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En Israël, le marché se prépare à baisse des perspectives de Moody’s

Le shekel continue de se déprécier, les investisseurs craignant que, suite aux avertissements de l'agence de crédit, la perspective ne passe bientôt de positive à stable

Sharon Wrobel est journaliste spécialisée dans les technologies pour le Times of Israel.

Ligne d'horizon du quartier financier de Tel Aviv. (Crédit : Elijah Lovkoff via iStock by Getty Images)
Ligne d'horizon du quartier financier de Tel Aviv. (Crédit : Elijah Lovkoff via iStock by Getty Images)

Le shekel a continué à s’affaiblir jeudi avant la publication des données sur l’inflation de vendredi et alors que les investisseurs attendent avec impatience une mise à jour de la notation de crédit d’Israël par Moody’s Investor Service.

La monnaie locale s’est dépréciée de 1 % à environ 3,66 pour un dollar américain et à 4,02 pour un euro, suite à des informations selon lesquelles l’agence de notation Moody’s est prête à publier une mise à jour de la notation du pays dès vendredi, bien que rien de tel n’ait été confirmé. Cette information survient dans un contexte de manifestations contre les efforts du gouvernement pour remanier en profondeur le système judiciaire, et alors qu’Israël subit une série d’attaques terroristes et a essuyé des salves de roquettes tirées depuis trois fronts différents.

« Le marché s’attend, ce qui semble raisonnable, à ce que Moody’s réduise les perspectives d’Israël de positives à stables et confirme la note de crédit A1 du pays, car l’agence s’est déjà montrée très critique à l’égard de la refonte judiciaire », a déclaré Jonathan Katz, économiste en chef chez Leader Capital Markets, au Times of Israel.

En avril dernier, Moody’s avait revu à la hausse la perspective économique d’Israël en la faisant passer de « stable » à « positive », confirmant la notation de crédit du pays à A1. Avant cela, le pays avait obtenu une perspective « positive » de Moody’s en juillet 2018, qui a été abaissée à « stable » en avril 2020 lorsque la pandémie de COVID-19 a commencé à prendre de l’ampleur.

Les manifestations de masse hebdomadaires dans tout le pays contre les efforts très controversés du gouvernement visant à remanier radicalement le système judiciaire se sont poursuivies même après que la coalition a mis en pause le processus législatif fin mars pour permettre un dialogue avec l’opposition.

Début mars, avant la pause, Moody’s avait déjà averti que si les changements proposés étaient mis en œuvre dans leur intégralité, ils « pourraient matériellement affaiblir la force du système judiciaire israélien (…) et, en tant que tels, être négatifs pour le crédit ».

Le logo de Moody’s Corp. sur un bâtiment de New York, au mois d’août 2010. (Crédit : TAP Photo/Mark Lennihan)

L’agence de notation a également mis en garde contre « les risques à long-terme pour les perspectives économiques d’Israël, en particulier les entrées de capitaux dans l’important secteur de la haute technologie ». Le secteur de la high-tech a longtemps été présenté comme le principal moteur de la croissance économique d’Israël, représentant 49 % du total des exportations et générant environ 15 % du PIB en 2022.

« Nous continuons de penser qu’il peut exister un large consensus politique sur l’orientation des politiques économiques et fiscales, malgré la fragmentation du paysage politique. Cependant, des indicateurs budgétaires et d’endettement plus solides pourraient ne pas suffire à compenser l’affaiblissement des institutions si le contenu des réformes judiciaires et la manière dont elles sont adoptées indiquent un tel affaiblissement », avait alors écrit Moody’s.

Bien que le processus législatif de la réforme du système judiciaire soit suspendu jusqu’à la fin des congés de Pessah de la Knesset, le projet de remanier le système judiciaire n’a pas été abandonné, alors que les solides fondamentaux économiques d’Israël, à savoir une croissance rapide et des finances publiques robustes, qui ont permis un redressement rapide du pays après la crise du COVID-19, sont en train de s’étioler, a fait remarquer Katz.

Au début du mois, l’OCDE a averti que le rythme de croissance économique du pays devrait se ralentir et que « les risques sont orientés à la baisse, en raison d’une forte incertitude au niveau mondial et national ». L’organisation prévoit un ralentissement du taux de croissance du PIB, qui devrait passer de 6,4 % l’année dernière à 3 % en 2023 et à 3,4 % en 2024.

Compte tenu de tous ces facteurs et de la « grande inconnue » que constitue l’orientation de l’initiative judiciaire, « la perspective positive d’Israël n’est pas justifiée », a déclaré Katz, ajoutant que la mise à jour de Moody’s inclura probablement aussi une forme d’avertissement selon lequel si Israël s’engage dans la voie de la mise en œuvre complète des changements judiciaires prévus, il pourrait risquer un abaissement de sa cote de crédit nationale.

