La quête de reconnaissance des Juifs d’Ouganda
La communauté espère aussi que cette reconnaissance leur offrira une protection supplémentaire, elle qui fut persécutée dans les années 1970 sous la dictature d'Idi Amin Dada

Dans une pièce éclairée à la bougie, le rabbin Gershom célèbre en ce vendredi soir le Kiddouch, une cérémonie de sanctification d’un jour saint, tandis que son épouse Tzieorah ôte le linge protégeant le pain traditionnel juif.
« Chabbat shalom ! » lancent les invités en arrivant : la scène est familière à toute famille de confession juive dans le monde, à cette différence près qu’ici, dans ce village de l’est de l’Ouganda, le repas du Chabbat est composé d’un ragoût de chèvre, de bananes vertes pilées et d’ananas du jardin pour le dessert.
Gershom est le leader spirituel des Abayudaya, une petite communauté de Juifs africains installée à proximité de la ville de Mbale, sur les contreforts du mont Elgon, non loin de la frontière avec le Kenya.
Recevez gratuitement notre édition quotidienne par mail pour ne rien manquer du meilleur de l’info Inscription gratuite !
Les Abayudaya espèrent que la visite lundi en Ouganda du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu sera synonyme de liens accrus avec les Juifs du monde entier.
Fondateur charismatique
Le fondateur de la communauté, Semei Kakangulu, était un officier ougandais converti par les missionnaires protestants mais qui se tourna ensuite vers le judaïsme au début du 20e siècle.
« Il découvrit la vraie religion et la vraie signification du jour du Chabbat, le fait que la circoncision était obligatoire et il commença à observer le régime alimentaire casher. Il devint un Juif », résume Joab Jonadab, le frère du rabbin Gershom.
L’influence de Kakungulu grandit rapidement au sein de sa communauté. « Mon père fut un de ses premiers disciples », raconte Gershom. « A la fin de la première année, il y avait 8 000 nouveaux Juifs ».
Mais lorsque leur leader charismatique mourut en 1928, les Abayudaya perdirent de nombreux adeptes, convertis par des missionnaires chrétiens zélés. La communauté fut réduite à moins de 1 000 personnes.
Dans les décennies suivantes, les Abayudaya survécurent dans un relatif isolement et, sans liens avec le monde juif extérieur, développèrent un culte syncrétique, mélangeant par exemple les prières juives avec des mélodies africaines.
Pour autant, leur volonté de reconnaissance n’a jamais faibli et leur persévérance fut récompensée une première fois courant 2015.
« L’année dernière, l’Agence juive pour Israël nous a reconnus en tant que Juifs pour la première fois. Nous espérons que notre Premier ministre Netanyahu lèvera les restrictions pour les visas afin que nous puissions nous rendre en Israël, y étudier et prier », explique Israel Siridi, le « mohel » de la communauté, en charge des circoncisions.
La répression sous Amin Dada
Quelques jours avant la visite de M. Netanyahu, Gershom a réuni les membres de la communauté sous un acacia pour leur annoncer une bonne nouvelle : un rabbin israélien venait de lui écrire pour lui annoncer que le ministre de l’Intérieur était sur le point « de reconnaître officiellement les Abayudaya en tant que Juifs ».
La communauté espère aussi que cette reconnaissance leur offrira une protection supplémentaire, elle qui fut persécutée dans les années 1970 sous la dictature d’Idi Amin Dada.
« Quand Amin Dada était président, il interdit le judaïsme (…) Ses soldats détruisirent notre synagogue, nos aînés furent jetés en prison, torturés et tués », rappelle M. Jonadab. « Amin disait que l’Afrique est pour les Africains et il ne nous voyait pas assez Africains ».
A présent, la communauté se porte plutôt bien, grâce, selon Jonadab, au président ougandais Yoweri Museveni et à ses 30 ans au pouvoir marqués par la stabilité du pays.
Mais, comme le rappelle Gershom, « les Abayudaya demeurent une toute petite communauté ».
« Vivre comme nous le faisons, une petite communauté de Juifs isolés au coeur de l’Afrique, pose un problème de sécurité. C’est pourquoi la reconnaissance par Israël a tellement d’importance à nos yeux ». Si un malheur s’abattait sur les Juifs d’Ouganda, alors le monde entier en serait informé ».
Comptez-vous sur le Times of Israël en français pour vous informer de manière précise et pertinente sur Israël, le Moyen Orient et le Monde juif ? Si la réponse est oui, n'attendez plus pour rejoindre la Communauté du Times of Israël !
En contribuant avec la somme de votre choix, une fois par mois ou une fois par an, vous pouvez :
- soutenir un journalisme indépendant et de qualité
- profiter d'une lecture sans publicité sur le site, la version mobile et les e-mails
Nous sommes ravis que vous ayez lu X articles du Times of Israël le mois dernier.
C'est pour cela que nous travaillons chaque jour : pour offrir aux lecteurs avisés, comme vous, une couverture médiatique pertinente sur Israël, le Moyen Orient et le Monde juif. Contrairement à de nombreux autres médias, notre contenu est accessible gratuitement - sans paywall surgissant dès le premier paragraphe. Mais notre travail s'avère de plus en plus coûteux. C'est pourquoi, nous invitons les lecteurs, qui le peuvent et pour qui le Times of Israël en français est devenu important, à nous soutenir en rejoignant la Communauté du Times of Israël en français. Pour la somme de votre choix, une fois par mois ou une fois par an, vous pouvez vous aussi contribuer à ce journalisme indépendant de qualité et profiter d'une lecture sans publicité.