L’absence d’un seul mohel empêche des dizaines d’hommes de finaliser leur conversion
L'autorité gouvernementale, chargée de l'inspection (de 10 secondes) de la circoncision pour être considéré juif, a accumulé un retard conséquent en raison de l'absence d'un employé
La réussite du test pour se convertir au judaïsme est le fruit d’années d’études, d’un dévouement considérable et d’un changement radical de mode de vie. Ce test est mené par trois juges rabbiniques orthodoxes agréés par le Grand Rabbinat et chargés d’approuver ce type de processus.
C’est pourquoi, lorsque l’un de ces jeunes hommes a récemment réussi son test, il pensait avoir franchi le dernier obstacle pour réaliser son rêve d’immigrer en Israël conformément à la Loi du Retour prévue pour les Juifs et leurs proches.
Mais cette réussite s’est avérée n’être que le début d’une nouvelle bataille plus frustrante pour le converti, qui a parlé au Times of Israel sous couvert d’anonymat afin de ne pas compromettre son processus de conversion en cours.
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La seule et unique raison pour laquelle sa conversion et sa naturalisation ont été retardées pendant des mois est une dernière formalité que lui et d’autres personnes dans sa situation n’ont pu remplir depuis l’année dernière : un contrôle de 10 secondes de leur circoncision par un mohel, une personne dont le métier consiste à effectuer cette procédure.
Ce retard serait dû à l’absence d’un seul employé de l’autorité israélienne chargée de la conversion, et qui empêcherait des dizaines de personnes de finaliser leur conversion et de passer à d’autres étapes importantes de leur vie, et notamment, leur mariage. Les critiques affirment que le retard pris par l’Autorité témoigne d’une indifférence et d’une incompétence plus larges dans la gestion par l’État de la conversion au judaïsme et constitue une nouvelle preuve de la nécessité d’une réorganisation.
L’Autorité de la conversion, créée en 2000 pour harmoniser et centraliser les conversions reconnues par l’État, « a prouvé à maintes reprises qu’elle impose des obstacles bureaucratiques inutiles aux personnes qui souhaitent réellement se convertir, au lieu de les accueillir et de faciliter leur démarche », a déclaré Seth Farber, un rabbin orthodoxe qui dirige l’organisation à but non lucratif ITIM, qui aide les juifs à naviguer au sein des institutions religieuses.
Selon les sources de Farber, le seul mohel au service de l’Autorité de conversion a cessé d’exercer ses fonctions pour des raisons inconnues.
Interrogé par le Times of Israel, un porte-parole du bureau du Premier ministre, qui est responsable de l’Autorité de conversion, a reconnu que les services de brit milah avaient été suspendus, mais a insisté sur le fait qu’ils reprendraient bientôt. Le porte-parole a refusé de répondre à l’affirmation selon laquelle il ne s’agirait que d’un seul employé qui aurait interrompu le travail, ou aux questions concernant les raisons pour lesquelles d’autres mohalim n’ont pas été sollicités pour désengorger les services.
Le communiqué du porte-parole, qui fait suite à de nombreuses lettres envoyées par ITIM demandant à l’autorité de conversion d’agir, indique que « récemment, pour plusieurs raisons, qui ne sont pas nécessairement de la responsabilité de l’Autorité de conversion, il n’a pas été possible de procéder à des inspections et à des circoncisions juives sur des hommes en cours de conversion. Nous sommes heureux d’annoncer qu’une solution adéquate a été trouvée et nous espérons que le retard sera rattrapé dans les semaines à venir. »
L’Autorité des conversions « fait tout son possible pour s’assurer que les candidats se convertissent dans la dignité, avec le soutien et l’accompagnement maximum », a ajouté le porte-parole.
Le converti qui a parlé au Times of Israel a décrit une expérience différente.
« L’Autorité des conversions ne m’a jamais dit où j’en étais. J’ai eu l’impression qu’on me faisait tourner en rond sans aucune clarification », a-t-il déclaré.
Pour ce converti, qui se trouve en Israël avec un visa de touriste qu’il doit renouveler en quittant le pays tous les trois mois, cela signifie qu’il a commencé sa vie en Israël sans savoir s’il pourrait y rester.
Des dizaines d’autres, dont un grand nombre est constitué de citoyens israéliens qui ont grandi ici après avoir immigré de l’ex-Union soviétique, attendent l’inspection pour pouvoir épouser leur femme juive lors d’une cérémonie de mariage religieux – le seul service disponible en Israël, car le pays ne reconnaît pas les mariages civils célébrés sur son territoire.
Le converti a ajouté que les mois passés à se demander quand l’inspection aurait lieu ont éclipsé ses doutes initiaux quant à la nécessité de cette inspection.
« D’un côté, je comprends tout à fait qu’ils aient besoin de preuves », a déclaré le converti. « Mais d’un autre côté, des rabbins réputés et un mohel bien connu ont déjà supervisé ma milah et attesté qu’elle était casher. Alors pourquoi dois-je être inspecté ? Cela me semble irrespectueux, non pas tant à mon égard qu’à l’égard de l’autorité des rabbins qui se sont portés garants de la milah« , a-t-il déclaré.
Farber reconnaît lui aussi la nécessité d’une inspection, du moins dans certains cas. « C’est une situation délicate voire gênante. Mais j’ai personnellement été impliqué dans des cas où, deux jours avant le mariage, il s’est avéré que le marié n’était pas circoncis du tout », a-t-il déclaré.
« Dans certaines situations, c’est absolument justifié, voire nécessaire. Mais dans d’autres, ce n’est pas le cas. C’est là que la sensibilité et l’attention individuelle aux cas, qui manquent à l’autorité de conversion, doivent entrer dans l’équation ».
Le converti a déclaré qu’il gardait l’espoir que sa conversion et sa naturalisation seraient finalisées cette année. Il envisage son avenir à long terme en Israël. Il a trouvé une communauté juive orthodoxe dans laquelle il se sent accepté, où il a des amis et un cercle social très uni. Il a un autre cercle de ce type dans un club sportif qu’il a rejoint.
Ce sens de la communauté est précieux et essentiel pour le converti, qui a décidé de devenir juif alors qu’il vivait à l’étranger, dans un pays anglophone, suite à une immersion progressive dans la vie spirituelle de ses amis juifs.
Mais l’incertitude a fait son œuvre, et le nouveau converti envisage la possibilité que ses efforts et ses rêves soient finalement contrecarrés par la bureaucratie, qui, dans certains cas, est compliquée par l’attitude dure des rabbins qui cherchent à saper l’autorité de leurs homologues de la diaspora, souvent aux dépens de convertis sincères.
« Je suis conscient que cela pourrait ne pas aboutir. Il se peut que je doive passer un an à vivre dans le pays avec le statut de touriste, sans bénéficier de soins de santé, sans pouvoir travailler, en devant effectuer des allers-retours », a déclaré le converti. « J’ai décidé de me donner un an et que si ça marchait, c’était formidable. Sinon, j’aurai vécu une expérience extraordinaire à Jérusalem ».
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