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Le menu (très chargé) de la Knesset cette semaine

La date butoir du 21 décembre approchant à grands pas, le chef du Likud doit faire entériner trois grands projets de loi pour mettre sa coalition sur pied

Carrie Keller-Lynn est la correspondante politique et juridique du Times of Israël.

Photo composite : Vue du plénum vide de la Knesset le 14 novembre 2022 ; Encart : Le député du Likud Yariv Levin après des négociations de coalition dans un hôtel de Jérusalem, le 30 novembre 2022/ (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)
Photo composite : Vue du plénum vide de la Knesset le 14 novembre 2022 ; Encart : Le député du Likud Yariv Levin après des négociations de coalition dans un hôtel de Jérusalem, le 30 novembre 2022/ (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Des sources de l’opposition et de la coalition ont confirmé lundi que le vote crucial sur la sélection d’un président de la Knesset aura lieu demain à 10 heures, au lieu d’aujourd’hui comme prévu, en raison de la pression exercée par le futur camp de l’opposition.

Le député du Likud Yariv Levin devait remplacer le président actuel Mickey Levy du parti Yesh Atid, à la demande des 64 députés de la nouvelle coalition.

Le transfert du présidium de la Knesset du contrôle de l’opposition entrante à celui de la coalition entrante est essentiel pour faire avancer le programme législatif du nouveau gouvernement.

Ce remplacement permettra de procéder à des votes rapides sur une série de projets de loi visant à réorganiser et, dans certains cas, à étendre les compétences ministérielles, ainsi qu’à consolider les nominations convenues entre le Likud et ses partenaires de coalition – étapes essentielles pour que la nouvelle coalition attendue puisse prêter serment et entrer en fonction.

Le gouvernement sortant a commencé à dresser des obstacles sur le chemin de la coalition entrante, notamment en présentant son propre candidat au poste de président de la Knesset et en prévoyant apparemment d’ajouter d’autres points à l’ordre du jour législatif afin de retarder le vote de plusieurs heures.

La présidente sortante de la Commission de la sécurité intérieure, Merav Ben Ari, une députée de Yesh Atid, est la candidate de la coalition, annoncée ce matin par le parti mais qui n’a aucune chance d’être élue.

Selon des sources proches, un vote préliminaire devrait avoir lieu lundi sur trois projets de loi qui seront déterminants pour la composition du prochain gouvernement : un projet de loi visant à étendre les pouvoirs du futur ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, d’extrême droite; un projet de loi permettant au parti ultranationaliste HaTzionout HaDatit de nommer un ministre responsable des programmes de construction en Cisjordanie ; et un projet de loi qui permettra au chef du Shas, Aryeh Deri, d’accéder aux ministères de l’Intérieur et de la Santé, malgré sa condamnation avec sursis pour fraude fiscale.

Le parti Otzma Yehudit de Ben Gvir, ainsi que les partis HaTzionout HaDatit et Shas, auraient exigé ces changements comme conditions préalables à la formation du nouveau gouvernement, et comme il ne reste que neuf jours au mandat de Netanyahu pour former le prochain gouvernement, le Likud doit agir rapidement.

La date butoir de Netanyahu, qui devait initialement expirer dimanche soir, a été prolongée ce week-end jusqu’au 21 décembre par le président Isaac Herzog. Dès que Netanyahu aura informé Herzog qu’il a rassemblé une majorité gouvernementale, le président de la Knesset pourra convoquer un vote d’investiture dans les sept jours, ce qui pourrait reporter la finalisation à la fin décembre.

Le remplacement de l’actuel président de la Knesset membre du parti Yesh Atid, Mickey Levy, par le président du Likud, Levin, est la première étape de cette campagne législative, car il permettra au Likud et à ses partenaires de coalition radicaux de contrôler l’agenda législatif de la Knesset. Le groupe de partis dirigé par Netanyahu – le Likud, les partis ultra-orthodoxes Shas et Yahadout HaTorah, et les partis d’extrême droite HaTzionout HaDatit, Otzma Yehudit et Noam – a remporté 64 des 120 sièges de la Knesset aux élections du 1er novembre.

Avec ces résultats, le processus législatif accéléré ne devrait pas prendre plus d’une semaine. Lundi, la commission des Arrangements de la Knesset devrait créer les commissions nécessaires aux discussions et à la préparation des projets de loi.