Alex Zabezhinsky, économiste en chef de la société d’investissement Meitav Dash, partage l’avis de Katz selon lequel il est peu probable que Moody’s abaisse la note de crédit d’Israël, mais contrairement à Katz, il pense que l’agence de notation pourrait même confirmer ses perspectives pour l’heure.

Alex Zabezhinsky, économiste en chef de Meitav Dash. (Crédit : Rami Zarnegar)

« Depuis le commentaire de Moody’s en mars, la situation s’est quelque peu améliorée dans la mesure où le processus législatif de la réforme a été suspendu et que les parties ont entamé un dialogue en vue de parvenir à un compromis. En conséquence, Moody’s ne devrait pas abaisser la note de crédit d’Israël ni même modifier ses perspectives, mais plutôt attendre le résultat des récents efforts », a déclaré Zabezhinsky.

Au début du mois, les économistes de la Banque centrale d’Israël ont présenté une analyse des ramifications économiques potentielles en fonction de l’intensité des chocs au cours des trois prochaines années si les changements législatifs et institutionnels proposés conduisent à une augmentation de la prime de risque d’Israël. Dans le cas où le choc des changements législatifs s’atténue relativement rapidement, l’impact potentiel pourrait être une baisse annuelle de 0,8 % du PIB et coûter à l’économie 14 milliards de shekels. Si les chocs dus aux changements persistent, l’impact négatif est estimé à environ 2,8 % du PIB, soit 50 milliards de shekels par an.

Les investisseurs attendent également la publication – vendredi – de l’indice des prix à la consommation (IPC) de mars, une mesure de l’inflation qui suit le coût moyen des biens ménagers. L’IPC a oscillé au-dessus de 5 % en termes annuels au cours des six derniers mois, en deçà de la fourchette cible du gouvernement de 1 % à 3 %.

Les économistes prévoient que l’inflation aura augmenté de 0,4 % à 0,5 % au cours du mois dernier et de 5 % à 5,1 % au cours des 12 derniers mois. L’inflation s’est accélérée à un rythme plus rapide que prévu en février, portant l’inflation annuelle sur les 12 derniers mois à 5,2 %. Les analystes s’attendaient à un taux annuel de 5 %.

La hausse de l’inflation s’est produite malgré les mesures prises par la Banque d’Israël pour la freiner. Au cours de l’année écoulée, la Banque centrale a régulièrement augmenté son taux d’intérêt de référence, qui est passé d’un niveau record de 0,1 % en avril dernier à 4,5 % au début de ce mois, afin de tenter de freiner la croissance des prix.

L’inflation a été plus lente à diminuer en partie à cause de la faiblesse du shekel, qui rend les produits importés plus chers. Depuis le début de l’année, la monnaie locale s’est dépréciée d’environ 4 % par rapport au dollar américain. L’indice du dollar américain, qui mesure le billet vert par rapport à six grandes monnaies mondiales, a baissé d’environ 2 % depuis le début de l’année 2023.

Jonathan Katz, économiste en chef chez Leader Capital Markets. (Autorisation)

Katz, qui prévoit une augmentation mensuelle de 0,5 %, et Zabezhinsky, qui s’attend à une hausse de 0,4 %, ont tous deux cité les augmentations saisonnières des prix de l’habillement, les coûts de location et l’impact d’un shekel plus faible sur les frais de voyage comme étant les principaux facteurs de l’IPC de mars.

Au début du mois, le gouverneur de la Banque centrale, Amir Yaron, a déclaré que la « forte volatilité » du shekel au cours des dernières semaines était en partie due aux récents événements survenus dans le pays.

« Depuis le début de l’année, le shekel s’est nettement déprécié par rapport au dollar et en termes de taux de change effectif nominal, et s’est même éloigné de la forte corrélation qui existait entre le S&P 500 et le taux de change », a déclaré Yaron.

En ce qui concerne l’avenir, Katz s’attend à ce que l’inflation soit plus élevée dans les mois à venir, citant l’effet de décalage d’un shekel plus faible qui rend les biens importés tels que les appareils électroménagers et les nouveaux véhicules plus chers, ainsi que les prix mondiaux de l’énergie plus élevés.

Au cours des 12 prochains mois, Katz s’attend à ce que l’inflation diminue pour se situer entre 3,1 % et 3,2 %, ce qui reste supérieur à la fourchette cible de la Banque centrale de 1 % à 3 %, tandis que Zabezhinsky prévoit un ralentissement de la croissance des prix à 2,7 % au cours de la même période.

Dans l’hypothèse d’un compromis raisonnable ou si la réforme du système judiciaire est abandonnée, Katz et Zabezhinsky prévoient tous deux une nouvelle hausse des taux d’intérêt de 25 points de base à 5 % lors de la prochaine réunion de la Banque d’Israël en mai.

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