Heureux comme un Israélien en Jamaïque ?
Les Israéliens venus sur l’île le font souvent de manière temporaire ; mais quelques-uns restent et tentent de préserver leur identité

KINGSTON – Israël Pinchas est venu en Jamaïque en 1991 pour un contrat de travail. Trois mois après avoir terminé son projet, il a voyagé en Israël. Mais il ne pouvait plus faire sortir la Jamaïque (ou sa petite amie…) de son esprit.
Et trois mois plus tard, il était de retour sur l’île. Maintenant, il a un emploi stable chez Gore Developments Ltd, une entreprise de construction – et une femme jamaïcaine.
Dans son métier, Pinchas recrute des employés pour divers projets de développement, qui vont de quartiers avec 1 000 maisons à construire, au développement de ponts et routes. Chaque projet comprend environ 400 travailleurs, et cela apporte presque toujours de la main-d’oeuvre étrangère. Plusieurs fois, dit-il, il a choisi des amis ou des fils d’amis qu’il a rencontrés lors de son service dans l’armée israélienne.
Actuellement, déclare Pinchas, trois Israéliens travaillent pour lui – deux Israéliens juifs et un druze.
« Je ne dirais pas qu’ils sont plus qualifiés, mais ils sont plus ambitieux » estime Pinchas, comparant les travailleurs israéliens aux jamaïcains.
Pinchas fait partie des quelques dizaines d’Israéliens résidant en Jamaïque, et parmi quelques centaines dans les Caraïbes. Personne ne dispose d’un nombre exact à leur sujet.
Il y a dix ans, selon Pinchas, il y avait une communauté israélienne plus importante et plus visible en Jamaïque. Mais au fil des ans, ce groupe s’est réduit. Ceci est du en partie, d’après certains, parce que plusieurs entreprises israéliennes ayant des filiales en Jamaïque – comme Ashtrom Building Systems et Zim Integrated Shipping Services – se concentrent dorénavant sur l’embauche locale.
Avi Azarzar, un Israélien qui vit à l’étranger depuis deux décennies, a déménagé avec sa famille en Jamaïque en provenance du Nigeria, il y a quelques mois pour devenir directeur général d’Ashtrom en Jamaïque. Il affirme que la société emploie 400 personnes, mais qu’il est actuellement le seul Israélien. Yuval Maoz, qui a été récemment tué dans un accident tragique, avait la fonction de directeur général des usines.

« Je travaille pour cette société depuis 20 ans » déclare Avi Azarzar. « C’est une entreprise internationale. Maintenant, nous essayons aussi de faire en sorte que les populations locales jouent un rôle clé dans la société, il y a donc beaucoup moins d’Israéliens dans chacune de ces entreprises internationales ».
Ashtrom continue d’être une société de développement et de construction de premier plan en Israël ; elle est cotée à la Bourse de Tel Aviv.
Azarzar affirme qu’il connait les Israéliens de l’île et qu’« en tant qu’Israéliens nous nous voyons, nous passons les fêtes ensemble » explique-t-il. Un ami travaille pour une autre entreprise de construction. Un autre est impliqué dans l’irrigation de l’île. Un troisième est employé par une entreprise de transport.
« Nous dînons ensemble parfois, mais je passe plus ou moins tout mon temps au bureau ».
La plupart des Israéliens, selon Shalom Hodara, un autre expatrié vivant et travaillant sur l’île, élisent domicile à Kingston, qui abrite le plus grand groupe de Jamaïcains d’origine juive – un peu moins de 400. C’est aussi ici qu’est située la seule synagogue de l’île, Shaaré Shalom. Il est vrai, reconnaît Hodara, que ni lui ni la plupart de ses amis ne participent aux activités de la synagogue.
« C’est vrai que c’est un beau pays » estime Hodara. Et qu’il y a du travail. Même si c’est variable.
La plupart du temps, les Israéliens viennent pour un projet de quelques années et « puis ils rentrent à la maison » explique-t-il.
Paul Matalon, un Juif qui est né et a grandi sur l’île, a vécu en Jamaïque la plus grande partie de sa vie. Il explique au Times of Israel qu’il a connu « pas mal » d’Israéliens au cours des années, dont certains sont devenus de bons amis. Pour Matalon, l’un des facteurs qui conduit les Israéliens à s’éloigner de la Jamaïque est sa culture des mariages mixtes.
« Les Israéliens ne veulent pas de mariages mixtes » estime Matalon. « Au moindre soupçon, ils envoient leurs enfants en Israël, puis ils reviennent eux aussi ».
Cependant, la femme d’Israël Pinchas est convertie au judaïsme, bien qu’il insiste sur le fait qu’elle soit d’origine juive – ce qui n’est pas rare en Jamaïque. Selon Ainsley Henriques, qui est un peu le généalogiste de la communauté, près d’un demi-million de Jamaïcains auraient du sang juif.
« Les Jamaïcains représentent une mosaïque, un groupe très coloré de personnes » estime Henriques.
D’origine israélienne, Pinchas dit que sa famille n’est pas religieuse, mais il veut que ses trois enfants « sachent d’où ils viennent ».
En grandissant en Israël, il fuyait les dîners du vendredi soir en famille pour aller au pub ou dans une soirée. Mais maintenant, il a redécouvert la beauté des rituels du Shabbat alors qu’il vit en Jamaïque.
Le vendredi soir, la femme de Pinchas allume les bougies tandis que lui se rend à Shaaré Shalom où un repas communautaire a lieu. Ses enfants fréquentent la Hillel Academy, l’école juive locale, et parfois il doit « les traîner » pour aller à la synagogue.
Pinchas explique qu’après ses dix premières années sur l’île il a pensé à la quitter, mais plus aujourd’hui. « J’aime les gens avec qui je travaille » assure-t-il. « Et puis je n’ai jamais ressenti de racisme ou d’antisémitisme en Jamaïque… Les gens sont tout simplement vrais et honnêtes ».
« Mon cœur sera toujours à Jérusalem, mais la Jamaïque est ma maison ».
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