Les pluies dévoilent deux statuettes rares de chevaux dans le nord d’Israël
Des petites figurines de plus de 2 000 ans ont été trouvées dans deux lieux différents par des archéologues improvisés - une raison de plus de regarder où on marche
Amanda Borschel-Dan édite la rubrique « Le Monde Juif »
Même lorsqu’elle s’aventure en randonnée avec ses filles, cette employée de l’Autorité israélienne des Antiquités (IAA) a du mal à oublier le travail.
Alors que la famille cherchait des champignons après les pluies du mois de janvier dans le secteur de Kfar Ruppin, les filles de l’archéologue Ayelet Goldberg-Keidar, Hadas et Maya, ont découvert une petite figurine en argile vieille de 2 800 ans représentant un cheval. A défaut de champignons.
Kedar-Goldberg explique avoir immédiatement su que la statue était une jolie trouvaille : « nous étions très excitées. C’est une découverte fascinante et particulièrement belle ».
« J’ai tout de suite identifié la figurine ancienne comme datant de l’Age de fer – la période du royaume d’Israël », ajoute Kedar-Goldberg dans le communiqué de presse de l’IAA.
Coïncidence amusante, une seconde statue représentant un cheval – âgée celle-là de « seulement » 2 200 ans – a été trouvée ailleurs, à proximité du bord de mer de Tel Akko, par un autre randonneur, Michael Markin.
Selon l’Autorité, ce cheval – qui porte un harnais et une crinière – remonte à la période hellénistique (IIIe et IIe siècles avant l’ère commune).
Il n’est pas inhabituel que de telles découvertes surviennent après de fortes pluies, explique Nir Distelfeld, inspecteur de l’unité de la prévention des vols au sein de l’AAI.
De la même manière, la nature profite également de l’aide des animaux, qui, en creusant le sol, peuvent mettre au jour des artefacts antiques.
Au mois de décembre 2017, au cours d’une autre randonnée familiale au kibboutz Nir David, Goldberg-Keidar et sa fille Hadas étaient tombées sur une lampe en argile qui gisait à l’entrée d’une grotte utilisée par un porc-épic comme refuge d’hiver.
« Les porcs-épics préfèrent les sites archéologiques car la terre y est moins tassée en raison des activités humaines du passé », explique Distelfeld.
Distelfeld appelle celles et ceux qui trouvent des objets d’une telle rareté à se faire rapidement connaître ou à les confier à l’IAA afin « d’aider à reconstituer les pièces de notre puzzle historique ». Des attestations de reconnaissance sont remis à tous les bons citoyens du genre.
Grâce au signalement en temps réel de telles découvertes et de leur localisation, les archéologues peuvent « extraire les renseignements archéologiques du site », poursuit Distelfeld.
Dans le cas de ces têtes de cheval, l’enquête préliminaire, menée par l’archéologue et historienne des arts de l’université de Haïfa Adi Erlich, a déjà permis de recueillir de très nombreuses informations précieuses.
Dans le communiqué de presse de l’IAA, Erlich explique qu’en plus d’une utilisation bien plus grande du cheval à l’époque, de telles figurines étaient communes en terre d’Israël pendant l’Age de pierre (1er siècle avant l’ère commune). Des figurines ou des récipients représentant des chevaux étaient régulièrement sculptés avec ou sans cavaliers, note-t-elle.
La main gauche d’un cavalier est visible sur l’encolure du cheval de la petite statuette découverte par la famille Goldberg-Keidar près de Kfar Ruppin. Selon Erlich, le style et l’artisanat de cette figurine sont caractéristiques de la période s’étendant du IXe au VIIe siècle avant l’ère commune. Sur la tête de cheval en argile, l’artiste a ajouté des oreilles, un harnais et une crinière – et même des rayures rouges encore légèrement distinguables.
« Il faut noter que dans notre région, seuls les hommes, ou presque, étaient représentés sur des figurines en train de monter à cheval, tandis que les femmes étaient sculptées selon des thématiques liées à la fertilité, à la maternité et à la sexualité, ce qui atteste de la répartition des rôles entre les sexes durant l’Age de fer », ajoute Erlich.
Dans le communiqué de presse de l’IAA, Erlich évoque également les références de la Bible aux chevaux. Curieusement, il y a quelques jours, les synagogues du monde entier ont écouté une lecture du livre des Juges (4:4-5:31) qui évoquait la lutte menée par Baraq et Déborah contre Sisara et ses chars.
La bataille, au cours de laquelle les chars de Sisara se sont embourbés, est immortalisée dans le Cantique de Déborah.
Dans certaines traductions, la poésie comprend aussi une dimension pluvieuse de circonstance : « puis retentit le grondement de tonnerre des sabots des chevaux, la course rapide de leurs guerriers ».