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Élevant Peretz et détrônant Herzog, le Parti travailliste montre qu’il finit par pardonner

Ancré dans les négociations de coalition de l’hiver 2016, le vote de mardi était une lutte entre 3 candidats qui se sont éloignés de leur base et ont quitté leurs partis

Marissa Newman est la correspondante politique du Times of Israël

Isaac Herzog, à gauche, chef de l'opposition et du Parti travailliste, avec le député travailliste Amir Peretz, le 12 avril 2016. (Crédit : Tomer Neuberg/Flash90)
Isaac Herzog, à gauche, chef de l'opposition et du Parti travailliste, avec le député travailliste Amir Peretz, le 12 avril 2016. (Crédit : Tomer Neuberg/Flash90)

Avec le recul, la fin de l’hiver et le début du printemps 2016 ont pu se montrer prémonitoires pour le futur du Parti travailliste, lançant une chaîne d’évènements qui a culminé mardi, quand les résultats du premier tour de l’élection à la tête du parti ont été annoncés.

Cela a commencé le 8 février 2016, avec un acte qui a à peine fait ciller Israël : le député Amir Peretz, ancien chef du parti, est officiellement redevenu travailliste après trois ans passés dans le parti Hatnua, qui forme, avec le Parti travailliste, l’Union sioniste.

Treize jours après, selon le quotidien Haaretz, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a assisté à un sommet secret dans la ville portuaire d’Aqaba, en Jordanie, avec John Kerry, alors secrétaire d’Etat américain, Abdel-Fattah el-Sissi, président égyptien, et Abdallah II, le roi de Jordanie, pour tenter de relancer les négociations de paix.

Selon les articles, Netanyahu, Sissi, et Isaac Herzog, alors chef du Parti travailliste, ont participé à une seconde réunion secrète, cette fois au Caire, en avril 2016, pour discuter des tentatives de reprise des négociations.

Ces réunions, selon Herzog, sont ce qui l’a poussé à négocier secrètement un accord de coalition avec Netanyahu. La manœuvre s’est cependant effondrée en mai de cette année-là, quand le Premier ministre a conclu un accord avec le parti de droite Yisrael Beytenu à la place.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, avec le chef de l'opposition Isaac Herzog pendant une cérémonie marquant le 50e anniversaire de la Knesset, le 19 janvier 2016. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, avec le chef de l’opposition Isaac Herzog pendant une cérémonie marquant le 50e anniversaire de la Knesset, le 19 janvier 2016. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Dans le cadre de l’accord de coalition, Netanyahu a alors limogé Moshe Yaalon, qui occupait le poste de ministre de la Défense, et a remis les clés du ministère à Avigdor Liberman, président du parti Yisrael Beytenu. Ce faisant, il a irrité celui qui était alors son ministre de l’Environnement, Avi Gabbay, du parti Koulanou.

Gabbay, qui s’était déjà opposé à l’accord controversé du gouvernement sur l’extraction de gaz offshore, a démissionné du gouvernement le mois suivant, en prononçant une tirade incendiaire dans laquelle il a accusé la coalition de mener Israël sur la voie de la destruction.

Même s’il avait été nommé par le chef du parti Koulanou, Moshe Kahlon, et n’était pas élu, Gabbay a ensuite traversé les lignes politiques et a rejoint le Parti travailliste, annonçant qu’il se présenterait à sa tête et défierait Netanyahu.

Avi Gabbay, alors ministre de l'Environnement, en août 2015. (Crédit : Marc Israel Sellem/Pool)
Avi Gabbay, alors ministre de l’Environnement, en août 2015. (Crédit : Marc Israel Sellem/Pool)

Mardi, 14 mois plus tard, Herzog a été détrôné après quatre tumultueuses années à la tête du parti, et le nouveau venu Gabbay affrontera Peretz au second tour lundi prochain.

Des négociations de coalition – un pas trop loin ?

Pour les électeurs du Parti travailliste, les négociations secrètes de Herzog pour rejoindre le gouvernement de Netanyahu en 2016 ont apparemment été trop loin.

Et ce n’est pas comme s’il n’avait pas tenté de persuader ses électeurs de ses bonnes intentions.

A l’époque, il y avait une opportunité historique pour faire avancer la paix entre Israël et les Palestiniens, a-t-il souligné à de nombreuses reprises, et les récents articles de Haaretz sur les réunions secrètes avec des dirigeants arabes semblent confirmer ceci.

Isaac Herzog, chef du Parti travailliste, avec son épouse Michal, le jour des élections pour la tête de son parti, le 4 juillet 2017. (Crédit : Miriam Alster/Flash90)
Isaac Herzog, chef du Parti travailliste, avec son épouse Michal, le jour des élections pour la tête de son parti, le 4 juillet 2017. (Crédit : Miriam Alster/Flash90)

Les discussions avec Netanyahu, que Herzog a démenties ad nauseam avant que la vérité ne soit finalement révélée par la presse, ont créé une forte division avec les députés travaillistes opposés à une coalition avec la droite, et qui ont eu le sentiment d’être marginalisés.

Dans les mois qui ont précédé l’élection, Herzog a choisi d’appeler les partis politiques à le rejoindre pour créer un bloc de centre gauche dans le but d’évincer Netanyahu. Il a continué sur cette ligne même quand des partis, comme le centriste Yesh Atid, ont directement rejeté ses ouvertures. Et même s’il a critiqué le Premier ministre depuis l’estrade de la Knesset, Herzog, pas si combatif, a précisé de nombreuses fois qu’il proposerait un filet de sécurité politique au Premier ministre sur tous les sujets liés à un potentiel processus de paix régionale.

