Le Shin Bet a traqué en secret les portables des Israéliens sur plus de 2 ans
Selon un reportage TV, l'agence de sécurité a obtenu l'accord du ministère de la Justice, mais beaucoup au gouvernement, à la Knesset et aux compagnies de téléphone ne savaient pas
Bien avant l’apparition du coronavirus, le service de sécurité du Shin Bet suivait secrètement les téléphones portables des Israéliens dans le cadre d’un programme clandestin de lutte contre le groupe terroriste État islamique qui a duré au moins deux ans et demi et qui pourrait encore être en cours, selon un reportage télévisé diffusé dimanche.
Le programme classifié, dont le nom est soumis à la censure, a été approuvé par une équipe de hauts fonctionnaires du ministère de la Justice, dirigée par le procureur général de l’époque, Shai Nitzan, ainsi que par le procureur général Avichai Mandelblit, mais n’a pas fait l’objet d’un contrôle parlementaire, d’une législation ou d’une réglementation quelconque, a rapporté la Treizième chaîne dimanche soir, sans citer de source.
Dans le cadre de ce programme, les téléphones portables de la plupart des Israéliens ont été exposés au suivi du Shin Bet. Le rapport ne dit pas exactement quel type de données a été recueilli, mais il indique que le service de sécurité a exploité les bases de données détenues par les compagnies de téléphonie mobile pour récolter des informations – apparemment à l’insu des compagnies.
Le rapport ne dit pas quel type d’implication ou de surveillance le Premier ministre ou le gouvernement a eu dans cette affaire.
Selon ce document, le ministère de la Justice a autorisé le service à accéder aux données personnelles des Israéliens pour une période initiale de six mois, avant de prolonger cette période à plusieurs reprises, pour au moins deux ans et demi – et peut-être même jusqu’à aujourd’hui.
L’objectif déclaré du programme était de lutter contre les activités de l’Etat islamique en Israël, selon le rapport.
Le rapport ajoute que même lorsque les informations glanées grâce au programme ont servi de base à des enquêtes criminelles et que des demandes ont été faites aux tribunaux pour approuver des écoutes téléphoniques et d’autres mesures d’enquête, les juges n’ont pas été informés de la façon dont les informations initiales avaient été reçues.
Le ministère de la Justice et le Shin Bet ont commenté dans un communiqué : « Les méthodes du Shin Bet dans sa lutte contre le terrorisme, et en général, sont classées secrètes par la loi, et les dévoiler pourrait causer un grave préjudice à la sécurité nationale. Périodiquement, les questions juridiques liées à l’activité du service sont soumises à l’examen et à l’approbation du procureur général ou de ses représentants ».
La Knesset a adopté lundi dernier un projet de loi autorisant le Shin Bet à utiliser les données des téléphones portables et autres informations sensibles pour traquer les Israéliens qui contractent le coronavirus et ceux avec lesquels ils sont en contact.
La législation controversée, qui sera en vigueur jusqu’en janvier, permet au ministère de la Santé d’utiliser les données de suivi du Shin Bet, tant qu’il y a plus de 200 nouvelles infections COVID-19 par jour.
Le programme a été utilisé en mars-avril, mais il a ensuite été arrêté en raison de la baisse du nombre d’infections et de l’absence de législation officielle.
Le gouvernement a relancé le programme de suivi téléphonique de Shin Bet le mois dernier en raison de l’augmentation des taux d’infection, mais un nombre croissant de personnes ont déclaré qu’elles ont été obligées de rester chez elles par erreur, probablement en partie à cause d’une technologie qui ne permet pas de discerner si deux personnes se trouvaient en fait à moins de deux mètres l’une de l’autre, suffisamment près pour transmettre le virus.
Une procédure d’appel a été incluse dans la loi. Mais de nombreuses personnes ont déclaré que les appels au ministère de la Santé restaient généralement sans réponse, car les fonctionnaires disent que le système était surchargé.
Le chef du Shin Bet, Nadav Argaman, a déclaré au gouvernement le mois dernier que les technologies utilisées par l’agence étaient destinées aux opérations antiterroristes et non à la traque massive de citoyens israéliens.
Argaman aurait exprimé son opposition au renouvellement du programme, qui avait été supprimé en avril après la décision de la Knesset de l’arrêter à la suite d’un arrêt de la Cour suprême de justice selon lequel une violation aussi massive des droits à la vie privée des Israéliens doit être ancrée dans une législation officielle.
Le programme a fait l’objet de critiques de la part de groupes de défense de la vie privée et des droits, mais a été salué par les responsables comme contribuant à endiguer la propagation du virus en donnant au gouvernement la possibilité de faire savoir aux Israéliens s’ils étaient en contact avec des porteurs de virus confirmés.
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