L’Égypte accepterait Tsahal à la frontière pour lutter contre la contrebande vers Gaza
Le Caire se rapproche, en privé, de la position israélienne, ce qui pourrait compromettre les efforts du Hamas pour un retrait total de Tsahal dans l'accord sur les otages
Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.
Après avoir longtemps rejeté l’idée en public, Le Caire semble désormais envisager, en privé, la possibilité d’autoriser les troupes de Tsahal à rester dans une zone frontalière clé utilisée par le groupe terroriste palestinien du Hamas pour faire passer des armes d’Égypte à Gaza, ont indiqué mardi au Times of Israel deux responsables israéliens au fait de la question, dont un haut placé.
Le changement possible de la position de l’Égypte compliquerait probablement la position du Hamas dans les négociations en cours sur les otages, car le groupe terroriste exige le retrait d’Israël du corridor de Philadelphi dans le cadre de l’accord de cessez-le-feu en étapes.
Depuis le mois de mai, les négociateurs israéliens discutent du retrait de ce tronçon frontalier d’environ 14 kilomètres, les États-Unis menant des discussions trilatérales avec Israël et l’Égypte sur la construction d’un mur souterrain le long du corridor au sud de la bande de Gaza et l’installation d’un système de surveillance pour empêcher toute contrebande d’armes vers Gaza, ont indiqué les deux responsables.
Mais, cherchant à tirer parti d’une position renforcée sur le champ de bataille au début du mois, Netanyahu a changé de cap et a décrété que le maintien de Tsahal dans la zone de Philadelphi était non négociable.
Cette nouvelle exigence semblait contredire la proposition sur les otages approuvée par le Premier ministre en mai, qui prévoyait le retrait d’Israël de l’ensemble de la bande de Gaza au cours de la deuxième des trois phases de six semaines prévues par l’accord de cessez-le-feu.
Au début du mois, un membre de l’équipe israélienne de négociation sur les otages et un médiateur arabe avaient confié au Times of Israel que cette nouvelle exigence de Netanyahu – ainsi qu’une autre, à savoir la création d’un mécanisme visant à empêcher la contrebande d’armes dans le nord de la bande de Gaza – risquait de faire échouer les négociations sur les otages.
Israël a pris le contrôle du côté gazaoui du corridor Philadelphi en mai, au cours de son offensive sur Rafah, la ville la plus au sud de la bande de Gaza. Dans les mois précédant cette opération, l’Égypte avait averti que cela risquait de nuire au traité de paix signé par Le Caire et Jérusalem en 1979.
Initialement, l’Égypte avait utilisé son rôle de médiateur dans les négociations sur les otages pour tenter de pousser Israël à se retirer du corridor dans le cadre d’un accord de cessez-le-feu. Mais le responsable israélien a expliqué que le Caire avait graduellement assoupli sa position ces dernières semaines, alors que Jérusalem durcissait sa position de négociation.
« [L’Égypte] ne souhaite pas non plus que le Hamas reprenne ses activités de contrebande à la frontière », a expliqué le responsable israélien.
Il a précisé qu’aucun accord n’avait encore été conclu et qu’Israël voulait maintenir une présence prolongée, mais non permanente, dans le corridor de Philadelphi.
Des tunnels de contrebande ont été creusés sous la frontière entre Gaza et l’Égypte pour contourner le blocus israélo-égyptien imposé après la prise de contrôle de Gaza par le Hamas en 2007. Certains de ces tunnels étaient suffisamment larges pour permettre le passage de véhicules. Le Hamas les a utilisés pour faire passer armes et fournitures, et les résidents de Gaza pour introduire des marchandises commerciales, allant du bétail aux matériaux de construction.
La situation a changé ces dix dernières années, lorsque l’Égypte a dû affronter les terroristes de l’État islamique (EI) dans le Sinaï. L’armée égyptienne a mené des attaques sévères et détruit des centaines de tunnels. Les tunnels n’ont cependant pas tous disparu, et Israël affirme en avoir découvert des dizaines depuis qu’il a pénétré dans le corridor en mai.
Alors que l’Égypte tend aujourd’hui à rejoindre la position d’Israël au sujet du corridor Philadelphi, Israël semble se rapprocher de la position du Caire sur la gestion du poste-frontière de Rafah, qui se trouve à proximité, ont précisé les responsables.
L’Égypte a fermé Rafah après la prise de contrôle de la bande de Gaza par Israël au début du mois de mai, conditionnant sa réouverture au remplacement de Tsahal par l’Autorité palestinienne (AP) au point de passage.
Dans un premier temps, Israël a refusé toute implication de l’AP dans la surveillance du point de passage, Netanyahu comparant le gouvernement basé à Ramallah au Hamas et s’engageant à ne pas donner à ce dernier un point d’ancrage dans la bande de Gaza.
Mais depuis quelques semaines, Jérusalem a également revu sa position sur cette question clé, le cercle de Netanyahu commençant à reconnaître que l’AP est la seule alternative viable à l’heure actuelle, même s’il fait pression pour des réformes majeures à Ramallah, ont déclaré les responsables.
Par ailleurs, la réouverture du point de passage de Rafah fait partie intégrante du succès de l’accord sur les otages, étant donné que la dernière proposition spécifie que les terroristes du Hamas blessés seront autorisés à franchir le point de passage pour recevoir des soins médicaux pendant la première phase du cessez-le-feu.
L’ambassade d’Égypte à Washington n’a pas répondu à une demande de commentaires.
L’Associated Press a contribué à cet article.