Les projets de loi seront présentés lundi pour leur lecture préliminaire. Après cette étape, ils passeront devant les commissions afin d’être soumis à ce que l’on appelle la première lecture – techniquement le deuxième vote – probablement mercredi. Après leur première lecture, ils retourneront devant les commissions en vue de leur deuxième et troisième lecture. Souvent menées de front, celles-ci peuvent avoir lieu lundi prochain. Après leur troisième lecture, les projets de loi deviennent des lois.

Les trois projets de loi

Si le projet de loi de Ben Gvir est adopté, le député, qui sera appelé à remplacer Omer Bar Lev, du parti travailliste de centre-gauche, au ministère de la Sécurité intérieure, se verra accorder des pouvoirs sans précédent sur la police, d’après les précisions sur le projet de loi rapportées par la Douzième chaîne jeudi. Il aura notamment l’autorité sur les décisions politiques de la police, auxquelles le commissaire devra se conformer.

Actuellement, le chef de la police est responsable de la politique mise en oeuvre par la police et peut demander l’accord du ministre sur des questions sensibles.

Le chef d’Otzma Yehudit, Itamar Ben Gvir, à gauche, et le chef de la police, Kobi Shabtai, lors de la bat mitzvah de la fille de Ben Gvir, dans l’implantation de Kiryat Arba, en Cisjordanie, le 8 décembre 2022. (Crédit : Arie Leib Abrams/Flash90)

Les changements accorderont également à Ben Gvir – lui-même condamné à plusieurs reprises par le passé pour soutien à une organisation terroriste et incitation au racisme – de fixer la politique générale en matière d’enquêtes et de poursuites judiciaires, sans pour autant lui permettre de s’impliquer directement dans les enquêtes.

Ben Gvir pourrait ainsi empêcher que certaines infractions spécifiques soient sanctionnées (comme par exemple ne pas poursuivre les juifs qui rompent le statu quo fragile en allant prier sur le Mont du Temple, point névralgique de Jérusalem).

Le conseiller d’Otzma Yehudit Chanamel Dorfman, à droite, et le député Likud Yariv Levin signant l’accord de coalition, le 25 novembre 2022. (Autorisation)

Le chef de cabinet de Ben Gvir, Chanamel Dorfman, a refusé de répondre à la question qui lui a été posée samedi de savoir si Ben Gvir utiliserait ses nouveaux pouvoirs pour permettre la prière juive sur le Mont du Temple. Ben Gvir fait depuis longtemps pression pour qu’Israël étende sa souveraineté sur le site sacré, un lieu saint important pour les musulmans et une source de tensions perpétuelles avec les Palestiniens.

Dans le cadre du statu quo actuel, tout le monde peut visiter le Mont, également connu sous le nom de Haram al-Sharif, mais seuls les musulmans ont le droit d’y prier. Dorfman et Ben Gvir ont qualifié cette politique de raciste à l’égard des Juifs.

En soumettant le projet de loi à la Knesset jeudi, Ben Gvir a déclaré que ce jour était « un jour important pour la démocratie », faisant écho à la ligne du bloc dirigé par le Likud selon laquelle l’essence de la démocratie réside dans la « souveraineté » des représentants élus par le peuple.

La même logique a été utilisée pour faire passer un plan de réforme judiciaire qui affaiblirait le système de checks and balances [poids et contrepoids] du pouvoir politique.

Plusieurs médias israéliens non cités ont signalé vendredi que la procureure générale Gali Baharav-Miara ne défendra pas le projet de loi si et quand il sera contesté devant la Haute Cour de justice. Elle n’a pas fait de commentaire officiel. Lors d’une interview télévisée samedi soir, Ben Gvir s’est dit « profondément déçu » par ces informations.

La nouvelle procureure générale Gali Baharav-Miara lors d’une cérémonie d’accueil à Jérusalem le 8 février 2022. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Par contre, il y a peu de chances que Baharav-Miara s’oppose à un projet de loi visant à légaliser la nomination du leader du Shas Deri aux ministères de l’Intérieur et de la Santé. Il est également prévu qu’il soit nommé au ministère des Finances d’ici deux ans environ, succédant ainsi à Bezalel Smotrich de HaTzionout HaDatit.