Il semble que les efforts de construction de coalition de Herzog et ses piètres manœuvres politiques n’ont pas été oubliés par 84 % des électeurs du parti travailliste, qui ont choisi un autre candidat que lui mardi.

Etre fidèle à ton Parti travailliste ?

Mais si Herzog cherche une lumière au bout de ce qui apparait, à première vue, comme le tunnel de sa carrière, il doit chercher plus loin que le retour de Peretz et la montée de Gabbay, des preuves que la loyauté absolue au camp de l’un importe peu aux électeurs du parti sur le long terme.

Peretz, qui a lui-même été ministre de Netanyahu, s’est plongé dans la course à la direction du parti alors qu’il a changé deux fois de parti quand cela l’arrangeait politiquement, d’abord dans les années 1990 pour former le parti Am Ehad, qui a fusionné avec le Parti travailliste en 2005, puis en 2012, pour rejoindre le parti Hatnua de Tzipi Livni, qui, fin 2014, s’est lui aussi associé au Parti travailliste pour former l’Union sioniste.

Isaac Herzog, chef du Parti travailliste, entouré des députés Amir Peretz et Omer Bar Lev, le 14 mars 2016. (Crédit : Corinna Kern/Flash90)
Isaac Herzog, chef du Parti travailliste, entouré des députés Amir Peretz et Omer Bar Lev, le 14 mars 2016. (Crédit : Corinna Kern/Flash90)

L’on peut dire la même chose de Gabbay, qui est non seulement passé de la droite à la gauche, mais a été pris sur le fait en train de mentir il y a à peine quelques semaines.

Depuis le lancement de sa campagne, Gabbay a tourné autour du pot en définissant ses loyautés partisanes, se contentant de dire qu’il soutenait les « valeurs de gauche », mais ne se considérait pas comme « un gauchiste ». Pendant un débat organisé le mois dernier par le site d’informations Walla, il a déclaré avoir voté pour le Parti travailliste pendant la plupart des dernières élections. Interrogé directement par un autre candidat, le député Erel Margalit, qui lui a demandé s’il avait soutenu le Likud dans le passé, Gabbay a fermement répondu : « Jamais ».

Margalit a ensuite sorti son téléphone, et montré une interview de 2015 dans laquelle Gabbay disait avoir en fait voté une fois pour le Likud. Il a également dit avoir voté pour Tzipi Livni en 2013, et soutenu le parti Kadima d’Ariel Sharon. En ce qui concerne le Parti travailliste, il disait n’avoir voté pour le parti que quand il était dirigé par Yitzhak Rabin.

Le débat des primaires du Parti travailliste organisé par Walla News, le 4 juin 2017. (Crédit : capture d'écran Walla News)
Le débat des primaires du Parti travailliste organisé par Walla News, le 4 juin 2017. (Crédit : capture d’écran Walla News)

Pour tenter de clarifier ses déclarations sur le Likud, Gabbay avait dit aux médias israéliens qu’il avait été confus car en 2001 il avait voté pour Sharon, alors au Likud, et qui a fondé Kadima quelques années après.

Les résultats de mardi des trois premiers candidats, qui ont tous une histoire d’alliances politiques mouvantes, illustrent une base électorale travailliste qui est prête à pardonner aux politiciens de ne pas lui être totalement fidèles, du moins tant qu’ils gagnent les élections.

Elire les mêmes dirigeants, mais pas consécutivement

Les tendances de vote du Parti travailliste sont une autre raison qui pourrait expliquer la défaite de Herzog et la montée de Peretz. Depuis l’adoption de son système de primaire en 1992, le parti n’a pas réélu une seule fois l’un de ses dirigeants pour deux mandats consécutifs. Ehud Barak a certes été élu deux fois, mais à dix ans d’écart, en 1999 et 2009.

Cette tendance au retournement, ou au « zigzag », comme le pensent les Israéliens, présentée par Peretz, Gabbay et Herzog était aussi caractéristique de Barak, qui a quitté le Parti travailliste en 2011 pour créer l’éphémère Parti de l’indépendance, simplement pour pouvoir rester au gouvernement, dirigé par Netanyahu.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu et l'ancien Premier ministre Ehud Barak pendant la projection du documentaire sur l'opération Isotope de 1972 pour sauver l'avion Sabena détourné, au Cinema City de Jérusalem, le 11 août 2015. (Crédit : Hadas Parush/Flash90)
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu et l’ancien Premier ministre Ehud Barak pendant la projection du documentaire sur l’opération Isotope de 1972 pour sauver l’avion Sabena détourné, au Cinema City de Jérusalem, le 11 août 2015. (Crédit : Hadas Parush/Flash90)

Peretz pourrait bien suivre les traces de Barak et reprendre la tête du parti. Mais la nouveauté de Gabbay, et son ancienne street credibility de droite, des atouts importants dans une élection nationale, pourraient tenter les électeurs travaillistes, impatients de remettre leur parti au pouvoir, ce qui fait de lui un candidat sérieux.

Pendant les entretiens accordés mardi après les résultats, il s’est présenté lui-même comme le nouveau visage du parti, et son succès comme une preuve que les électeurs travaillistes « veulent du changement ». Plutôt que de rejoindre la coalition, a-t-il dit en attaquant Herzog, sous sa direction, le Parti travailliste aura vocation à former les coalitions.

Si Gabbay l’emportait lundi prochain, et il a souligné mardi qu’il avait l’élan pour le faire, le parti, qui ne cesse de baisser dans les sondages et semble pour l’instant destiné à rester dans l’opposition, pourrait signaler qu’il change de trajectoire.

Mais si Peretz battait Gabbay, réaffirmant ainsi la tendance travailliste à couronner à nouveau ses dirigeants déchus, et bien, voilà ce qu’il faut regarder, Isaac Herzog 2027.

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