lieutenant Hadar Goldin, est toujours détenu par le Hamas et compte parmi les 58 otages.