Deri purge actuellement une peine avec sursis liée à une récente condamnation pour fraude fiscale. La loi disqualifie les candidats qui purgent des peines de prison en cours d’être ministres, mais le texte est vague sur la question de savoir si cela concerne également les peines avec sursis. La législation de Shas clarifierait la loi pour qu’elle ne s’applique qu’aux peines privatives de liberté, ouvrant ainsi la voie à Deri.

Outre ses passages à la tête des ministères de l’Économie, de la Périphérie et des Services religieux, Deri a été plusieurs fois ministre de l’Intérieur, la dernière fois entre 2016 et 2021. De 2000 à 2002, il a purgé une peine de 22 mois de prison pour avoir accepté un pot-de-vin lors de sa dernière nomination au ministère de l`Intérieur.

Les responsabilités de Smotrich en matière de défense

Le troisième projet de loi qui devrait être présenté lundi permettra à Smotrich de placer un ministre indépendant de son parti au sein du ministère de la Défense, afin de superviser les réglementations en matière de planification et de construction dans la zone C de la Cisjordanie, où se trouvent toutes les implantations juives et de nombreux Palestiniens.

En plus de superviser la planification et les autorisations de construction pour les implantations juives et les maisons palestiniennes dans la zone C, le ministre désigné de HaTzionout HaDatit – probablement Smotrich lui-même – interviendra également dans la nomination des généraux en charge de la politique civile d’Israël concernant la Cisjordanie et la bande de Gaza.

Actuellement, le général en charge de l’administration civile est nommé par le chef d’état-major de Tsahal, et le général le plus ancien en charge de la coordination des activités gouvernementales dans les territoires est nommé par le ministre de la Défense, sur recommandation du chef d’état-major.

Le chef du parti HaTzionout HaDatit, le député Bezalel Smotrich, après des discussions de coalition avec le leader du Shas, Aryeh Deri, et le chef du Likud, Benjamin Netanyahu, à l’extérieur d’un hôtel à Jérusalem, le 5 décembre 2022. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Le ministre de la Défense Benny Gantz a déclaré dimanche que le changement de la chaîne de commandement bouleversera les processus actuels et pourrait entraîner des perturbations dans la zone C particulièrement fragile.

La nomination d’un ministre du HaTzionout HaDatit va créer « deux lignes de commandement distinctes », de sorte que « la main droite ne saura pas ce que fait la main gauche », a déclaré Gantz à la radio de l’armée.

Le directeur général du ministère de la Défense de Gantz, Amir Eshel, a fait écho à ces commentaires, en déclarant à la radio de l’armée qu’il sera difficile de coordonner le travail de Tsahal, de l’Administration civile et de la division cisjordanienne de la Police des frontières, dont la responsabilité devrait être confiée à Ben Gvir. Actuellement, tous trois sont sous la responsabilité du chef d’état-major de Tsahal et, dans une certaine mesure, du ministre de la Défense.

Le parti HaTzionout HaDatit de Smotrich est un fervent partisan des implantations juives et de l’annexion de la Cisjordanie. En 2005, Smotrich a été arrêté par le Shin Bet, qui le soupçonnait de préparer une manifestation violente contre le désengagement de Gaza, alors en cours.

Le président du Shas, le député Aryeh Deri, après des pourparlers de coalition avec le député Bezalel Smotrich de Hatzionout HaDatit et avec le chef du Likud Benjamin Netanyahu à l’entrée d’un hôtel de Jérusalem, le 5 décembre 2022. (Crédit :Yonatan Sindel/ Flash90)

Remaniement ministériel au Likud

Les postes qui seront occupés par des membres du Likud au sein de la nouvelle coalition n’ont pas encore été attribués, parmi eux celui de président de la Knesset. Levin a été chargé à titre temporaire d’assumer ce rôle afin d’accélérer l’adoption des législations pendant que d’autres postes sont pourvus au sein du parti. Il devrait démissionner de son poste peu avant l’investiture du gouvernement, pour occuper un poste ministériel.

Les principaux candidats au poste de président permanent sont les députés David Amsalem et Ofir Akunis, bien que d’autres députés aient insisté pour être pris en considération.

L »ancien ministre Amsalem avait fait la une des journaux en juin en déclarant qu’une fois le Likud revenu au pouvoir, il « écraserait » les opposants politiques et « briserait les os de la gauche ».

S’adressant à l’actuel président de la Knesset, Mickey Levy, Amsalem avait alors déclaré que « si Levy me mettait dehors sept fois par jour, je le mettrais dehors 15 fois. »

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