« Je dois me dissocier » : Une ex-otage du Hamas évoque les abus sexuels subis à Gaza
Moran Stela Yanai, détenue avec Noa Argamani parle "des inspections [corporelles] nécessaires" et de son sentiment de culpabilité à avoir été libérée, elle dit être encore « là »

Moran Stela Yanaï, ex-otage à Gaza qui a été libérée fin novembre, a fait allusion aux abus sexuels qu’elle a subis pendant sa captivité, mais dit qu’elle n’est pas encore prête à en parler en détail.
« Il y avait cette peur constante d’être violée à tout moment. Et puis un jour passe, et un autre passe. Alors on se prépare – on se néglige », a-t-elle expliqué. « Je ne suis pas particulièrement belle, je ne sens pas très bon. Vous savez, pour les repousser. Je suis vieille, j’ai 40 ans, je suis ‘hatiar‘ », a-t-elle confié à l’émission d’investigation « Uvda » de la Douzième chaîne, en utilisant un terme d’argot arabe qui signifie une personne âgée.
Yanaï, âgée de 40 ans, a été enlevée le 7 octobre lors du festival de musique Supernova au kibboutz Reïm. Ce festival a été le théâtre du massacre sauvage de près de 360 personnes et de nombreux enlèvements par des terroristes du groupe palestinien du Hamas. Elle a été libérée avec 104 autres personnes lors d’une trêve d’une semaine fin novembre, après avoir passé 50 jours en otage dans la bande de Gaza.
Son témoignage illustre la réticence de certaines victimes d’agressions sexuelles à partager leurs souffrances personnelles en public, alors que les militants anti-Israël et les médias internationaux cherchent à jeter le doute sur les allégations de viols et autres abus sexuels commis par des terroristes du Hamas le 7 octobre et pendant leur captivité à Gaza.
Yanai a expliqué que leurs ravisseurs leur faisaient subir « des inspections [corporelles] nécessaires lorsque nous arrivions à certains endroits », refusant de donner plus de détails.

« De mon point de vue, le harcèlement sexuel dont j’ai été victime ne correspond pas tout à fait à la définition du terme », dit-elle en s’émouvant. « Lorsque [les otages] reviendront, je m’occuperai de la définition exacte de ce terme. »
« Pour l’instant, je dois m’en dissocier. Parce que, quelle que soit la façon dont vous voyez les choses, ils vous ont pris votre liberté, ils vous ont tout pris, vous n’avez rien, rien n’est réellement à vous, vous ne vous appartenez pas. La seule chose qui vous appartient, c’est ce que vous avez ici », dit-elle en faisant un geste vers sa tête.
Yanaï a révélé qu’elle a été détenue avec Noa Argamani, 26 ans, enlevée elle aussi lors de la rave-party, le 7 octobre. Argamani apparaît dans l’une des premières vidéos diffusées par le Hamas pendant le massacre à la fête de la musique Supernova, assise à l’arrière d’une moto derrière son ravisseur du Hamas, en train de crier « Ne me tuez pas ».
Yanaï a révélé qu’a sa libération, elle pensait qu’Argamani serait également libérée dans les jours à venir et qu’elle ressent une immense culpabilité d’avoir été la seule à être libérée.
Le moment où, en novembre, les ravisseurs leur ont annoncé que l’une d’entre elles serait libérée a été « absolument épouvantable », dit-elle. « C’était comme une émission de télé-réalité. Ils nous ont fait asseoir. Un terroriste est entré et nous a dit : ‘L’une d’entre vous va rentrer à la maison' », dit-elle en faisant un geste du doigt d’une personne à l’autre pour illustrer le processus de sélection.
Elle a également révélé qu’elle avait été détenue au moins une partie du temps avec Itay Svirsky, 38 ans, qui a été tué en captivité.

« Je ne suis pas [vraiment] là », dit-elle. « Tout ce que je fais […] [boire un café, faire des courses, me promener] me fait sourire quelques instants parce que c’est agréable… mais ce sourire disparaît aussitôt, parce que je n’arrête pas de penser qu’il y reste encore [des femmes otages] assises sur le même matelas que celui sur lequel j’étais assise il y a à peine quelques instants ».