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La communauté internationale au défi de l’insécurité alimentaire

L'invasion de l'Ukraine par la Russie a contribué à aggraver les pénuries alimentaires auxquelles sont confrontés des pays parmi les plus pauvres du monde après la crise du COVID

Une employée de l'AJC donne des produits alimentaires à un membre de la communauté juive de Kharkiv, en Ukraine. (Crédit : Avec l'aimable autorisation du JDC)
Une employée de l'AJC donne des produits alimentaires à un membre de la communauté juive de Kharkiv, en Ukraine. (Crédit : Avec l'aimable autorisation du JDC)

La communauté internationale entend se mettre en ordre de marche pour lutter contre l’insécurité alimentaire croissante dans le monde, exacerbée par une convergence de crises, l’invasion russe de l’Ukraine et le manque d’engrais.

Rassemblés mardi en marge de l’Assemblée générale de l’ONU à New York, les États-Unis, l’Union européenne, l’Union africaine, ainsi que l’Espagne, doivent co-présider une réunion ministérielle sur ce thème, censée relever le défi posé par cette insécurité alimentaire, elle-même facteur d’instabilité.

Cette réunion intervient dans le sillage du G7 en juin au cours duquel les grandes puissances avaient promis de consacrer près de 5 milliards de dollars pour lutter contre l’insécurité alimentaire.

« L’un des thèmes sur lequel nous allons passer beaucoup de temps et d’énergie cette semaine c’est le défi posé par l’insécurité alimentaire », a relevé lundi le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, aux côtés du président du conseil yéménite, Rashad al-Alimi, dont le pays ravagé par des années de conflit est lui-même bénéficiaire de l’aide alimentaire.

« Comme nous avons pu le constater ces dernières années à cause de (la pandémie) de COVID-19, et avant cela en raison de la crise climatique, et plus récemment, à cause de l’agression russe de l’Ukraine, une profonde insécurité alimentaire » frappe des centaines de millions de personnes à travers le monde, a-t-il affirmé devant la presse.

Les États-Unis ont fait de la sécurité alimentaire une priorité diplomatique non sans arrières pensées politiques leur permettant de cibler la responsabilité de la Russie. D’un autre côté, de nombreux pays du sud insistent également sur ce thème dans le contexte élargi de la crise climatique et de l’énergie.

M. Blinken a en particulier souligné le caractère « vital » de préserver à tout prix l’accord dit de la « mer Noire » qui permet d’acheminer par bateau les céréales ukrainiennes dont dépendent de nombreux pays du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord notamment.

Cet accord signé par la Russie et l’Ukraine, et validé par les Nations unies et la Turquie en juillet, a permis la reprise de l’exportation des céréales ukrainiennes par un corridor sécurisé.

L’invasion de l’Ukraine par la Russie a contribué à aggraver les pénuries alimentaires auxquelles sont confrontés des pays parmi les plus pauvres du monde déjà affectés par la pandémie qui a fortement perturbé les circuits de distribution, et par la crise climatique.

Selon un récent rapport américain du Conflict Observatory, environ 15 % de la capacité de stockage de céréales de l’Ukraine a été perdue depuis le début de la guerre avec la Russie, en février dernier, provoquant des effets néfastes pour la sécurité alimentaire mondiale.

Ces pertes importantes remettent en cause la capacité de l’Ukraine à poursuivre son rôle de grenier à blé de nombreux pays, qui en dépendent pour leurs approvisionnements en blé, maïs et tournesol notamment.

Champs de blé en plein été (août) en Ukraine, Oblast de Lviv. (Crédit : © Raimond Spekking /CC BY-SA 4.0)

Besoin d’engrais

« Il apparaît clairement que la perturbation actuelle des chaînes d’approvisionnement alimentaire et la guerre en Ukraine vont impacter les prochaines récoltes. Il y a environ une à deux récoltes par an et nous le voyons déjà », prévient Alvaro Lario, qui préside la Fonds international pour le développement de l’agriculture (Fida), en insistant également sur le problème lié aux engrais dont la Russie est un important producteur.

« Cela va être dévastateur l’année prochaine (…) peut-être pire que pendant le COVID », dit-il dans une interview à l’AFP.

L’expert parle d’une convergence de crises – climatique, l’épidémie de COVID et les conflits – et de la nécessité d’investir des « centaines de milliards de dollars » par an pour changer de modèle de développement.

« On connaît les solutions et on a les institutions pour cela. Ce qui fait défaut actuellement c’est la volonté politique, en termes d’investissements », ajoute-t-il.

Dans un rapport conjoint diffusé en juillet, la FAO, le Fida, l’Unicef, le Programme alimentaire mondial (PAM) et l’Organisation mondiale de la santé (OMS) assuraient « qu’entre 702 et 828 millions de personnes ont été touchées par la faim en 2021 », soit environ 9,8 % de la population mondiale.

C’est 46 millions de plus qu’en 2020 et 150 millions de plus qu’en 2019, deux années marquées par l’épidémie de COVID-19 qui a durablement affaibli les systèmes alimentaires.

« En 2022, il y a assez de nourriture dans le monde – le problème est sa distribution irrégulière. Mais si nous ne stabilisons pas le marché des engrais en 2022, il n’y aura tout simplement pas assez de nourriture en 2023 », a lancé récemment le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, dans un cri d’alarme.

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